Fête de saint Josémaria
Homélie pour la Saint-Josémaria
prononcée en la cathédrale Notre-Dame de Grenoble
L’Évangile que nous venons d’entendre nous parle d’un aspect de la vie chrétienne auquel tenait profondément saint Josémaria, le fondateur de l’Opus Dei, dont nous célébrons aujourd’hui la fête liturgique. Cet aspect, il la qualifié d’« unité de vie ». C’est-à-dire qu’il ne doit pas y avoir de compartiments étanches dans la vie du chrétien, du moins du chrétien cohérent avec la foi qu’il professe et qui reconnaît le grand don de la vie que Dieu le Père lui a fait. L’absence de cohérence se traduit par le fait de mener parallèlement la vie de rapports avec Dieu, la vie familiale, la vie professionnelle, la vie de loisirs, la vie sociale, etc., sans qu’elles se rencontrent. C’est-à-dire sans que la foi imprègne toutes nos activités.
Saint Josémaria nous invitait à réfléchir à cette rupture par ce point de Chemin, le plus connu de ses ouvrages : « Laïcisme. Neutralité. — Vieux mythes que l’on essaie toujours de rajeunir. As-tu pris la peine de penser à quel point il est absurde de dépouiller sa qualité de catholique, en entrant à l’université ou dans un groupement professionnel, à l’académie ou au parlement, comme on laisse un pardessus au vestiaire ? » (n° 353). C’est pourtant ce que beaucoup font. Mais c’est effectivement absurde. Plus encore, c’est de l’ingratitude envers Dieu. C’est se comporter pour l’essentiel comme si nous n’étions devenus enfants de Dieu par notre baptême. C’est oublier la recommandation de l’Apôtre : « Soit donc que vous mangiez, soit que vous buviez, ou quelque autre chose que vous fassiez, faites tout pour la gloire de Dieu » (1 Co 10, 31).
Ce n’est donc « pas celui qui m’aura dit : "Seigneur, Seigneur !" qui entrera dans le royaume des cieux, mais celui qui aura fait la volonté de mon Père qui est dans les cieux » (Mt 7, 21). Or, « ce que Dieu veut, c’est votre sanctification » (1 Th 4, 3), écrit Paul aux chrétiens de Thessalonique.
Nous ne pouvons pas concevoir une sainteté au rabais, minimaliste, se contenant de concéder quelques miettes à Dieu : la messe dominicale, une prière par-ci par-là, notamment en cas de problème. Cela, ce n’est pas rechercher activement la sainteté, mais plutôt tranquilliser sa conscience et se moquer de Dieu. Notre foi doit tout imprégner. La difficulté que nous éprouvons à tout harmoniser dans notre existence si chargée, et notamment à faire une place à Dieu, disparaît si nous regardons la réalité en face : Dieu ne nous demande pas d’accomplir une multitude de tâches, dans la famille, le travail professionnel, la société, etc., et aussi de nous sanctifier. Non. Il nous invite à nous sanctifier dans les occupations familiales, professionnelles, sociales, de détente, etc., et à partir d’elles ; et il nous donne sa grâce pour y parvenir effectivement.
C’est pourquoi saint Josémaria peut affirmer : « Pour l’apostolat, il n’y a aucun roc plus sûr que la filiation divine ; pour le travail, aucune source de sérénité en dehors de la filiation divine ; pour la vie de famille, aucune recette meilleure – et nous rendons ainsi la vie agréable aux autres – que de considérer notre filiation divine ; pour nos erreurs, bien que nous touchions du doigt nos misères personnelles, il n’y a pas de plus grande consolation ni de plus grande facilité, si tu veux vraiment aller chercher le pardon et la rectification, que la filiation divine. »
C’est ainsi, en effet, que « quiconque donc entend ces paroles que je dis, et les met en pratique, sera semblable à un homme sensé, qui a bâti sa maison sur le roc » (Mt 7, 24). Ce roc est, nous venons de le dire, le sens aigu de la filiation divine. Dieu est mon Père ; il veut mon bien. Et, pour cela, il n’a pas hésité à envoyer son Fils unique prendre une chair semblable à la nôtre en tout hormis le péché (Hb 4, 15), afin de nous ouvrir les portes du ciel.
Oui, la sainteté est accessible dans la vie de tous les jours. Mais il nous faut reconnaître cette présence aimante de Dieu dans notre vie. La sainteté est accessible parce que le germe de la sainteté est en nous : c’est, depuis notre baptême, la présence de la Très Sainte Trinité dans notre âme en état de grâce. Elle est accessible parce que le Fils de Dieu, Jésus-Christ, nous a dit : « Je ne vous laisserai pas orphelins » (Jn 14, 18) et il est resté dans les sacrements, notamment ceux de l’Eucharistie et de la réconciliation. La sainteté est à portée de la main parce que l’Esprit Consolateur est le Sanctificateur qui nous pousse à clamer : « Abba ! Père ! » (Rm 8, 15) et qui intercède lui-même auprès du Père en notre faveur par des gémissements ineffables ! (cf. Rm 8, 26).
Que la Vierge Marie, la Toute Sainte, nous guide sur le chemin de notre vie et nous donne l’ambition de la sainteté, pour que nous sachions unifier notre vie tout entière sous le regard aimant de la Trinité Bienheureuse, Père, Fils et Saint-Esprit. Amen.
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