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jeudi 28 janvier 2010

Le paralytique de la piscine probatique (8)

L'homme, qui a encore du mal à croire qu'il ne rêve pas, se relève puis rassemblant ses maigres biens, il prit son grabat et se mit à marcher (Jean 5, 9) au su et au vu de tout le monde.
La foule éberluée s'écarte pour le laisser passer et retient son souffle. On le félicite de toute part. Ceux qui si souvent on fait comme s'ils ne le voyaient pas jouent aux vieilles connaissances.
L'homme avance. Il ne sait pas encore trop où aller, car cela fait bien longtemps qu'il n'a plus de « chez lui ». De toute façon il se dit :
- Le plus important pour moi en ce moment, c'est d'aller au Temple pour remercier le Tout-Puissant qui, vraiment, a fait en moi des merveilles, saint est son nom ! (cf. Luc 1, 49). Yahvé garde les simples ; j'étais faible et il m'a sauvé ! (Psaume 116 (115), 6).
Il se dirige donc vers le Temple de Salomon, portant toujours son fardeau sur l'épaule. Mais voilà, ce jour-là, c'était sabbat (Jean 5, 9), et le jour du sabbat, il est interdit de porter des charges. Il 'y avait pas prêté attention. Quand même, après trente-huit ans d'immobilité, qui allait lui reprocher quoi que ce soit ?
Eh bien non ! Les Juifs dirent à celui qui venait d'être guéri, non sans une amphe lyrique :
- C'est le sabbat : il ne t'est pas permis de porter ton grabat (Jean 5, 10).
Ils n'ont pas encore été informés de l'événement qui vient de se produire à la piscine aux cinq portiques. Ils l'apprendront suffisamment tôt, pour se mettre en colère contre ce soi-disant rabbi qui enfreint le jour le plus sacré, le sabbat !
Ils n'ont pas compris que le Fils de l'homme est maître même du sabbat (Luc 6, 5), refusant d'examiner la question, tant elle heurte leurs habitudes et leurs acquis.
Pour eux et, il est vrai, pour tout Juif pratiquant, il est des choses que l'on ne peut pas faire ce jour-là. Ils croient sincèrement que ce serait offenser le Créateur que de ne pas respecter leurs prescriptions. Mais Jésus de Nazareth n'est pas venu abroger, mais parfaire la Loi (Matthieu 5, 17), la sublimer, lui conférer toute sa portée de loi d'Amour et de liberté.
- Il ne t'est pas permis de porter ton grabat (Jean 5, 10).
C'est vrai, à prendre les préceptes légaux au pied de la lettre. Mais ne peut-on pas appliquer l'épiquie, adapter la norme à la situation exceptionnelle de cet homme ?
Il n'entre pas en discussion avec ceux qui l'interpellent d'un ton acerbe, du moins ce n'est pas son intention. Sabbat ou pas sabbat, il leur répondit :
- C'est celui qui m'a guéri qui m'a dit :
- Prend ton grabat et marche (Jean 5, 11).
Celui qui m'a guéri. Il n'en sait pas plus sur cet homme providentiel. Il était tellement heureux une fois remis sur pied qu'il n'a même pas songé à demander :
- « Maître, qui es-tu ? D'où viens-tu ? »
Alors ils lui demandèrent :
- Quel est l'homme qui t'a dit
- Prend ton grabat et marche ? (Jean 5, 12).
Arrivés à ce stade, ils se doutent bien qu'il s'agit de Jésus, et ils se mordent les doigts de s'être laissés prendre au dépourvu, de ne pas avoir anticipé le venue du rabbi à Jérusalem pour la fête, alors que c'était somme toute logique. Ils auraient pu le marquer de plus près et l'empêcher peut-être d'enfreindre une nouvelle foi la Loi.
- « Ce perturbateur de l'ordre public ne nous laissera-t-il donc jamais tranquilles, soupire Elcana. Et tous ces pécheurs qui étalent leur ignorance et ne nous obéissent pas se laissent subjuguer par ce magicien et ses carabistouilles. Quand en aurons-nous fini avec lui ? Quand pourrons-nous célébrer sereinement la gloire du Tout-Puissant sans avoir à rester sur nos gardes, sans craindre l'incursion scélérate de cet imposteur ? »
Ils peuvent bien râler, ce n'est pas cela qui va empêcher Jésus de faire ce pour quoi il est descendu sur terre : La volonté de Celui qui m'a envoyé (Jean 4, 34). C'est pourquoi il attend que les événements suivent leur cours.
L'homme reste interdit, déconcerté, ne sachant que répondre. Il ne savait pas qui avait été l'artisan de ce prodige, car, comme il y avait foule en cet endroit, Jésus avait disparu (Jean 5, 13), et il n'avait pu s'entretenir avec lui.
Constatant qu'il ne dit rien, les Juifs s'adressent de nouveau à lui, sur un ton impératif et autoritaire :
- Il y a six jours pour travailler ; venez donc vous faire guérir ces jours-là, et non le jour du sabbat (Luc 13, 14). Six jours, cela ne vous suffit-il pas pour qu'il vous faille offenser Dieu le jour du sabbat ?
Ils ne sont pas contre les guérisons, bien qu'ils soupçonnent que Jésus les réalise grâce à un pouvoir occulte et malfaisant, ce qui est quand même paradoxal. Le bien peut-il sortir du mal ? Cet homme-là ne chasse les démons que par Bélzeébul, chef des démons (Matthieu 12, 24).
- Mais je n'ai rien demandé, proteste l'homme qui a été guéri. Je n'ai rien demandé ni hier ni aujourd'hui. C'est lui qui s'est arrêté devant moi. Enfin quelqu'un qui s'intéresse à moi, me suis-je dis. Ce n'est pas trop tôt. Cela fait trente-huit ans que j'étais là, grabataire, à même le sol. Vous vous rendez compte ? Et il m'a guéri. Je ne me suis pas posé de question quand il m'a dit de prendre mon grabat. L'idée ne m'a pas effleuré l'esprit que ce pouvait être le sabbat. Trente-huit ans que je ne puis me rendre ni au Temple ni à la synagogue. J'ai perdu le compte des jours. De toute façon, c'est très bien comme cela. Me voilà guéri, n'est-ce pas ce qui compte ?
- Tu eux nous faire la leçon en insultant nos Pères et le Tout-Puissant. Tu es né dans le péché et tu veux nous apprendre ce que nous devons faire. Maudit soit le jour où tu es né, espèce de vermine, pécheur invétéré.

(à suivre...)

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