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samedi 23 janvier 2010

Le paralytique de la piscine probatique (5)

Le malade regarde intensément Jésus. Il a parlé. Il n'attend rien, plus rien. Pourtant c'est la première fois que quelqu'un s'intéresse vraiment à lui, en dehors de lui apporter des restes comme pitance une fois par jour.
Car, quand il le faut, Jésus prend les devants ; c'est lui qui va à la rencontre de ceux qui ont besoin de lui.
Mais ce regard, le regard de cet homme, est d'une telle bonté, se dit l'infirme, qu'il me redonne espoir. Il est prêt à lui dire :
- Je te suivrai où que tu ailles (Luc 9, 57).
Voilà ce qu'il a envie de lui dire. Mais non, je ne peux pas le suivre. En effet, ajoute-t-il :
- Pendant que j'y vais un autre descend avant moi (Jean 5, 7)
Alors comment pourrais-je suivre le Seigneur ? Il ne faut pas rêver. Les autres n'ont pas de mérite à être plus rapides que moi. Même un estropié est plus leste. Que puis-je y faire ?
Toi, tu ne peux rien faire par toi-même, mais moi, je suis le brancardier des âmes désolées, dit Jésus en son for intérieur.

*
* *

Un grand silence s'est établi maintenant. Demas et Sosthène se sont dressés sur la pointe des pieds, et bien d'autres font de même dans la foule qui s'est resserrée autour du Seigneur, pour essayer de voir quelque chose et de comprendre ce qui se passe.
- On dirait qu'il lui parle.
- Oui, mais il ne se passe rien.
- Tu es drôle, toi. Qu'est-ce que tu attends ?
- Un miracle, Demas, oui, un miracle. C'est pour cela que nous sommes venus à cette piscine. L'aurais-tu oublié ?
Ils ont beau s'entretenir sotto voce, des « chut ! » leur font comprendre que ce n'est pas le moment de commérer.
Le malade continue de fixer Jésus intensément. En même temps, il est gêné d'être la cible de l'attention de tous, comme une bête curieuse.
- Je suis seul, toujours désespéremment seul. Et aujourd'hui, ils me regardent tous. Qu'est-ce qui leur prend ? Si au moins, ils me venaient an aide ! Mais ils sont tous là, figés sur place, muets, comme s'ils avaient peur de moi.
Il jette un regard rapide sur lui-même.
- Il est vrai que je n'ai pas fière allure. Pour tous ces gens qui ont l'air de bien se porter, je dois être repoussant et répugnant.
Jésus le tire de ses réflexions en lui ordonnant :
- Lève-toi, prend ton grabat et marche (Jean 5, 8).
Il voudrait demander s'il a bien compris, mais aucun son ne sort de sa bouche. Sa gorge est nouée. Il toise la foule, en quête d'un encouragement. Mais nul ne bronche.
En même temps, il sent un bonheur envahir tout son être, un bonheur et un bien-être comme il n'en a jamais connus.
- Comment pourrais-je marcher et porter mon grabat ? Je suis paralysé !
Il a envie de crier à la foule :
- Je suis paralysé, vous le voyez bien. Vous le voyez bien, vous qui m'avez toujours ignoré.

(à suivre...

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