Le statut de la femme à Paris (5)
Le statut de la femme à Paris (5)
Ainsi, de siècle en siècle, parce qu’elle la reconnaît « fille de Dieu », la foi chrétienne conquiert peu à peu à la femme un statut et une place dans la société qui sans être parfaits sont très différents de ce que nous imaginons et de ce qu’ils sont devenus par la suite.Reine, elle est couronnée, comme le roi. Elle le remplace le cas échéant et elle peut prendre en tout temps des décisions en tant que reine. Noble, rien n’empêche qu’elle soit suzeraine ayant des vassaux hommes et qu’elle exerce en son nom propre ses devoirs et ses droits. Abbesse, elle peut avoir pouvoir sur des monastères d’hommes (le cas le plus célèbre est celui de Fontevrault). Roturière, elle peut gérer ses biens à côté de ceux de son mari et exercer sous son nom, puisqu’elle n’est pas obligée de prendre celui de son mari, le métier de son choix. (lire la suite) Ne lui sont interdites que les professions qui mettent en danger sa santé lorsqu’elle est enceinte (la tapisserie de haute lisse, par exemple). On connaît à Paris des « barbières », des « banquières », des « médecines » (une dame Herbert, médecine, accompagne saint Louis en croisade pour soigner sa famille), des « chirurgiennes », des « enluminuristes », etc. à côté des « boulangères » et « paysannes » dirigeant leur exploitation. En bien des occasions elles ont droit de vote. Comme les hommes, parfois plus que les hommes, elles reçoivent instruction et éducation. Au IVe et VIe siècles, des abbayes de femmes tiennent des écoles de filles, et même des écoles mixtes, de haut niveau. A la fin du XIIIe siècle, on connaît à Paris vingt-deux maîtresses d’écoles laïques. Au XIVe siècle, l’écolâtre, celui qui, au nom de l’évêque, veille à l’administration des écoles, mentionne « les dames qui tiennent et enseignent aux écoles l’art et la grammaire ». Biens des collèges de l’Université seront fondés par des femmes, celui des Bons-Enfants, par exemple. La littérature montre la place qui est faite à la « Dame » (qui vient de domina, féminin de dominus, Seigneur) en particulier en amour.
Ce que perçoivent Gerson et Christine de Pisan, c’est un renversement des dynamises sociaux qui ne sont plus ceux de la foi, mais ceux du paganisme du droit romain, rétablissant la puissance du pater familias, et les pouvoirs de la lignée. C’est une exacerbation des droits de la famille sur les personnes. Culture antique et droit romain contribuent à faire retourner la femme à sa condition inférieure à l’homme. Du XIVe siècle au Code Napoléon et jusqu’à nos jours on verra cette tendance se préciser. En 1320, l’Université intente un procès à Jacoba Felicia qui exerce la médecine sans diplôme, puisque seule l’Université, réservée aux clercs, dispense un tel diplôme. Rapidement, non seulement on verra s’accroître le nombre de métiers interdits aux femmes, mais on en viendra à considérer que leur intelligence et leur caractère leur interdisent une réelle culture. Au XIVe siècle, Philippe le Bel sous prétexte de « loi Salique » interdit la succession des femmes sur les fiefs nobles. La guerre de Cent Ans leur fermera la royauté. Le 28 juin 1593, l’arrêt Lemaître, du Parlement de Paris, leur interdira toute fonction dans l’Etat.
(à suivre…)
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