ce blog est bloqué à l'entrée en Chine depuis le mois de mai 2007

mercredi 29 octobre 2014

Judas (1)

Judas (1)

« Ayant jeté les pièces d’argent dans le sanctuaire, il se retira et alla se pendre » (Matthieu 27, 5). Comment Judas en a-t-il pu arriver à une telle vilenie ? Est-il possible que son cœur fût déjà corrompu quand Jésus l’a fait sortir du rang des disciples pour le faire accéder à celui d’apôtre ? Certainement pas. Jésus le connaissait bien, comme il connaît tout de l’intérieur de l’homme, nous étant plus intime à nous que nous-mêmes, ainsi que le notait saint Augustin, à la suite d’une intense expérience intime (cf. saint Augustin, Confessions). Mais en même temps, en le choisissant pour faire partie des Douze ; notre Seigneur faisait un pari sur sa liberté et sa capacité d’être fidèle parce que lui, Jésus, l’aiderait en ce sens d’un bout à l’autre de sa vocation. Qu’est-ce qui a donc tourné la tête de Judas au point de brûler ses amours d’antan ? (lire la suite) Saint Jean-Paul II laisse entendre que c’est l’amour de l’argent : cette avarice a dû se conjuguer avec une soif de pouvoir qu’il entrevoyait à sa façon dans la restauration attendue du royaume d’Israël et le rôle que les Douze apôtres du Seigneur seraient amenés à y jouer, tout gens du commun qu’ils fussent. Ce qui était donc aussi une manifestation d’orgueil démesuré. Il interprétait sans doute mal la promesse de Jésus aux termes de laquelle les Douze siègeraient un jour sur douze trônes pour juger les douze tribus d’Israël (Matthieu 19, 28). Il semble d’ailleurs qu’il interprète rapidement de travers, avec une vision très humaine, tout ce que Jésus disait, le prenant au premier degré et ne sachant pas s’élever à un certain niveau d’abstraction ni aux conséquences morales à en tirer. « Tout mon malheur est qu’à aucun moment je n’ai pu perdre mes facultés de contrôle et de critique. Je suis comme ça. Les gens de Carioth sont comme ça. Une espèce de gros bon sens. Quand j’entends dire qu’il faut tendre la joue gauche et payer aussi cher pour une heure de travail que pour dix, et haïr son père et sa mère, et laisser les morts ensevelir les morts, et maudire son figuier parce qu’il ne produit pas des abricots au mois de mars, et ne pas lever un cil sur une jolie femme, et ce défi continuel au sens commun, à la nature et à l’équité, évidemment je fais la part de l’éloquence et de l’exagération, mais je n’aime pas ça, je suis froissé. Il y a en moi un appétit de logique, ou, si vous aimez mieux, une espèce de sentiment moyen, qui n’est pas satisfait. Un instinct de la mesure. Nous sommes tous comme ça dans la cité de Carioth. En trois ans je n’ai pas entendu l’ombre d’une discussion raisonnable (P. Claudel, « Mort de Judas », Figures et Paraboles). (à suivre…)

Aucun commentaire: