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lundi 30 mars 2015

Le vin de Cana (2)

Le vin de Cana (2)

Et ce, le temps de remplir les jarres, le temps de notre comparution devant Dieu. Alors, nous l’espérons avec une ferme espérance, les anges apporteront à Dieu ces vastes récipients remplis à ras bord du nectar le plus savoureux qui soit. Dieu « a gardé le bon vin jusqu’à maintenant » (Jean 2, 10), parce qu’il « est riche envers tous ceux qui l’invoquent » (Romains 10, 12), c’est-à-dire qu’il est magnanime, d’une générosité qui surprend toujours parce qu’elle passe la mesure humaine. Il s’agit d’une mesure « tassée, secouée, débordante » (Luc 6, 38). (lire la suite) Ici, les amphores ont été remplies précisément à ras bord. La mesure a été comble. Tout est grandiose dans cette scène. Elle annonce aussi le banquet des noces de l’Agneau (cf. Apocalypse 19, 9), quand le Seigneur Jésus, prenant la coupe, prononce sur elle la bénédiction puis, la prenant, l’élève et dit, en présence des Douze : « Prenez et buvez-en tous ; ceci est mon sang, le sang de l’alliance nouvelle et éternelle, qui sera versé pour vous et pour la multitude, en rémission des péchés. » Seuls profitent de ce vin au millésime exceptionnel, vraiment unique, ceux qui ont persévéré jusqu’au bout, ceux qui sont restés attachés au Seigneur, au Maître, et qui ne sont pas partis en avance de façon intempestive, sous des prétextes variés, futiles et très terre-à-terre. Le bon vin, « qui réjouit le cœur de l’homme » (Psaume 115, 15), ce cœur qui n’aspire qu’au bonheur précisément, ce bon vin n’est distribué qu’au dernier moment. C’est le banquet final de toute une vie passée à servir Dieu. C’est l’aboutissement d’années vécues vaille que vaille à l’aimer. C’est le terme des efforts fournis pour lui être fidèles envers et contre tout. C’est un quasi-droit pour les enfants de la famille. Et c’est le fruit de la promesse faite à ses amis : « Venez, les bénis de mon Père, prenez possession du royaume préparé pour vous depuis la création du monde » (Matthieu 25, 34). « Je vous ai appelés mes amis » (Jean 15, 15) et je veux que « là où je serai, vous soyez vous aussi » (Jean 14, 3). (fin)

samedi 28 mars 2015

Le vin de Cana (1)

Le vin de Cana (1)

Ce bon vin, de première qualité, dont on dirait qu’il provient de la meilleure cave au monde, que notre Seigneur offre aux époux en cadeau de mariage, peut figurer la vie éternelle que Dieu accorde à tous ceux qui ont participé à son banquet, qui ont uni leurs sacrifices à son Sacrifice, au banquet de l’Agneau, gage de la communion avec le Père dans l’Esprit pour les siècles des siècles. Le vin moins bon servi en premier symbolise alors toutes les grâces que nous recevons au cours de notre existence terrestre. Elles ne sont qu’un avant-goût de cette grâce suprême et définitive qu’est ce bon vin, le fruit de la vigne dont le Seigneur lui-même dit qu’il n’en boira plus jusqu’à en boire du nouveau avec nous dans le royaume de son Père (cf. Matthieu 26, 29) ? (lire la suite) Le vin de moindre qualité, c’est le centuple promis ici-bas par notre Seigneur. Ce n’est pas un vin ordinaire, ce que l’on appelle un vin de table. Il est déjà goûteux. Mais sans comparaison avec le vin capiteux dont parle le prophète Isaïe dans sa description de la Jérusalem céleste (cf. 25, 6). Le vin de tous les jours apporte déjà une joie bien réelle à l’homme, bien que sans commune mesure avec la joie du paradis où toute larme sera essuyée (cf. Apocalypse 21, 4). Il y a donc de la joie, beaucoup de joie, sur terre. Parce que, quoi qu’en pensent et quoi qu’en disent beaucoup, y compris parmi les catholiques, pour ceux qui aiment vraiment Dieu, tout, y compris la croix, concourt à leur vrai bien (cf. Romains 8, 28) et est source de joie. Celui qui aime Dieu pour de bon, et qui aime sa très sainte Volonté, comprend très bien et vit cette intuition majeure de la vie de saint Josémaria : Nulla dies sine cruce in lætitia ! Aucun jour sans la croix, dans la joie ! Cette joie qui peut paraître irraisonnée quand je regarde ma pauvre vie, au cours de laquelle j’ai dû si souvent demander pardon,, et encore n’ai-je pas eu conscience de tout ou n’ai-je pas su déceler toutes mes fautes. Mais cette joie ne découle-t-elle pas précisément du pardon reçu de Dieu ? Et ce pardon n’est-il pas quant à lui le vin réconfortant, reconstituant (cf. 1 Timothée 5, 23) de la grâce ? Et ce vin de la grâce ne nous enivre-t-il pas en amour de notre Dieu de miséricorde et d’Amour ? Ce vin de la grâce peut-il venir à manquer ? Oui et non. Non, tant que nous menons notre vie mortelle. Oui, quand celle-ci cesse, car il n’est plus possible de modifier l’état auquel nous sommes parvenus. (à suivre…)

jeudi 26 mars 2015

Jugement particulier et Marie

Jugement particulier et Marie

Vous aurez beaucoup de mal, ô Marie, avec le mécréant que je suis. Mais j’ai confiance dans votre talent oratoire. Il est bien connu. Nombre de vos plaidoiries enflammées circulent parmi nous. Et ce que nous constatons est que vous l’emportez toujours. Que le Juge reconnaît la justesse de votre défense, de vos arguments. Ils portent infailliblement. N’est-ce pas ce que votre grand serviteur Bernard de Clairvaux a prédit dans le « Souvenez-vous » ? Vous avez le sens de la formule bien frappée qui fait choc. (lire la suite) Vous savez toucher la corde sensible et mettre en mouvement la miséricorde plus que la justice. Plus que quiconque vous êtes l’Avocate des causes perdues. Vous aurez beaucoup à faire avec le pauvre pécheur que je suis, mais vous saurez le faire à merveille. Et ce sera encore un titre de gloire pour vous – une des gloires de Marie ! – et un motif de reconnaissance éternelle pour moi. Jésus, votre Fils et mon Frère aîné, mon Sauveur, n’a-t-il pas affirmé à plus d’un de ses serviteurs qu’il ne peut rien vous refuser puisque vous n’avez jamais dit non à tout ce qu’il vous a demandé ? Ce même Jésus n’a-t-il pas adressé comme requête à son Père de nous pardonner – je suis inclus dans le lot – parce que nous ne savons pas ce que nous faisons ? (cf. Luc 23, 34). Je ne sais pas ce que je fais quand je pèche. Et je ne sais peut-être pas non plus ce que je fais quand j’agis bien, puisque c’est sous la motion de ta grâce, Seigneur. Bien que, dans les deux cas, je me prononce librement pour ou contre toi. Mais vous êtes ma Mère. Et s’il y a un moment où je dois vous réclamer : Monstra te esse Matrem ! Montrez que vous êtes ma Mère, manifestez-vous en tant que Mère, c’est bien ce moment-là. Je ne puis douter que vous vous porterez à mon secours. N’ai-je pas sur moi votre saint scapulaire ? N’ai-je pas récité par milliers le chapelet comme vous nous l’avez vous-même recommandé, ce qui, vous l’avez assuré au bienheureux Alain de la Roche, fait que vous me secourez dans toutes mes nécessités – et puis-je être davantage dans le besoin que maintenant ? – et que nous jouirons d’une grande gloire dans le ciel. Votre parole – votre promesse – ne saurait être mise en défaut.

mardi 24 mars 2015

Charité fraternelle

Charité fraternelle

L’Apôtre s’adresse aux chrétiens de Philippes en des termes merveilleux autant qu’émouvants : « Je rends grâce à mon Dieu toutes les fois que je me souviens de vous – et c’est en tout temps, dans toutes mes prières que je prie pour vous tous » (Philippiens 1, 3-4). Il avoue donc prier en tout temps pour ceux qu’il a enfantés dans la foi au cours de son deuxième voyage apostolique, tout juste après que le Saint-Esprit lui ait interdit d’aller « annoncer la parole de Dieu dans la province d’Asie » (Actes 16, 6) et que Paul ait eu, pendant la nuit, une vision : « Un Macédonien se tenait là, qui lui adressait cette prière : ‘Passe en Macédoine et viens à notre aide !’ » (Actes 16, 9). (lire la suite) Embarqués à Troas, Paul et Luc allèrent « droit sur Samothrace et, le lendemain, sur Néapolis, d’où [ils gagnèrent] Philippes, qui est une ville du premier district de Macédoine » (Actes 16, 11-12). Là, ils ont la joie de constater que ses habitants apportent leur concours « à la cause de l’Évangile depuis le premier instant » (Philippiens 1, 5). Les Philippiens sont donc une cause de joie profonde pour Paul. C’est pourquoi il prie pour eux « dans la joie ». Mais il souligne qu’il prie pour eux « en tout temps », nous montrant par là que nous ne devons pas cesser de prier, c’est-à-dire de vivre en présence de Dieu, de maintenir un dialogue amoureux avec notre Seigneur, d’invoquer l’Esprit Saint. « Il convient de prier toujours, sans jamais se lasser » (Luc 18, 1), avait dit Jésus-Christ. C’est un climat de prière permanente qui s’instaure quand l’on s’efforce de tout faire pour la gloire de Dieu, de tout lui offrir, de tout accomplir par amour de Dieu, en pensant au bien que nous pouvons ainsi faire à nos frères dans la foi et à l’humanité. En même temps, Paul fait mémoire des fidèles de Philippes dans toutes ses prières, autrement dit dans les moments plus spécialement consacrés à prier, à dialoguer avec Dieu, des moments qui sont comme la chaudière qui maintient une bonne température intérieure. « En tout temps, dans toutes mes prières. » Quel exemple pour nous, pour l’esprit de fraternité que nous sommes invités à vivre. Il est logique, du point de vue de la foi et de l’esprit qui nous unissent, que nous pensions constamment à nos frères, qui sont la chair de notre chair, que nous soyons proches d’eux par la pensée et la prière, pour demander à Dieu de les combler de ses bienfaits, de les assister et de les protéger. Cette charité fraternelle est l’huile qui maintient notre lampe allumée (cf. Matthieu 25, 1-13). Elle est le contre-écrou qui renforce notre vocation et nous aide à être fidèles, nous aussi.

dimanche 22 mars 2015

Marie, Mère de France

Marie, Mère de France Je ne veux plus aimer que ma mère Marie. Tous les autres amours sont de commandement. Nécessaires qu’ils sont, ma mère seulement Pourra les allumer aux cœurs qui l’ont chérie. C’est pour Elle qu’il faut chérir mes ennemis, C’est pour Elle que j’ai voué ce sacrifice, Et la douceur de cœur et le zèle au service Comme je la priais, Elle les a permis. Et comme j’étais faible et bien méchant encore, Aux mains lâches, les yeux éblouis des chemins, Elle baissa les yeux et me joignit les mains, Elle m’enseigna les mots par lesquels on adore. C’est par Elle que j’ai voulu de ces chagrins, C’est pour Elle que j’ai mon cœur dans les Cinq Plaies. Et tous ces bons efforts vers les croix et les claies, Comme je l’invoquais, Elle en ceignit mes reins. Je ne veux plus penser qu’à ma mère Marie, Siège de la Sagesse et source des pardons, Mère de France aussi, de qui nous attendons Inébranlablement l’honneur de la patrie. Marie Immaculée, amour essentiel, Logique de la foi, cordiale et vivace, En vous aimant qu’est-il de bon que je ne fasse, En vous aimant du seul amour, Porte du Ciel ? Paul Verlaine, Sagesse, II, Messein.

jeudi 19 mars 2015

La Saint-Joseph

La Saint-Joseph

Dans le deuxième Livre de Samuel, le Seigneur annonce à David que son fils rendra stable sa royauté, et que celle-ci subsistera pour toujours. Il ajoute une promesse : « Je serai pour lui un père, il sera pour moi un fils. » Cette promesse se réalise avec la venue de Jésus-Christ parmi nous. Et Joseph est pour lui un père aux yeux des hommes. Il se comporte réellement envers lui comme s’il était son père. Il peut dire en toute propriété de termes que Jésus est pour lui un fils. Et quel fils ! Si le nom de Joseph signifie « Dieu ajoutera », nous devons bien constater à quel point Dieu a ajouté de grandes choses dans la vie du saint patriarche, à commencer par l’épouse qu’il lui a donné, puis en confiant son propre Fils à ses soins paternels. C’était lui donner des facilités inouïes pour devenir saint. La sainteté consiste à nous identifier à Dieu, ce qui était plus facile pour Joseph, qui voyait en continu le Saint par excellence. La sainteté consiste à progresser dans la vertu, ce qui était plus aisé pour le père nourricier de Jésus, qui voyait en lui le modèle de toutes les vertus vécues en plénitude. La sainteté consiste à vivre en présence de Dieu, ce qui était plus simple pour le chef de la Sainte Famille, qui avait Dieu sous ses yeux en permanence. La sainteté requiert de passer par la Vierge Marie, ce qui allait de soi pour son époux. Nous, qui sommes plus grossiers, et qui voulons aussi devenir saints, nous bénéficions d’un autre ajout, qui est précisément le recours à saint Joseph. Le fait de lui confier et notre vie intérieure et notre apostolat, autrement dit les deux aspects essentiels de notre vocation. Prions-le avec confiance, pour qu’il prenne soin de nous au quotidien, comme il l’a fait avec Jésus, et pour qu’il nous aide à être, comme lui, au dire de l’Écriture, un homme fidèle et juste.

mercredi 11 mars 2015

Unité de vie (3)

Unité de vie (3)

Nous trouvons bien là une invitation à l’unité de vie. À nous centrer en Dieu à tout moment, en toute circonstance. À découvrir la main de Dieu en tout, comme Dieu lui-même s’est, là encore, chargé de le faire comprendre à saint Josémaria, par une motion divine dans les années 70 : « Recevez tout comme venant des mains de notre Seigneur Jésus-Christ. » Une invitation à voir dans les autres des âmes pour lesquelles le Christ a versé son Sang, comme pour nous, des âmes que nous devons donc aimer, pour qui nous désirons le vrai bien – c’est-à-dire leur salut éternel – et que nous cherchons donc à approcher de lui. (lire la suite) « vous devez maintenant comprendre — avec une clarté nouvelle — que Dieu vous appelle à le servir dans et à partir des tâches civiles, matérielles, séculières de la vie humaine : c’est dans un laboratoire, dans la salle d’opération d’un hôpital, à la caserne, dans une chaire d’université, à l’usine, à l’atelier, aux champs, dans le foyer familial et au sein de l’immense panorama du travail, c’est là que Dieu nous attend chaque jour. Sachez-le bien : il y a quelque chose de saint, de divin, qui se cache dans les situations les plus ordinaires et c’est à chacun d’entre vous qu’il appartient de le découvrir » (Entretiens, n° 114). Ce « quelque chose de divin », il nous appartient de le développer, de le faire fructifier pour la gloire de Dieu, ad majorem Dei gloriam, en travaillant, non pour des motifs humains, mais premièrement et fondamentalement par amour. Car, pensons-y bien l’unité de vie, c’est la mise en pratique du grand commandement de l’amour, par lequel Dieu nous demande légitimement de l’aimer, non pas à la petite semaine ou partiellement, mais de l’aimer de tout notre cœur, de toute notre âme, de toutes nos forces et de tout notre esprit (cf. Luc 10, 27). Tout, absolument tout dans notre vie doit ainsi être marqué par l’amour, motivé par l’amour, imprégné d’amour, suinter l’amour et, par suite, être source d’amour. C’est effectivement en aimant Dieu pour de bon, sans restriction, que nous pouvons aimer notre prochain comme nous-mêmes, ce qui est la suite du commandement suprême : tu aimeras « ton prochain comme toi-même » (Luc 10, 27). Car celui qui prétend aimer Dieu, qu’il ne voit pas, alors qu’il n’aime pas son prochain, qu’il côtoie, celui-là est un menteur (cf. 1 Jean 4, 20). Seigneur, je veux être trouvé véridique devant toi. Je veux te servir et t’aimer par touts les pores de ma peau spirituelle, de mon organisme surnaturel. Enseigne-moi à ne pas penser à moi, car chaque fois que je pense à moi je brise, ou du moins je fragilise, cette belle harmonie de la prière, du travail et de l’apostolat. Donne-moi, Seigneur, l’amour avec lequel tu veux que je t’aime, lui demandait saint Josémaria dans sa prière. Donne-moi cet amour, sans restriction, pour que j’arrive une bonne fois pour toutes à t’aimer de tout mon cœur, de toute mon âme, de tout mon esprit et de toutes mes forces. Que je ne cherche pas à me faire remarquer des autres et que je m’efface devant toi une fois que j’ai fait ce que j’avais à faire. Il faut que tu grandisses, toi, et que moi, je disparaisse, comme saint Jean-Baptiste l’a fait (cf. Jean 3, 30). Ce que le fondateur de l’Opus Dei traduira par cette maxime : « Agir et disparaître, afin que Jésus seul brille. » Cela aussi est de la belle et bonne unité de vie : tout pour Dieu, Deo omnis gloria ! (fin)

lundi 9 mars 2015

Unité de vie (2)

Unité de vie (2)

Si nous ne parlons pas de Dieu, ne serait-ce que par l’exemple – mais l’exemple ne suffit pas à lui seul – qui d’autre le fera ? Seigneur, fais-moi comprendre que je ne suis pas là où je me trouve par hasard. C’est toi qui m’y a envoyé : « Ce n'est pas vous qui m'avez choisi, mais c'est moi qui vous ai choisis et qui vous ai établis, pour que vous alliez et que vous portiez du fruit, que votre fruit demeure » (Jean 15, 16). Pour que je porte du fruit. Tu comptes donc sur moi, Seigneur, pour que ton Église s’enracine davantage dans mon milieu professionnel, social, familial ; pour que la vérité gagne du terrain. Et moi, à quoi est-ce que je pense habituellement ? (lire la suite) Il ne s’agit certes pas de changer d’activité ou de lieu. Non. Chacun de nous doit rester à cette place où Dieu l’a mis : « Que chacun demeure dans l’état même où l’appel divin l’a trouvé » (1 Corinthiens 7, 20). Il doit continuer d’y faire ce qu’il fait, mais en y mettant plus souvent une intention surnaturelle, en l’offrant à Dieu pour des intentions concrètes. Parmi celles-ci figurent tel collègue qui ne veut apparemment rien savoir de la religion, qui élude toute conversation sérieuse, qui ne se livre pas, mais… Et tel autre collègue qui mène une vie dissolue, mais… Et un troisième qui… De la sorte, notre travail professionnel et toutes nos activités se transforment en prière et en apostolat. C’est cela l’unité de vie. Tel a été l’enseignement constant de saint Josémaria, conduit très tôt sur cette voie par le Saint-Esprit, enseignement relayé par le bienheureux Álvaro. Écoutons le fondateur de l’Opus Dei : « Notre vie consiste à travailler et à prier, et inversement, à prier et à travailler. Car le moment arrive où l’on ne sait plus distinguer ces deux concepts, des deux mots, contemplation et action, qui finissent par signifier la même chose dans l’esprit et dans la conscience. » C’est le propre des saints, qui vivent si près de Dieu qu’ils se sentent constamment attirés par lui, qui sentent intensément sa présence, et qui peuvent ainsi se réjouir de leurs faiblesses : « Je préfère donc bien volontiers me glorifier de mes faiblesses, afin que la puissance du Christ habite en moi. C'est pourquoi je me plais dans les faiblesses, dans les opprobres, dans les nécessités, dans les persécutions, dans les détresses, pour le Christ ; car lorsque je suis faible, c'est alors que je suis fort » (2 Corinthiens 9-10). Les saints savent remercier Dieu même quand ils sont humiliés, traînés dans la boue ou quand ils manquent de tout, y compris du nécessaire pour vivre, ce qu’exprime bien cet autre point de Chemin : « Habitue-toi à élever ton cœur vers Dieu en action de grâces, et souvent dans la journée. — Parce qu’il te donne ceci ou cela. — Parce qu’on t’a humilié. — Parce que tu ne possèdes pas ce dont tu as besoin, ou parce que tu le possèdes. Parce que sa Mère, qui est aussi ta Mère, il l’a voulue si belle. — Parce qu’il a créé le soleil et la lune, et cet animal et cette plante. — Parce qu’il a donné à celui-ci d’être éloquent et à toi de bredouiller… Remercie-le de tout, parce que tout est bon » (Chemin, n° 268). Mais le fait de dire que les saints y sont parvenus ne doit pas nous faire douter d’y arriver, nous aussi, parce que nous sommes tous appelés à la sainteté dans notre vie ordinaire. Et que si nous ne découvrons pas Dieu dans cette vie ordinaire, dans les tâches multiples, bien souvent menues, qui la composent, nous ne le trouverons jamais. C’est ce que saint Josémaria proclamait dans son homélie emblématique du campus de l’Université de Navarre. Écoutons ses propres termes : « Il n’y a pas d’autre chemin, mes enfants : ou nous savons trouver le Seigneur dans notre vie ordinaire, ou nous ne le trouverons jamais. Voilà pourquoi je puis vous dire que notre époque a besoin qu’on restitue, à la matière et aux situations qui semblent les plus banales, leur sens noble et originel, qu’on les mette au service du Royaume de Dieu, qu’on les spiritualise, en en faisant le moyen et l’occasion de notre rencontre continuelle avec Jésus-Christ » (Entretiens, n° 114). (à suivre…)

samedi 7 mars 2015

Unité de vie (1)

Unité de vie (1)

« Alors Jésus parla aux foules et à ses disciples, disant : Les scribes et les Pharisiens se sont assis sur la chaire de Moïse. Faites donc et observez tout ce qu'ils vous disent; mais n'imitez pas leurs actions, car ils disent et ne font pas. […] Ils font toutes leurs actions pour être vus des hommes, car ils élargissent leurs phylactères et allongent leurs houppes » (Matthieu 23, 1-3.5). Combien de gens agissent ainsi ! Être remarqué par les autres, admiré des autres devient le critère de « moralité » des actes. Ce n’est plus la bonté objective qui compte, mais la notoriété, l’approbation de la foule. Ce qui implique que l’on ne se comporte pas de la même façon en privé, en l’absence de public. Comment qualifier quelqu’un de cet acabit ? C’est un pantin désarticulé. Il se situe aux antipodes de ce que doit être une vie chrétienne. Celle-ci, en effet, doit être marquée par l’unité de vie, pour reprendre une expression forgée par saint Josémaria. (lire la suite) Il entend par là que toutes les facettes de notre existence, à commencer par sa dimension spirituelle, bien sûr, mais aussi la vie familiale, le travail, la vie de relations sociales et donc l’apostolat, les loisirs, les différents engagements sans la société, tout cela doit être vécu avec Dieu, en Dieu, et orienté vers lui. Tout doit s’alimenter de la grâce afin de devenir une source de sanctification personnelle et d’autrui, et d’être lui-même sanctifié, c’est-à-dire ramené à Dieu, conformément au précepte de l’Apôtre de instaurare omnia in Christo, tout rassembler dans le Christ, restaurer toutes choses dans le Christ, rechristianiser toutes les réalités de la terre (Éphésiens 1, 10). À l’inverse des pharisiens contre lesquels le Christ vitupère et auxquels il reproche leur hypocrisie, les autres doivent pouvoir nous imiter, reproduire ce qu’ils nous voient faire et, voyant nos bonnes œuvres, rendre gloire à Dieu (cf. Matthieu 5, 16). Saint Augustin pose la question suivante : « Qui donc pourra rendre gloire à Dieu tout le jour durant ? Si tu veux, je vais t’indiquer la solution. Fais bien tout ce que tu fais, et tu auras rendu gloire à Dieu. Lorsque tu chantes une hymne, tu rends gloire à Dieu. En effet, que font ta langue et ta conscience si ce n’est rendre gloire à Dieu ? Cesses-tu de chanter des hymnes pour te reposer ? Ne t’enivres pas et tu auras rendu gloire à Dieu. Fais-tu des affaires avec quelqu’un ? Ne commets pas d’escroquerie, et tu auras rendu gloire à Dieu. Travailles-tu aux champs ? Évite les querelles, et tu auras rendu gloire à Dieu. Prépare-toi à rendre gloire à Dieu pendant toute la journée par la bonté de tes œuvres (st Augustin, Enarrationes in Psalmos 34, 2, 16). Qu’en est-il ? Nous connaissons cette autre interrogation, que nous lisons dans un point de Chemin : « As-tu pris la peine de penser à quel point il est absurde de dépouiller sa qualité de catholique, en entrant à l’université ou dans un groupement professionnel, à l’académie ou au parlement, comme on laisse un pardessus au vestiaire ? » (n° 353). N’est-ce pas ce qu’il nous arrive parfois de faire ? Nous n’osons pas affirmer franchement notre foi, nos convictions, dans notre milieu professionnel ou lors d’une invitation chez des amis, de peur de choquer, d’être mal compris, disons-nous, alors qu’en réalité c’est surtout pour nous éviter des complications. Or, saint Josémaria nous dit également ceci : « ‘Ma vie se heurtant à un milieu paganisé ou païen, mon naturel ne va-t-il pas sembler factice ?’ me demandes-tu. — Je te réponds : il y aura choc, sans doute, entre ta vie et ce milieu ; et ce contraste, où ta foi se confirmera par les œuvres, est précisément le naturel que je te demande (Chemin, n° 380). (à suivre…)

jeudi 5 mars 2015

Péché et tiédeur (7)

Péché et tiédeur (7)

Faisons fréquemment des actes de contrition : c’est une excellente dévotion. Et si nous n’en connaissons pas, tâchons d’en apprendre. Nous en trouverons ne serait-ce qu’en lisant le saint Évangile. Par exemple : « Seigneur, tu sais tout, tu sais bien que je t’aime » (Jean 21, 17). Ou, « Seigneur, si tu le veux, tu peux me guérir » (Luc 5, 12). Ce fils cadet qui part vivre sa vie n’est pas une figure de style. C’est chacun de nous, qui veut vivre en marge de Dieu, ou même sans Dieu par moments, ce qu’il faut avoir l’humilité de reconnaître. Efforçons-nous aussi de bien de profiter de notre temps. C’est-à-dire de faire ce que nous avons à faire, de ne pas le retarder, de faire en quelque sorte fructifier chaque minute qui passe. Le temps, qui est véritable trésor (lire la suite) reçu de Dieu, qui a l’importance que nous lui accordons, et qui dépend parfois des circonstances, comme l’illustre le texte suivant : « Tu veux comprendre ce qu’est une année de vie : pose la question à un étudiant qui vient de rater son examen de fin d’année. Un mois de vie : parles-en à une mère qui vient de mettre au monde un enfant prématuré et qui attend qu’il sorte de sa couveuse pour serrer son bébé dans ses bras, sain et sauf. Une semaine : interroge un homme qui travaille dans une usine ou dans une mine pour nourrir sa famille. Un jour : demande à deux amoureux transis qui attendent de se retrouver. Une heure : questionne un claustrophobe, coincé dans un ascenseur en panne. Une seconde : regarde l’expression d'un homme qui vient d’échapper à un accident de voiture, et un millième de seconde : demande à l’athlète qui vient de gagner la médaille d’argent aux jeux Olympiques, et non la médaille d’or pour laquelle il s’était entraîné toute la vie » (Marcel Lévy, Et si c'était vrai..., Paris, Robert Laffont, 2000, p. 228). Les vierges folles pensaient peut-être qu’elles avaient tout le temps devant elles, et qu’elles verraient quoi faire le moment venu… Mais tel n’était pas le cas. Un moment vient où il n’est plus possible de rectifier quoi que ce soit, de changer d’un iota la situation à laquelle on est parvenu. Pendant qu’il en est encore temps, laissons-nous guérir de notre cécité spirituelle par le Seigneur, qui a toujours le remède approprié à chaque circonstance. Allons à lui en toute confiance. N’est-il pas émouvant qu’il se tienne ainsi à notre disposition, sans rien nous reprocher, mais en nous témoignant d’une affection débordante, que nos incartades n’entament jamais ? « Après avoir vu la franche confession que la reine, notre chère épouse, a faite de ce qui a pu nous déplaire en sa conduite depuis quelque temps et l’assurance qu’elle nous donne de sa conduite, selon son devoir envers nous et notre État nous déclarons que nous oublions entièrement ce qui s’est passé, n’en vouloir avoir jamais souvenance, mais voulons vivre avec elle comme un bon roi et un bon mari doit faire avec sa femme » (Louis XIII, apostille sur la confession écrite d’Anne d’Autriche, le 15 août (?) 1637). Que penser alors du pardon de Dieu ? C’est cela la puissance infinie de notre Dieu d’Amour… « C’est toujours par Marie que l’on va et que l’on ‘revient’ à Jésus », nous dit saint Josémaria. Suivons ce conseil bien expérimenté, et nous bannirons toute tiédeur de notre vie, et notre amour de Dieu ne cessera de grandir. (fin)

mardi 3 mars 2015

Péché et tiédeur (6)

Péché et tiédeur (6)

Qu’est-ce qui peut nous aider à lutter avec constance ? Faire un examen de conscience. Habituellement, chaque soir : pour dresser un bref bilan de la journée écoulée… Il n’est pas nécessaire de suivre une méthode spécifique, car ce qui convient à l’un ne va pas à un autre, et ce qui sert à l’un à un moment donné ne lui est plus utile à une autre époque de sa vie… Il est utile de profiter de moments de tranquillité, par exemple pendant les vacances et, a fortiori, à l’occasion d’une récollection ou d’une retraite spirituelle, pour faire un examen plus approfondi et aller ainsi à la racine de nos maux spirituels. C’est ce à quoi invitait le conte du royaume et des brigands (lire la suite) rapporté précédemment. Tant que les racines de nos péchés n’auront pas été extirpées, tant que nous n’aurons pas pris conscience de ce qui nous induit à pécher…, aurons beau le regretter sincèrement et nous faire pardonner, notre péché repoussera inexorablement. Et nous ne pourrons nous en prendre qu’à nous-mêmes ; surtout pas à Dieu. Saint Josémaria proposait parfois un examen très simple, se ramenant à trois questions : « Qu’ai-je fait de mal ? Qu’ai-je fait de bien ? Qu’aurai-je pu mieux faire ? » Cela peut nous aider quand nous manquons d’inspiration. Mais nous pouvons nous interroger avantageusement en voyant comment nous nous sommes comportés par rapport à Dieu, à notre prochain et à nous-mêmes ; ou encore passer en revue différentes vertus, ou les commandements de Dieu et de l’Église… C’est à chacun de voir ce qui peut l’aider le mieux à bien se connaître et à s’améliorer. L’examen permet en effet de rectifier au jour le jour, il manifeste notre douleur d’amour et accumule ainsi des grâces efficaces dans notre âme. Il contribue à mieux nous comporter, avec une efficacité accrue, et surtout avec plus d’amour pratique de Dieu. comme le disait saint Augustin, « nos bonnes œuvres sont autant de coups que nous donnons à l’adversaire, et nos péchés, autant de coups que nous n’avons pas su parer. La victoire complète n’est pas de ce monde […]. Mais notre rival n’a plus d’avantages sur nous que lorsque nous imitons son attitude orgueilleuse ; au contraire, nous ne prenons jamais mieux le dessus qu’en suivant le Maître sur le chemin de l’humilité ; et le plus vif déplaisir que nous puissions infliger à l’ennemi, c’est d’aller chercher, dans la confession de nos péchés et dans la pénitence, la guérison de nos blessures (saint Augustin, Sermo 351, 6). Je t’ai fait connaître ma faute, je n’ai pas caché mes torts. J’ai dit : « Je rendrai grâce au Seigneur, en confessant mes péchés » (Ps 31, 5). Et lui, dans sa magnanimité, il pardonne effectivement, sans jamais se lasser. On dirait même qu’il éprouve un grand plaisir à pardonner aux pécheurs. Il en ressent manifestement une grande joie, la joie du père qui voit son fils revenir à la maison, ce qu’illustre magnifiquement bien la parabole si émouvante du fils prodigue (cf. Luc 15, 11-32). (à suivre…)

dimanche 1 mars 2015

Péché et tiédeur (5)

Péché et tiédeur (5)

Il faut ensuite maîtriser notre corps en ne lui accordant pas tout ce qu’il demande. Nous exercer à la tempérance dans le boire et le manger : un peu plus de ce que je n’aime pas et un peu moins de ce que j’aime… C’est déjà quelque chose d’important pour ne pas tomber dans la sensualité. Il convient aussi d’être ponctuel à notre lever et à notre coucher ; de contrôler nos pensées et notre imagination : nous ne sommes pas maîtres a priori de tout ce qui se présente à notre esprit, mais nous le sommes de le repousser aussitôt, avec la même énergie avec laquelle nous repoussons le moindre insecte qui s’est posé sur notre main… Ne laissons pas notre regard traîner partout ou n’importe où : la publicité, la mode sont conçues de façon à (lire la suite) solliciter les instincts les plus bas de l’être humain. Ne disons rien des spectacles… « Il est inévitable que des scandales arrivent. Mais malheur à celui par qui le scandale arrive ! Il eût été préférable pour lui qu’on lui ait passé une meule autour du cou et qu’on l’ait lancé à la mer, plutôt que de faire chuter un de ces petits » (Lc 17, 1-2), que nous sommes tous en définitive. Si nous savions qu’un voleur allait venir chez nous, ne prendrions pas des dispositions pour ne pas le laisser pénétrer dans l’appartement ? Ne resterions-nous pas éveillés, sur nos gardes ?… En prenant de saines dispositions dans tous ces différents domaines, beaucoup d’occasions de péché disparaissent d’elles-mêmes. C’est une bonne application du principe de précaution. Ici, il est absolument nécessaire de le vivre, car l’enjeu est d’une très grande importance : ne pas offenser Dieu, notre Père, préserver notre vie éternelle, conserver l’ouverture aux autres et l’élan apostolique. Le péché est quelque chose de personnel, qui engage notre liberté et notre responsabilité. Nous ne pouvons jamais dire que cela nous dépasse, ni que « c’est trop dur pour moi ». C’est totalement faux ! Il s’agit de la réponse de quelqu’un qui cherche à se justifier à ses propres yeux. Écoutons saint Paul nous faitre part de sa propre lutte : « De crainte que l’excellence de ces révélations ne vînt à m’enfler d’orgueil, il m’a été mis une écharde dans ma chair, un ange de Satan pour me souffleter, [afin que je m’enorgueillisse point]. À son sujet, trois fois j’ai prié le Seigneur de l’écarter de moi, et il m’a dit : "Ma grâce te suffit, car c’est dans la faiblesse que ma puissance se montre tout entière" » (2 Corinthiens 12, 7-9). Le même Paul avait déjà affirmé cette conviction : « Ainsi donc que celui qui croit être debout prenne garde de tomber. Aucune tentation ne vous est survenue, qui n'ait été humaine ; et Dieu, qui est fidèle, ne permettra pas que vous soyez tentés au-delà de vos forces ; mais, avec la tentation, il ménagera aussi une heureuse issue en vous donnant le pouvoir de la supporter » (1 Corinthiens 10, 12-13). La conclusion est facile à tirer. (à suivre…)