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samedi 31 juillet 2010

Arrêts sur christianisme (59)

Ne nous le dissimulons pas : quelle que soit la voie où le chrétien se sente appelé, il ne peut être question pour lui d’esquiver la nécessité, tôt ou tard, de tout abandonner : lui-même, ses amours, ses possessions, quelles qu’elles soient. Tous, plus tôt ou plus tard, y sont contraints. Et n’allons pas imputer au christianisme lui-même cette rigoureuse nécessité. Elle s’impose pareillement à tous les hommes. C’est fermer les yeux à l’évidence que reprocher au christianisme d’introduire la Croix dans la vie des hommes. Il n’a pas à l’y introduire : elle y est. Ce n’est pas le christianisme qui l’y a mise. Il l’y a trouvée, tout simplement. Mais ce que le christianisme seul pouvait apporter, c’est un sens donné à la Croix. L’Evangile, seul, ajoute à la nécessité de la Croix la promesse de la résurrection. Il fait plus : il enseigne à faire de la Croix la voie vers la résurrection. Il nous permet de regarder le mal en face, parce qu’il nous fait trouver dans le mal de quoi le surmonter.

Louis Bouyer, Initiation chrétienne, Paris, Plon, 1958, p. 196-197.

vendredi 30 juillet 2010

La prière de Jésus (9)

La prière de Jésus (9)

« Venez, mangez de mon pain, et buvez du vin que j’ai mêlé » (Proverbes 9, 5).Tu invites les hommes au festin céleste, que j’ai préparé hier par la célébration de la Pâque nouvelle. « Et Yahvé des armées fera pour tous les peuples, sur cette montagne, un festin de viandes grasses, un festin de vins de première cuvée, de viandes grasses et pleines de moelle, de vins bien dépouillés » (Isaïe 25, 6).
« Car à Yahvé appartient l’empire, il domine sur les nations. Devant lui se prosterneront ceux qui dorment dans la terre, devant lui s’inclineront ceux qui descendent vers la poussière, et mon âme vivra pour lui » (Psaume 22, 29-3). Elle vivra pour lui et par lui. « Tous les rois se prosterneront devant lui ; toutes les nations lui seront assujetties » (Psaume 72, 11). Oui, « ma postérité le servira ; (lire la suite) on parlera du Seigneur à la génération à venir » (Psaume 22, 31), « pour qu’en eût connaissance la génération suivante, celle des fils à naître, qui à leur tour les diraient à leurs enfants » (Psaume78, 6). « Mes paroles ne passeront pas » (Luc21, 33). « Encore jusqu’à la vieillesse et aux cheveux blancs, ô Dieu ne m’abandonne pas, tandis que je ferai connaître ta force à cette génération, et aux générations à venir ta puissance » (Psaume 71, 18). Oui, « on fera connaître sa justice au peuple qui va naître : « Voilà l’œuvre de Yahvé » (Psaume 22, 32). « J’ai mené à bonne fin l’œuvre que tu m’avais donné à faire » (Jean 17, 4). « Tout est accompli » (Jean 19, 30). « Il n’y aura plus deuil ni cri de souffrance ni douleur, car ce qui était auparavant a pris fin » (Apocalypse 21, 4). « Dieu lui-même sera parmi eux. Il essuiera toute larme de leurs yeux » (Apocalypse 21, 3-4).

(fin)

jeudi 29 juillet 2010

La prière de Jésus (8)

La prière de Jésus (8)

C’est moi, ne craignez pas ! « Grâce à toi, je te louerai dans la grande assemblée ; j’acquitterai mes vœux en présence de ceux qui te craignent » (Psaume 22, 26). Je dirai toujours ta louange, Père. « Personne ne connaît le Père, sauf le Fils et celui à qui le Fils veut bien le révéler » (Matthieu 11, 27). Je veux te faire connaître, que l’on sache qui tu es, que l’on te prie comme il convient : « Notre Père qui es dans les cieux, que ton nom soit sanctifié ! Que ton règne arrive ! Que ta volonté soit faite sur la terre comme elle l’est au ciel ! Donne-nous aujourd’hui le pain nécessaire à notre subsistance ! Et remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes (lire la suite) les aurons remises à ceux qui nous doivent ! Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Malin ! » (Matthieu 6, 9-13). « Humbles, voyez et réjouissez-vous ; vous qui cherchez Dieu, que votre cœur revive ! » (Psaume 69, 33).
« Les affligés mangerons et se rassasieront » (Psaume 22, 27). « Il arrivera, à la suite des jours, que la Montagne de la maison de Yahvé sera établie à la tête des montagnes et élevée au-dessus des collines. Et vers elle toutes les nations afflueront, et bien des peuples iront disant : « Venez et montons à la montagne de Yahvé, à la maison du Dieu de Jacob ; il nous enseignera ses voies, et nous marcherons dans ses sentiers. » Car de Sion sortira l’enseignement, et de Jérusalem la parole de Yahvé » (Isaïe 2, 2-3). Après la souffrance ce sera la joie, après la pénurie l’abondance. « Ceux qui cherchent Yahvé le loueront : que vos cœurs vivent à jamais ! » (Psaume 22, 27). « Car Dieu est le roi de toute la terre : chantez un cantique de choix. Dieu règne sur les nations, Dieu siège sur son trône saint » (Psaume 47, 8-9). « Que les cieux se réjouissent et que la terre soit dans l’allégresse ! Que la mer mugisse avec tout ce qu’elle contient ! Que la campagne s’égaie avec tout ce qu’elle renferme ! Que tous les arbres des forêts soient dans la joie devant Yahvé, car il vient pour juger la terre. Il jugera le monde avec justice, et les peuples selon sa fidélité » (Psaume 96, 11-13). Voici, je viens, ô Dieu, pour faire ta volonté » (Hébreux 10, 9) ; Je n’ai plus l’ombre d’une hésitation. Toute incertitude a disparu. « Toutes les extrémités de la terre se souviendront et se tourneront vers Yahvé ; toutes les familles des nations se prosterneront devant sa face » (Psaume 22, 28).

(à suivre…)

mercredi 28 juillet 2010

La prière de Jésus (7)

La prière de Jésus (7)

Regarde-les donc. C’est un tableau dérisoire. Moi sur la Croix, nu, face au monde, et eux « ils se partagent mes vêtements, ils tirent au sort ma tunique » (Psaume 22, 19), car « cette tunique était sans couture, d’une seule pièce de tissu du haut en bas » (Jean 19, 23). « Puis ils s’assirent et restèrent là à le garder » (Matthieu 27, 36). Comme si j’allais m’envoler ! Comme s’ils avaient quelque chose à craindre de moi ! « Mais toi, Yahvé, ne demeure pas éloigné ! Toi, ma force, viens en hâte à mon secours ! » (Psaume 22, 20). J’insiste : j’en ressens un cruel besoin. Que ce soit toi qui m’abandonnes m’est plus dur à supporter que la débandade de mes apôtres, de ceux que j’ai cru pouvoir appeler « mes amis », parce que je leur « ai fait connaître tout ce que j’ai appris de mon Père » (Jean 15, 15), de toi. En effet, « il n’y a pas de secrets entre amis » (J. Ratzinger/Benoît XVI, Homélie pour la messe avant le conclave, 18 avril 2005). (lire la suite)
« Délivre mon âme de l’épée, ma vie de la griffe du chien ! Sauve-moi de la gueule du lion, et dans ma misère des cornes du buffle » (Psaume 22, 21-22), « de peur que mon âme ne soit emportée comme par le lion, et mise en pièces, sans que personne ne puisse l’en arracher » (Psaume 7, 3). « Car sans raison ils ont tendu pour moi leur filet, sans raison ils ont creusé une fosse pour m’ôter la vie » (Psaume 35, 7). Quel malheur ai-je fait, La seule raison que je vois à cela, c’est la haine qu’ils ont pour toi et pour ton Oint. « C’est lui l’héritier ! Allons, tuons-le, et l’héritage sera à nous » (Marc 12, 7). Voilà leur raisonnement insensé. Non, la vraie raison, c’est que toi et moi et notre Esprit commun nous avons voulu en venir là. « Ne fallait-il pas que le Messie connût ces souffrances pour entrer dans sa gloire ? » (Luc 24, 26). Oui, « le Fils de l’homme devra beaucoup souffrir, être rejeté par les Anciens, les grands prêtres et les scribes, être mis à mort et ressusciter le troisième jour » (Luc 9, 22). Et ressusciter…
Par là-même « j’annoncerai ton nom à mes frères, au milieu de l’assemblée je te louerai : « Vous qui craignez Yahvé, louez-le ! Vous tous, postérité de Jacob, glorifiez-le ! Révérez-le, vous tous, postérité d’Israël ! Car il n’a pas méprisé ni pris en dégoût l’abjection du malheureux ; il n’a pas caché sa face devant lui ; mais quand il a crié vers lui, il a entendu » (Psaume 22, 23-25). Telle est la réalité. J’ai cru que tu m’avais abandonné. Mais tel n’était pas le cas. Il ne pouvait pas en être ainsi. Voici que tu fais à nouveau sentir ta présence ? Et moi, je m’empresse de proclamer ta miséricorde, d’annoncer à tous les hommes combien tu es proche du malheureux, qu’en dépit des apparences tu ne détournes pas ta face de lui, que tu es toujours rempli de compassion pour celui qui souffre et se retrouve dans la solitude. C’est une solitude apparente, une solitude bien accompagnée, car tu es présent, et tu finis par réchauffer le cœur. Il suffit de faire monter vers toi le cri de notre prière pour que tu fasses disparaître l’angoisse.

(à suivre…)

mardi 27 juillet 2010

La prière de Jésus (6)

La prière de Jésus (6)

Le prophète Isaïe n’a-t-il pas prophétisé de moi : « Il était méprisé et abandonné des hommes, homme de douleurs et familier de la souffrance, celui devant qui on se voile la face, méprisé et de qui nous ne faisions aucun cas. Vraiment c’était nos souffrances qu’il portait, et nos douleurs dont il s’était chargé ; et nous, nous le regardions comme quelqu’un de puni, frappé de Dieu et condamné aux épreuves. Mais lui, il a été transpercé pour nos infidélités, broyé pour nos fautes ; le châtiment qui nous rend le bonheur a pesé sur lui, et c’est par ses plaies que nous sommes guéris » (Isaïe 53, 3-5). C’est le plan que nous avons arrêté ensemble, Père saint. Je ne m’en plains pas. Mais c’est dur à porter. Je me tais devant l’injustice. (lire la suite) « Maltraité, il s’inclinait, et n’ouvrait pas la bouche ; tel l’agneau conduit à la boucherie, et la brebis muette devant les tondeurs, il n’ouvrait pas la bouche » (Isaïe 53, 7). Ton prophète ajoute encore qu’il « a plu à Yahvé de le broyer par la souffrance. S’il livre sa vie en sacrifice expiatoire, il verra une postérité, il prolongera ses jours, et le dessein de Yahvé, par lui, trouvera le succès » (Isaïe 53, 10). Est-ce possible ? Moi, tu le sais bien, « je fais toujours ce qui te plaît » (Jean 8, 29). Et puisque c’est cette Croix qui t’honore et te glorifie, je l’embrasse avec Amour bien volontiers. Mais mon corps regimbe : « Eli, Eli, lama sabacthani, c’est-à-dire : « Mon Dieu, mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Matthieu 27, 46). « Ma grâce te suffit » (2 Corinthiens 12, 9). Je n’en doute pas ; mais cependant je me trouve seul au milieu de cette meute hurlante. « Eux, ils m’observent, et ils se réjouissent en me voyant » (Psaume 22, 18). Je ne suis pas descendu dans le monde » pour être servi, mais pour servir et donner ma vie en rançon pour la multitude » (Matthieu 20, 28). Et c’est aujourd’hui que cela s’accomplit enfin. « J’ai ardemment désiré manger cette Pâque (…) avant de souffrir » (Luc 22, 15). C’est le sacrement du Salut qui s’opère. Et je te rends grâce, Père, car tu m’as exaucé, « tu m’exauces toujours » (Jean 11, 42), d’ailleurs. Mais il faut payer un bien « grand prix » (1 Corinthien 7, 23). En moi, « de la plante des pieds à la tête, il n’y a rien d’intact » (Isaïe 1, 6).
Tu m’envoies « publier une année de grâce du Seigneur, et un jour de vengeance pour notre Dieu ; consoler tous ceux qui ont pris le deuil » (Isaïe 61, 2). C’est aujourd’hui que cela s’accomplit. La vengeance de ma mort ouvre une année de grâce pour le monde. « Jusques à quand, Maître saint et véridique, attendras-tu pour faire justice et venger notre sang sur les habitants de la terre ? » (Apocalypse 6, 10).

(à suivre…)

lundi 26 juillet 2010

La prière de Jésus (5)

La prière de Jésus (5)

Bien sûr, je ne peux pas ne pas aimer. Et même aimer tous ceux qui, tels des chacals, hurlent à mes pieds. Et tous ceux qui au long des siècles brandiront leurs poings menaçants et profèreront toutes sortes d’injures. Je ne peux que les aimer. Tu sais bien que je ne sais rien faire d’autre. Et que c’est ce qui m’a conduit ici… Tu n’as pas oublié, j’espère, la demande que je t’ai adressée il y a un instant : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23, 34). J’espère que tu l’as entendue. Qu’à défaut de me soutenir, tu m’exauces dans les autres…
Vois à quel état ils m’ont réduit, « car des chiens m’environnent, une troupe de scélérats rôde autour de moi ; ils ont lié mes mains et mes pieds » (Psaume 22, 17). Regarde donc moi si tu peux me voir. (lire la suite) Je sais que tu me vois. Car « tout est nu et sans masque » à tes yeux (Hébreux 4, 13). C’est pour cela que je ne comprends pas que tu n’interviennes pas. « Père, si tu le veux bien, écarte de moi cette coupe ! Cependant que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne » (Luc 22, 42). Toi, mon Père, tu sais ce qui convient. « Quant à ce jour-là et à cette heure-là, nul n’en sait rien » hormis toi (Matthieu 24, 36). Je suis entre tes mains « comme l’argile entre les mains du potier » (Jérémie 18, 6).
Cela me fait tout drôle que tu ne t’occupes pas de moi, car tu affirmes : « Mon enfant, tu es constamment avec moi, et tout ce qui es tout ce qui est à moi est à toi » (Luc 15, 31). Mon Cœur a besoin de se sentir aimé. Cet amour ne va pas venir des hommes. En effet, le monde « moi, il m’a en haine, parce que je rends de lui ce témoignage que ses œuvres sont mauvaises » (Jean 7, 7). L’Amour ne peut venir que de toi. Eux ils me maltraitent. Toi, tu me traites avec bonté.
C’est habituel. C’est dans ta nature. Cela ne se remarque pas nécessairement. C’est tout un climat, tout un ensemble d’attentions qui rendent la vie aimable. Mais là, j’ai besoin de sentir tes prévenances paternelles. « Hâte-toi, Yahvé, de me secourir » (Psaume 70, 2).
« Je puis compter tous mes os » (Psaume 22, 18). Je suis devenu squelettique. Ce n’est pas grave en soi. Que m’importe ! Mais mes forces m’abandonnent, je sens la vie me délaisser peu à peu. Ne viendras-tu pas à mon secours ? « Maintenant, mon être est en émoi, et que dire ? Père, préserve-moi de cette heure. Mais c’est pour cela que je suis arrivé à cette heure »… (Jean 12, 27). Je ne sais plus où j’en suis. « Aussi bien le Fils de l’homme est venu, non pour être servi, mais pour servir et donner sa vie en rançon pour beaucoup » (Marc 10, 45). Oui, c’est bien cela.

(à suivre…)

dimanche 25 juillet 2010

La prière de Jésus (4)

La prière de Jésus (4)

Dans cette obscurité qui m’entoure de toute part – nous sommes pourtant à la sixième heure, ou je me trompe ! – je peux affirmer que « tu es mon espérance, mon Dieu, l’objet de ma confiance depuis ma jeunesse, ô Yahvé ! Sur toi je me suis appuyé dès ma naissance ; tu étais ma protection dès le sein maternel ; toujours tu as eu ma louange » (Psaume 71, 5-6). Tu ne peux pas le nier. Tu es forcé de le reconnaître. Alors il devrait y avoir un retour. « Moi, je t’ai glorifié sur la terre, en menant à bonne fin l’œuvre que tu m’avais donné à faire » (Jean 17, 4). Elle s’achève maintenant. Elle arrive à son terme. Tu m’as soutenu jusqu’ici. Nous avons toujours œuvré ensemble. Mais maintenant, (lire la suite) je dis moi aussi : « Où est mon Dieu ? » Où est-il passé, que je ne sente pas sa présence ? Que n’ai-je pas fait que j’aurais dû faire ? En quoi t’ai-je déplu ? « Maintenant, ô Père, à toi de me glorifier auprès de toi, en me donnant cette gloire que j’avais auprès de toi avant que le monde ne fût (Jean 17, 5). « Ne t’éloigne pas de moi, car l’angoisse me tient ; approche-toi, car personne ne m’aide » (Psaume 22, 12). Ce n’est vraiment pas le moment de m’abandonner, alors que tous les hommes me délaissent, ou presque. Car ma Mère est là, debout. Eux, je n’escomptais pas grand-chose de bon de leur part. Mais toi, mon Dieu, avec qui je ne fais qu’un… Approche-toi de moi ! Reviens, car je suis en plein désarroi. Mon Cœur est baigné de larmes. Cette Croix est trop lourde à porter… Je n’en puis plus. Je suis à bout. « Viens, Seigneur » (Apocalypse 22, 20).
« Autour de moi sont de nombreux taureaux, les buffles de Basan m’environnent. Ils ouvrent contre moi leur gueule, comme un lion qui déchire et rugit » (Psaume 22, 13-14). Et il y a cette autre bête féroce, celui qui empeste l’atmosphère, qui « rôde comme un lion rugissant » (1 Pierre 5, 8), et qui croit pouvoir faire une bouchée de moi. Je sens son souffle fétide. Ses coups de griffe frôlent mon visage. Il affiche un air triomphant. Que puis-je lui opposer, sinon ma confiance en toi ? Moi, j’ai accepté de m’abaisser, « me faisant obéissant jusqu’à la mort, et à la mort sur une Croix » (Philippiens 2, 8). La mort sur une Croix… Et voici que « je suis comme de l’eau qui s’écoule, et tous mes os sont disjoints ; mon cœur est comme de la cire, il se fond au milieu de mes entrailles. Ma gorge est devenue sèche comme un tesson d’argile, et ma langue s’attache à mon palais ; tu m’as mené dans la poussière de la mort » (Psaume 22, 15-16).

(à suivre…)

samedi 24 juillet 2010

La prière de Jésus (3)

La prière de Jésus (3)

Vois-les ! Ils me rejettent tous. Combien y en a-t-il parmi eux que j’ai guéris de leurs infirmités ? Combien qui m’ont suivi avec enthousiasme ? Combien qui m’ont acclamé à tout rompre en s’égosillant à crier « béni soit celui qui vient, le roi, au nom du Seigneur ! » (Luc 19, 38) ? Je suis nu comme un ver. Il ne me reste plus rien, si ce n’est ce souffle qui me retient encore à ce monde. Ne t’ai-je plus, toi, ô mon Père ? Est-il possible que tu sois sourd à ma prière ? Se peut-il que tu restes insensible aux souffrances que j’endure ? Serait-ce que tu n’agrées pas le Sacrifice que je t’offre ? C’est pourtant pour cela que tu m’as envoyé dans le monde. (lire la suite) « Je suis venu pour qu’on ait la vie et qu’on l’ait surabondante » (Jean 10, 10). Et tu sais bien que cela passe par le don de ma Vie. C’est ce dont nous avons convenu. Alors, je ne comprends pas. Pourquoi ce silence de ta part ? « Tous ceux qui me voient se moquent de moi ; ils agitent les lèvres, ils branlent la tête : « Il s’en remet à Yahvé : qu’il le sauve, qu’il le délivre, puisqu’il l’aime » ! » (Psaume 22, 8-9). N’est-ce pas logique ? J’en suis réduit là. A les entendre ajouter blasphème sur blasphème, à se moquer de toi.
Et cela te laisserait indifférent ? Je ne comprends pas. Bien sûr que je m’en remets à toi. Vers qui d’autre aller ? Que peuvent m’apporter les hommes, si ce n’est déceptions et tribulations ? Mais j’attendais de toi la consolation, et elle n’est pas au rendez-vous ! Un mot, rien qu’un mot. Une parole d’encouragement. Une confirmation comme quoi je fais bien ce qui te plaît (Jean 8, 29). Un signe quelconque. Rien. Je ne vois rien venir. Et ils se moquent de moi parce que je t’aime et qu’il semble que tu ne m’aimes plus. Vas-tu laisser triompher leur impudence ?
« Où est ton Dieu ? » Question lancinante. Elle me brise le Cœur. Où est le jour où, déchirant les nues, tu as déclaré ouvertement : « Tu es mon Fils bien-aimé : tu as toute ma faveur » (Luc 3, 22) ? Où est le jour où tu as déclaré à tes disciples préférés : « Celui-ci est mon Fils : écoutez-le » (Luc 9, 35) ? Qui dont m’écoute maintenant ? Qui donc fait attention à moi, si ce n’est pour me tourner en dérision, non pour me venir en aide ? Je n’entends plus ta voix… Or, « c’est toi qui m’as tiré du sein maternel, qui m’as mis en sûreté sur la poitrine de ma mère. Sur tes genoux j’ai été dès ma naissance ; depuis le sein de ma mère, c’est toi qui es mon Dieu » (Psaume 22, 10-11).

(à suivre…)

vendredi 23 juillet 2010

La prière de Jésus (2)

La prière de Jésus (2)

Tu me laisses seul. « Pourtant tu résides dans le sanctuaire, ô gloire d’Israël » (Psaume 22, 4). Et moi, je n’ai pas déserté ton sanctuaire. « Tous les jours j’étais près de vous dans le Temple, où j’enseignais » (Marc 14,49). J’ai essayé de faire comprendre à ceux que tu m’as donné pour parents sur terre, qu’il me fallait « être dans la maison de mon Père » (Luc 2, 49), mais tout bons et saints qu’ils fussent, ils « ne comprirent pas la parole » que je leur dis (Luc 2, 50). C’était le zèle pour ta maison qui me dévorait déjà (Psaume 69, 10). (lire la suite)
Et lorsque j’ai chassé les vendeurs, les changeurs et les marchands du Temple, c’est parce qu’ils avaient fait de notre maison de prière « une caverne de brigands » (Luc 19, 46). C’est en ce lieu saint que « en toi se sont confiés nos pères ; ils se sont confiés, et tu les as délivrés » (Psaume 22, 5). Ils s’étaient mis pourtant dans de mauvaises passes à de nombreuses reprises. Il a fallu que tes saints serviteurs bataillent avec toi, argumentent et insistent avec véhémence pour que tu te laisses convaincre de leur pardonner, de les délivrer du mal qui, autrement, se serait abattu sur eux. Et moi, vas-tu me laisser seul, désemparé ? N’y aura-t-il personne pour prendre ma défense ? Hélas ! Nul ne s’intéresse à moi. L’on dirait que tous se sont ligués contre moi. Et comme si cela ne suffisait pas, pour faire bonne mesure, tu te retires, et me laisses seul avec moi-même, avec mon angoisse : « Mon âme est triste à en mourir » (Matthieu 26, 38).
Eux, « ils ont crié vers toi, et ils ont été sauvés ; ils se sont confiés en toi, et ils n’ont pas été déçus » (Psaume 22, 6). Nous avions affirmé et garanti : « Non, aucun de ceux qui espèrent en toi ne sera confondu ; ceux-là seront confondus qui sont infidèles sans cause » (Psaume 25, 3). Tu leur as remis leur dette. Tu as fait table rase du passé. Tu t’es montré un Père pour eux. « Pour moi, je ne suis qu’un ver, et non un homme, l’opprobre des hommes et le rebut du peuple » (Psaume 22, 7). Vois à quelle extrémité je suis réduit. De quoi ai-je l’air, sur cette Croix, entouré de deux brigands ? Ah ! Pilate a eu beau faire clouer un écriteau avec l’inscription « Jésus de Nazareth Roi des Juifs » (Jean 19, 19) et prendre la peine de le faire rédiger « en hébreu, en latin et en grec » (Jean 19, 20), cela ne change rien à ma situation, si ce n’est que les sarcasmes redoublent : « Ils en a sauvés d’autres ; ne peut-il pas se sauver lui-même ? Il est roi d’Israël : qu’il descende maintenant de la Croix, et nous croirons en lui » (Matthieu 27, 42-43). Ils se rappellent que je suis ton Fils. Et toi, tu sembles l’oublier. Tu ne me réponds pas. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Psaume 22, 2).

(à suivre…)

jeudi 22 juillet 2010

La prière de Jésus (1)

La prière de Jésus (1)

Cloué par Amour sur la Croix, Jésus s’exclame : « Eli, Eli, lama sabachtani, c’est-à-dire : « Mon Dieu, mon Dieu ! Pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Matthieu 27, 46). C’est un cri déchirant du Serviteur souffrant, du Juste, condamné sans motif de condamnation (Jean 19, 5). C’est le psaume que Dieu entonne sur l’air de la « Biche de l’aurore » (Psaume 22, 1). Nous ne le connaissons pas. Mais nous avons bien présent à l’esprit ce désespoir du Seigneur, manifesté à la neuvième heure (Marc 15, 34). Dans ce moment de déréliction, Dieu apparaît « loin de mes appels, des paroles de ma plainte » (Psaume 22, 2). Je suis le Juste et je souffre pour toi, je t’offre la réparation équitable pour toutes les offenses des hommes, (lire la suite)
(Psaume 22) pouvait dire Jésus à son Père ? Vois tout ce que j’endure pour toi. N’est-ce pas suffisant, qu’il faille encore que tu y ajoutes le poids de cet abandon que je ressens maintenant ? Non, tu ne me laisses pas seul. Ce n’est pas possible. Nous ne faisons qu’un, toi, Père, en moi, et moi en toi (Jean 17, 21). Et pourtant voici que j’éprouve un délaissement total. « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi m’as-tu abandonné ? » (Psaume 22, 2). « Cependant que ce ne soit pas ma volonté qui se fasse, mais la tienne » (Luc 22, 42).
Mais pourquoi rester sourd à ma prière ? Ce n’est pas pour moi que je meurs. Quel avantage pourrais-je en escompter ? Cette mort qui s’approche ne me vaut que des opprobres. Que de souffrances, Père ! Si j’avais su tout ce que je devrais souffrir… Ce n’est pas pour moi, mais pour les hommes que je t’offre ma vie, eux qui sont tes enfants. Je la donne en rançon pour la multitude. Tu le sais tout aussi bien que moi. Alors ? Sera-t-il dit que tu ne m’exauces pas ? Que tu n’apprécies pas cette offrande, ma libation versée pour le salut du monde ? Sera-t-il dit que tu refuses de pardonner ? Ce me serait terriblement dur à accepter. Car nous ne sommes pas comme cela, nous trois de la Trinité, ou j’y perds mon latin. Je t’ai supplié : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23, 34). Et tu ne t’empresserais pas à accéder à ma demande ? « Mon Dieu, je crie pendant le jour, et tu ne réponds pas ; la nuit, et tu ne fais pas attention à moi » (Psaume 22, 3).
Et maintenant, en haut de la Croix, d’où je vois toute l’humanité rassemblée, tant d’âmes avides du salut, vais-je devoir les laisser repartir les mains vides ? Qu’en dis-tu, Père ? Tu ne me réponds pas ? Je n’existerais donc plus pour toi ? En quoi t’ai-je contristé ? Nul ne peut me convaincre de péché (Jean 8, 46), tu le sais bien. Tout ce qui est juste à tes yeux, je l’ai fait (Jérémie 34, 15). J’ai observé tes commandements depuis ma jeunesse (Luc 18, 21). « Si j’ai mal parlé, fais la preuve que c’est mal » (Jean 18, 23).

(à suivre…)

mercredi 21 juillet 2010

Le feu de Dieu (2)

Le feu de Dieu (2)

Ce qu’il y a de formidable, c’est que notre pauvre petite collaboration aux plans de Dieu permet véritablement au Seigneur de s’implanter et de triompher dans les cœurs. Les résultats dépassent tout ce que nous pouvons imaginer, car ils sont du domaine du surnaturel. Ce sont ceux que Dieu veut produire en se servant de nous. « Par nos œuvres de service, nous pouvons préparer au Seigneur un triomphe plus grand que celui de son entrée à Jérusalem... Car la scène de Judas ne se reproduira pas, pas plus que celle du Jardin des Oliviers, ni celle de cette nuit obscure... Nous parviendrons à faire brûler le monde dans les flammes du feu qu'Il est venu apporter sur la terre!... Et la lumière de la Vérité — notre Jésus lui-même — illuminera les intelligences dans un jour sans fin » (saint Josémaria, Forge, n° 947). Tel est le panorama (lire la suite) – réaliste pour qui a un minimum de vision surnaturelle – qui s’offre à nos yeux. Réaliste aussi parce qu’il est avalisé par l’expérience de toutes les générations de chrétiens qui nous ont précédés, et qui ont su dépasser mes difficultés objectives d’un monde toujours ouvertement en guerre contre Dieu.
Chaque jour notre prière nous permet de nous fortifier dans la foi et de nous rapprocher de notre Dieu, afin d’identifier notre volonté à sa Volonté. Nous devons nous éclairer et nous réchauffer au feu qu’il propage sur terre. Nous voulons participer à l’entreprise apostolique, qui est une aventure divine. « Ignem veni mittere in terram, et quid volo nisi ut accendatur ? Je suis venu apporter le feu sur la terre, et comme je voudrais que déjà il fût allumé ! (Luc 12, 49). Nous nous sommes rapprochés un peu de ce feu de l’amour divin; que son impulsion ébranle nos vies, nous pousse à transmettre le feu divin d’une extrémité à l’autre du monde, pour le répandre chez ceux qui nous entourent : afin qu’eux aussi découvrent la paix du Christ et, avec elle, le bonheur. Un chrétien qui vit uni au Cœur de Jésus, ne peut avoir d’autre but que la paix dans la société, la paix dans l'Église, la paix dans son âme, la paix de Dieu, qui sera consommée lorsque son Règne viendra jusqu’à nous » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n°170). Ce à quoi contribue la très Sainte vierge, Reine du monde, Reine des apôtres, corédemptrice de l’humanité, médiatrice de toutes les grâces, notre Mère si douce et si tendrement aimée.
(fin).

mardi 20 juillet 2010

Le feu de Dieu (1)

Le feu de Dieu (1)

« Avec le merveilleux naturel de ce qui vient de Dieu, l’âme contemplative déborde du désir de faire de l’apostolat : mon cœur brûlait en moi, à force d’y songer le feu flamba (Psaume 38, 4). De quel feu s’agit-il, si ce n’est de celui dont parle le Christ : je suis venu apporter le feu sur la terre et comme je voudrais qu’il brûle ! (Luc 12, 49). Feu d’apostolat qui se fortifie dans la prière: il n’y a pas de meilleur moyen pour développer, d’un bout à l’autre du monde, cette bataille de paix à laquelle chaque chrétien est appelé à participer: compléter ce qui manque aux souffrances du Christ (Col 1, 24) » (saint Josémaria, Quand le Christ passe, n° 120). Prière et apostolat sont d’ailleurs deux facettes d’une même activité, consistant à (lire la suite) se sanctifier pour sanctifier le monde et nos semblables, pour nous efforcer d’avancer tous ensemble à la rencontre de notre Dieu. Le cri du Seigneur ne peut résonner dans le désert, mais il doit rencontrer un écho dans notre âme. Si nous l’écoutons attentivement, il suscite en nous le désir de répondre, de le reprendre à notre compte, de nous mettre au service de ce plan éminemment apostolique du Seigneur. Toute sa vie, tout son être, est tendu vers cet accomplissement de sa mission. Le feu de son Amour est appelé à brûler dans les cœurs, à se répandre dans le monde. Il faut qu’il se communique de proche en proche. Et comment cela se fera-t-il si ce n’est parce que chacun de nous le relaye ? « Tu écrivais ces lignes : « Ô mon Roi, je t'entends t'écrier d'une voix forte, qui résonne encore à mes oreilles : « ignem veni mittere in terram, et quid volo nisi ut accendatur ? » — Je suis venu apporter le feu sur la terre, et que désiré-je, sinon qu'il brûle ? » Et tu ajoutais : « Seigneur, je Te réponds avec mes sens et mes facultés, de tout mon être : « ecce ego quia vocasti me ! » — me voici parce que Tu m'as appelé ! — Ainsi doit être ta réponse dans la réalité de tous les jours » (saint Josémaria, Forge, n°52).
Une chose est de manifester notre disponibilité, notre volonté d’œuvrer dans la vigne du Seigneur, une autre est d’y arriver, de réussir à faire nôtres les sentiments du Christ et de travailler à ce que le message de l’Evangile gagne du terrain. Nous trouvons des obstacles en nous-mêmes. Ce sont les premiers et les plus importants. Car si nous arrivons à supprimer ces obstacles intérieurs, nous nous jouerons facilement des autres. Ils ne nous ralentiront pas. Mais nous saurons passer par-dessus ou les contourner, avec l’aide de la grâce de Dieu. C’est pourquoi nous disons : « Ô Jésus..., fortifie nos âmes ! Aplanis le chemin ! Et surtout, enivre-nous d'Amour : fais ainsi de nous des foyers brûlants, qui enflamment la terre du feu divin que Tu es venu nous apporter » (Ibid., n° 31).

(à suivre…)

lundi 19 juillet 2010

Arrêts sur christianisme (58)

Arrêts sur christianisme (58)

Si l’incarnation, comprise au sens fort, et la doctrine de la Trinité constituent ce qui est tout à fait propre au christianisme, ce qui le distingue des autres religions, nous devons reconnaître que cette « spécificité » fut alors et pour la première fois très fortement établie et placée au cœur même de l’édifice de la foi. Tout le reste découle de là, de façon cohérente, à commencer par la vigoureuse affirmation du titre de Théotokos reconnu à Marie : elle est véritablement Mère de dieu, car la personne née d’elle es tunique et divine.
Telle est la suprême grandeur du christianisme : être religion de la grâce, de la descente de Dieu vers l’homme plutôt que de la montée de l’homme vers Dieu. Dans cette perspective, le Christ apparaît comme le don de Dieu à accueillir avec émerveillement et gratitude, plutôt que comme le modèle à imiter dans la vie. Il est l’Emmanuel : le dieu avec-nous.

R. Cantalamessa, Le Christ de la Transfiguration, Saint-Maurice (Suisse), Editions Saint-Augustin, 2000, p. 98.

dimanche 18 juillet 2010

Aller à la maison de Dieu (4)

Aller à la maison de Dieu (4)

« A cause de mes frères et de mes amis je dirai : Paix sur toi ! » (Psaume 122, 8). Parce que je veux le bien de tous, que tous découvrent le vrai Dieu, non seulement Jésus-Christ, mais aussi avec lui le Père et le Saint-Esprit. Comme je voudrais que tous soient mes amis, parce qu’ils seraient d’abord devenus les amis de Dieu ! Nous voulons la paix pour tous. La paix entre les nations, la paix entre les groupes humains, si difficile à obtenir, à ce qu’il semble. Mais ce n’est guère étonnant. Car, pour y parvenir, le préalable est la paix avec Dieu. Et comme peu s’en soucient, les conséquences sont là. Pourtant Jésus nous a donné sa paix, il nous l’a confiée. Il a précisé : (lire la suite) « Que vos cœurs ne soient pris ni par l’émoi ni par la frayeur » (Jean 14, 27). Il ne s’agit pas d’une paix factice, fragile, que les hommes peuvent facilement remettre en cause. C’est la Paix de Celui qui est installé à demeure dans le Bien, et qui veut notre bien, notre bonheur.
« A cause de la maison de Yahvé, notre Dieu, je demanderai le bonheur pour toi » (Psaume 122, 9). En raison de l’Eglise, de la sainteté de l’Epouse immaculée du Christ, je demande le bonheur pour tous les hommes, ce bonheur qui ne peut exister qu’à partir de l’union avec Dieu. Seigneur, change notre cœur. Convertis-nous. Car sans toi, hors de toi, nous courons à notre ruine et à l’effondrement. Fais de nous des artisans de paix, de ces gens qui, du coup, sont appelés à plein titre fils de Dieu (Matthieu 5, 9). Tu as indiqué, Seigneur, le lien entre la paix et la filiation divine. Les hommes de Dieu sont des hommes de paix. Voilà qui est dit. Nous apprenons à vivre en bonne entente avec tous, plutôt que de nous quereller avec celui qui nous frappe sur la joue droite (Matthieu 5, 39). La paix est à ce prix. Il faut savoir encaisser des coups avec humilité, ne pas rétorquer en obéissant à la loi du talion. Le Christ a mené la Loi à sa perfection, il l’a sublimée en l’ouvrant au pardon des offenses, sur la patience, sur l’amour de bienveillance pour autrui.
Donne-leur la paix, Seigneur, afin qu’ils puissent aussi être comptés au nombre de tes enfants et éprouver la saine fierté d’être enfants de Dieu ! Nul ne peut ressentir d’aspiration plus noble que celle-là. Enfant de Dieu ! Ce n’est pas rien ! Et si nous en prenons davantage conscience, les conflits, qui ont leur origine dans l’orgueil, disparaissent comme par enchantement. Nous n’en voulons à personne et nous voulons le bien de chaque personne.

(fin)

samedi 17 juillet 2010

Aller à la maison de Dieu (3)

Aller à la maison de Dieu (3)

« Que la paix règne dans tes murs, la sécurité dans tes palais ! » (Psaume 122, 7). Le royaume que le Christ est venu instaurer sur terre aura un prolongement surnaturel au paradis. C’est un royaume de paix. Le Christ lui-même s’est présenté comme le « Prince de la Paix » (Isaïe 9, 6). Au moment de remonter auprès de son Père, il laisse un testament pacifique, consistant à nous aimer les uns les autres « comme je vous ai aimés. C’est à cela que tous reconnaîtront que vous êtes mes disciples : si vous avez de l’amour les uns pour les autres » (Jean 13, 34-35). Il ajoute : « Je vous laisse la paix ; c’est ma paix à moi que je vous donne. Je ne vous la donne pas comme la donne le monde » (Jean 14, 27). Il annonce des tribulations et en même temps sa paix : (lire la suite) « Cela, je vous l’ai dit pour que vous ayez la paix en moi. Dans le monde, vous aurez la tribulation, mais confiance ! Moi, je suis vainqueur du monde » (Jean 16, 33). « Je vous ai dit ces choses pour que vous ayez en vous ma propre joie et que votre joie soit complète » (Jean 15, 11). « Que vos cœurs ne soient pas en émoi ! Ayez foi en Dieu ; ayez aussi foi en moi » (Jean 14, 1). Celui qui est uni au Christ, qui s’efforce de rester avec ce Dieu qui est proche de nous, comme Benoît XVI ne cesse de le répéter, conserve cette paix dans son âme ; car les événements, les difficultés de la vie ne l’atteignent pas en profondeur. Il n’y est pas insensible. Ayant un cœur plus fin, plus délicat que d’autres, il y est même plus sensible. Mais en transparence il voit la Croix libératrice. Il voit le Christ les bras grand ouverts qui l’appelle. Il voit les foules assoiffées de Vérité qui sont comme hébétées devant l’Homme-Dieu crucifié et ne savent que croire… Il voudrait leur crier le message de l’Evangile. Que le Seigneur est mort pour eux. Par Amour pour eux. Qu’ils se laissent attirer par lui, saisir par cet Amour. Que l’enjeu en vaut la chandelle. Que la vraie paix n’existe qu’au contact du Christ, dans la lutte menée avec son assistance contre « le vieil homme » (Ephésiens 4, 22), pour nous rajeunir spirituellement, pour renaître et « revêtir l’homme nouveau » (Ephésiens 4, 24). Ce à quoi les hommes aspirent et qui leur est impossible – le fameux bain de jouvence – pour le corps, est à portée de la main pour l’âme. Nous pouvons rajeunir ! Redevenir enfants, des enfants de Dieu, par le bain régénérateur du baptême, et rester des enfants à l’aide de la sainte grâce. « Que la paix règne dans tes murs » (Paume 122, 7). En chacun de nous, dans notre âme que protègent les murs de la grâce précisément, de la conscience aiguë d’être un enfant de Dieu, et Dieu notre Père Tout-Puissant. Nul n’est plus prévenant que lui. Nul n’est plus sage que lui.

(à suivre…)

vendredi 16 juillet 2010

Aller à la maison de Dieu (2)

Aller à la maison de Dieu (2)

« Trois fois par an, tout ton peuple masculin paraîtra devant Yahvé, votre Dieu, dans le lieu qu’il aura choisi (…) ; il ne paraîtra pas devant Dieu les mains vides, mais chacun avec ce qu’il peut donner, selon les bénédictions que Yahvé, ton Dieu, t’aura accordées » (Deutéronome 16, 16-17). « C’est là que montent les tribus, les tribus de Yahvé, selon la loi donnée à Israël, afin de louer le nom de Yahvé » (Psaume 122, 4). Au précepte ancien a succédé le précepte nouveau. Nous montons à la Jérusalem nouvelle qu’est l’église où le Seigneur n’est pas de façon figurative, mais réellement et personnellement présent dans la très Sainte Eucharistie. Nous y venons, non pas trois fois l’an, mais au moins les dimanches et jours de fête de précepte.. (lire la suite) Nous y allons avec empressement, car c’est la rencontre vivifiante avec Dieu, sans laquelle nous ne pourrions pas tenir dans le monde hostile et matérialiste. Les martyrs d’Abitène, plusieurs fois mentionnés par le pape Benoît XVI, disaient à l’autorité qui voulait leur interdire de se réunir le dimanche : Sine dominico non possumus ! Sans nous réunir le jour du Seigneur, nous ne pouvons pas vivre !
Construisant le Temple, Salomon « fit le portique du trône, où il rendait la justice, le portique du jugement, et il le fit de cèdre depuis le sol jusqu’au plafond » (1 Rois 7, 7). C’est à Jérusalem, en effet, qu’ont « été établis les sièges pour le jugement, les sièges de la maison de David » (Psaume 122, 5). C’est dans la Jérusalem céleste que les Douze siègent sur douze trônes pour juger les douze tribus d’Israël (Luc 22, 30), à l’heure du jugement universel, aux derniers jours de ce monde qui passe (1 Corinthiens 7, 31).
Nous souhaitons la paix pour la nouvelle Jérusalem qu’est l’Eglise catholique, une sainte et apostolique, l’Eglise fondée par Jésus-Christ, contre laquelle « les portes de l’Hadès ne l’emporteront pas » (Matthieu 16, 18). C’est un navire qui ne sombre pas, car le Christ est le pilote qui le dirige à travers les écueils du monde. Les hommes peuvent armer des escadres pour l’attaquer et l’envoyer par le fond, c’est courir à leur propre perte. Tous passent. Tous quittent le monde. Mais l’Eglise demeure, inébranlable ; toujours fidèle à elle-même et au Christ, jusqu’à la fin des temps. Et plus encore, pour l’éternité, car elle se poursuit au ciel, état dans lequel elle se trouve déjà dans ses fils qui ont été sanctifiés. Que les hommes n’apprennent pas les leçons de l’histoire, qu’importe ! Elle leur en administrera de nouvelles. Qui montrent bien que l’Eglise n’est pas une institution humaine, n’est donc pas soumise aux aléas, au cours des événements. Mais qu’elle avance, toujours tendue vers son objectif, non seulement qu’elle avance, mais qu’elle progresse, qu’elle ne cesse de s’étendre au monde entier, jusqu’à ce que le commandement missionnaire soit pleinement accompli : « Allez donc ! De toutes les nations faites des disciples » (Matthieu 28, 19).

(à suivre…)

jeudi 15 juillet 2010

Aller à la maison de Dieu (1)

Aller à la maison de Dieu (1)

(Psaume 122)

Cantique des montées. C’est soit un des chants de pèlerinage qu’entonnaient les pèlerins en marche vers Jérusalem, soit un cantique liturgique que les lévites chantaient en montant les marches conduisant au parvis d’Israël, dans le Temple. Quoi qu’il en soit, « j’ai été dans la joie quand on m’a dit : « Allons à la maison de Yahvé » ! » (Psaume 122, 1), car il ne peut rien être envisagé de plus doux pour le cœur que d’habiter avec le Seigneur, que de résider dans ses parvis, de partager le lieu où il habite parmi nous, désormais le lieu sacré qu’est l’église, le tabernacle, véritable « prison d’amour » (saint Josémaria, Forge, n° 827). « Je me rappelle – et mon cœur se fond en moi – quand, (lire la suite) m’avançant avec la foule, je les conduisais vers la maison de Dieu, aux accents des acclamations et des hymnes d’action de grâces, dans un cortège de fête » (Psaume 42, 5). Des acclamations semblables à celles que prodiguait la foule accompagnant Jésus pour son entrée triomphale dans la Cité sainte. Mais lui, il savait à quoi s’en tenir.
« Voilà que nos pieds s’arrêtent à tes portes, Jérusalem ! » (Psaume 122, 2). Aux portes de cette ville impressionnante, qui est vraiment la demeure de Dieu au milieu de son peuple, le lieu où le Tout-Puissant se manifeste au grand prêtre dans le Saint des saints, le lieu où peuvent se produire les purifications légales, le lieu des sacrifices sacrés et des offrandes saintes. Ah ! vraiment, « j’ai été dans la joie quand on m’a dit : « Allons à la maison de Yahvé » ! » (Psaume 122, 1). Qui ne serait pas profondément ému de pouvoir retrouver son Dieu, d’aller le retrouver chez lui ? Nous aussi, nous ressentons le besoin « d’être chez mon Père » (Luc 2, 49). Et nous, nous revenons devant le tabernacle, nous y revenons pour adorer notre Dieu et pour lui ouvrir notre cœur. Nous avons tant de choses à nous dire, chacun les siennes, qui concernent son existence. Le sujet de ma prière, c’est ma vie. « Jérusalem, tu es bâtie comme une ville où tout se tient ensemble » (Psaume 122, 3). Tout se tient dans notre religion admirable, car les vertus sont unies les unes aux autres, tout est uni par un sens profond de la filiation divine, tout est un car tout procède de Dieu qui est Un par essence, par nature. Si l’on touche à un aspect de notre foi, l’on met le reste en péril. Nous devons préserver coûte que coûte l’unité de foi, de sacrements et de gouvernement. C’est dans le respect de cette intégrité que se trouve notre joie, car alors nous sommes avec le vrai Dieu, non avec la divinité que les hommes se construisent à leur convenance. C’est-à-dire pour pouvoir pécher impunément, du moins c’est ce qu’ils imaginent.

(à suivre…)

mercredi 14 juillet 2010

La pseudo-démocratie

La pseudo-démocratie

Le droit à la vie originel et inaliénable est discuté ou dénié en se fondant sur un vote parlementaire ou sur la volonté d'une partie — qui peut même être la majorité — de la population. C'est le résultat néfaste d'un relativisme qui règne sans rencontrer d'opposition: le « droit » cesse d'en être un parce qu'il n'est plus fermement fondé sur la dignité inviolable de la personne mais qu'on le fait dépendre de la volonté du plus fort. Ainsi la démocratie, en dépit de ses principes, s'achemine vers un totalitarisme caractérisé. L'État n'est plus la « maison commune » où tous peuvent vivre selon les principes de l'égalité fondamentale, (lire la suite) mais il se transforme en État tyran qui prétend pouvoir disposer de la vie des plus faibles et des êtres sans défense, depuis l'enfant non encore né jusqu'au vieillard, au nom d'une utilité publique qui n'est rien d'autre, en réalité, que l'intérêt de quelques-uns.
Tout semble se passer dans le plus ferme respect de la légalité, au moins lorsque les lois qui permettent l'avortement ou l'euthanasie sont votées selon les règles prétendument démocratiques. En réalité, nous ne sommes qu'en face d'une tragique apparence de légalité et l'idéal démocratique, qui n'est tel que s'il reconnaît et protège la dignité de toute personne humaine, est trahi dans ses fondements mêmes : « Comment peut-on parler encore de la dignité de toute personne humaine lorsqu'on se permet de tuer les plus faibles et les plus innocentes? Au nom de quelle justice pratique-t-on la plus injuste des discriminations entre les personnes en déclarant que certaines d'entre elles sont dignes d'être défendues tandis qu'à d'autres est déniée cette dignité? » Quand on constate de telles manières de faire, s'amorcent déjà les processus qui conduisent à la dissolution d'une convivialité humaine authentique et à la désagrégation de la réalité même de l'État.
Revendiquer le droit à l'avortement, à l'infanticide, à l'euthanasie, et le reconnaître légalement, cela revient à attribuer à la liberté humaine un sens pervers et injuste, celui d'un pouvoir absolu sur les autres et contre les autres. Mais c'est la mort de la vraie liberté: « En vérité, en vérité, je vous le dis, quiconque commet le péché est esclave du péché » (Jean 8, 34).

Jean-Paul II, encyclique Evangelium vitae, « l’Evangile de la vie », 25 mars 1995, n°20.

mardi 13 juillet 2010

Souffrir et aimer

Souffrir et aimer

« Je comprends que, par Amour, tu désires souffrir avec le Christ » (saint Josémaria, Forge, n° 758). Seul l’Amour, en effet, peut parvenir à la folie de la souffrance, de la Croix, que le monde ne comprend pas, « scandale pour les Juifs, folie pour les païens » (1 Corinthiens 1, 23). Mais si nous aimons quelqu’un que nous voyons souffrir, et qu’en outre il nous est possible d’alléger sa souffrance, pouvons-nous rester insensibles et ne rien faire ? Si de plus cette personne souffre pour venir en aide à d’autres, pour les aider à se titrer d’affaire, pour alléger leurs propres douleurs, n’avons-nous pas là un motif supplémentaire de participer joyeusement à cette douleur ? Celle qu’un père ou une mère de famille supporte allègrement pour ses enfants. (lire la suite)
Si nous pouvons éviter à l’autre de recevoir des coups, en les détournant sur nous, allons-nous hésiter à le faire ? Si ces coups étaient destinés à notre père ou à notre mère, nous tenterions sans doute l’impossible pour les leur épargner, et serions prêts à consentir tous les sacrifices nécessaires pour leur éviter ce qui nous atteindrait aussi dans notre être. Mais il s’agit de Jésus. Il s’agit de notre Sauveur, qui vient nous racheter de nos péchés. Il s’agit de Celui qui aime les siens jusqu’au bout (Jean 13, 1), prêt à tout endurer. Et nous pouvons, oui il est en notre pouvoir d’alléger le fardeau qui pèse sur ses épaules. « Je comprends que, par Amour, tu désires souffrir avec le Christ : que tu veuilles interposer tes épaules entre lui et les bourreaux qui le fouettent ; que tu offres ta tête, à la place de la sienne, pour recevoir la couronne d'épines ; et tes pieds et tes mains pour les clous... » (Ibid.). Nous substituer à Jésus en quelque sorte. Or, « pour nous c’est justice, car nous recevons ce que nos actes nous ont valu » (Luc 23, 41). Car c’est précisément pour nos péchés que Jésus se trouve malmené méchamment puis cloué sur la Croix. C’était nos péchés qu’il portait. La logique voudrait que le châtiment retombe sur nous puisque nous sommes les coupables, les vrais coupables. « Lui n’a rien fait de répréhensible » (Luc 23, 41). Au contraire, les foules s’extasiaient en reconnaissant qu’il « a tout bienfait » (Marc 7, 37).
Notre courage ne va peut-être pas jusque là. Nous avons sans doute peur de prendre une volée de bois vert, de souffrir dans notre chair. Alors nous pouvons adopter une situation moins exigeante, qui traduit quand même notre amour de Dieu. Je comprends « pour le moins, que tu veuilles accompagner notre Mère Sainte Marie, au Calvaire, et t'accuser toi-même de déicide pour tes péchés.. » (Ibid.).Car jésus est vrai Homme, mais d’abord et avant tout vrai Dieu. Et le châtiment qui le frappe a été décidé par l’ensemble des pécheurs réunis contre lui. Nul, en dehors de Marie, même le très saint Joseph, n’est étranger à la condamnation qui a été prononcée à son encontre. Nous savons, nous reconnaissons que toi seul « a les paroles de la Vie éternelle » (Jean 6, 68). Et pourtant, au final, nous participons avec tous les autres à la Passion du Seigneur… Il nous faut « souffrir et aimer » (Ibid.), mener une vie pénitente, d’expiation, participer à la Passion que nous avons provoquée en souffrant avec notre Seigneur, et prouver ainsi notre amour, tant il est vrai rien n’est plus grand que l’amour.


lundi 12 juillet 2010

Répondre à la grâce

Répondre à la grâce

Notre Dieu ne s’impose jamais. C’est un grand principe de la vie spirituelle, et de la vie tout court. Certes, nous sommes dans les mains de Dieu et nous dépendons totalement de son bon vouloir. C’est lui qui nous donne d’exister. C’est lui qui dispose toutes choses comme bon lui semble, pour favoriser notre sainteté. Mais ce ne sont en quelque sorte que des propositions de sa part. Nous pouvons les accepter ou le refuser. Nous pouvons entrer dans son jeu ou rester en dehors. « Répondre à la grâce divine, est-ce une affaire de justice… ? de générosité… ? me demandes tu » (saint Josémaria, Sillon, n° 669). Certes, nous devons tout à Dieu, (lire la suite) nous sommes ses débiteurs sur toute la ligne. El il est donc logique que nous répondions à ses initiatives, qui sont autant de marques de prévenance à notre égard. C’est donc bien une question de justice. Nous devons remercier Dieu en répondant à ses requêtes. Et nous devons le faire avec générosité aussi, car autrement il est difficile, voire impossible, de parvenir à la sainteté. Un don de soi consenti à moitié, une réponse donnée du bout des lèvres qui n’engage pas toute la personne, un effort calculé et modéré pour ne pas trop se fatiguer, ne sont pas réponses appropriées, proportionnées à l’offre divine.
Nous percevons bien que la réponse à ces questions doit être positive et qu’il faut pousser plus loin que la simple générosité. Saint Josémaria précise, en effet, que « c’est une affaire d’Amour ! » (Ibid.). Voilà le maître-mot lâché. Nous comprenons bien qu’il n’en est pas d’autre. Il ne peut pas y en avoir de plus excellent, car la charité surclasse tout, est la vertu qui domine toutes les autres et les commande. C’est la vertu spécifique à l’organisme surnaturel, propre au chrétien. C’est d’elle que Paul dit, à propos des vertus théologales, que « la plus grande d’entre elles, c’est la charité » (1 Corinthiens 13, 13).
Or, que commande la charité ? Le Sch’ma Israël le répétait à l’envie, et le Seigneur ne s’est pas privé de le rappeler à plusieurs reprises, le grand commandement de l’amour c’est : « Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de tout ton esprit, et ton prochain comme toi-même » (Luc 10, 27). Nous sommes invités à tout mettre dans la balance. Il n’est donc pas seulement question de justice et de générosité, vertus que nous devons vivre aussi sans aucun doute. Mais c’est la charité, l’Amour de Dieu qui doit être le moteur de notre réponse à la grâce et commander l’ensemble de notre comportement. C’est la vertu suprême dans laquelle nous pouvons toujours exceller davantage. La vertu qui nous réserve des surprises sans fin, car elle s’ouvre sur l’immensité de Dieu, l’infini de son propre Amour.
D’ailleurs, vivre par amour, vivre d’amour, est beaucoup plus séduisant et stimulant que de se contenter de la justice, de rendre à chacun strictement ce que nous lui devons - ce qui, de plus, est hors de notre portée envers Dieu – ou même de la générosité, que nous risquons de limiter, de faire rentrer dans un certain cadre restrictif plus ou moins adapté à nos convenances. La générosité doit être dépassée par la magnificence de l’Amour. Nous y gagnons nous-mêmes, parce que l’âme se grandit, s’épanouit, se sanctifie davantage dans cette identification qui s’opère avec notre Dieu qui est Amour (1 Jean 4, 16), comme saint Jean l’a fait remarquer avec une observation très pénétrante.

dimanche 11 juillet 2010

Arrêts sur christianisme (57)

Arrêts sur christianisme (57)

Le christianisme se présente comme une nouveauté radicale dans les relations de l’humanité avec Dieu. Il présente de Dieu une image nouvelle, plus proche de nous que tout ce qui avait été pensé jusque-là. (…) Désormais toute la vie de l’homme passe donc par la reconnaissance et l’accès à Jésus-Christ. Si l’on se rappelle que « Jésus » signifie « Sauveur », on comprend toutes les implications de cette découverte. Il s’agit bien de faire une humanité nouvelle, différente du « monde » simplement humain dans lequel on vivait jusque-là. Il n’est sans doute pas exagéré d’affirmer que les premières générations chrétiennes ont fait cette expérience de l’originalité radicale du Christ, qui demandait à son tour un choix et un engagement radicaux.

R. Darricau et B. Peyrous, La spiritualité, Paris, 2e éd., 1990, p. 20.

samedi 10 juillet 2010

Complainte de l’exilé (8)

Complainte de l’exilé (8)

« Je parviendrai à l’autel de Dieu, au Dieu qui est ma joie et mon allégresse, et je te louerai sur la harpe, ô Dieu, ô mon Dieu » (Psaume 43, 4). Ainsi je jouerai de la harpe, des cymbales et de la cithare pour toi, mon Dieu. Je joue et je chante ta louange. « Je veux chanter à jamais les louanges de Yahvé ; d’âge en âge ma bouche fera connaître sa fidélité » (Psaume 89, 2). Or, celui qui chante prie deux fois, il double la mise. Mais toi, tu vois plus loin, beaucoup plus loin, comme toujours. A celui qui te donne de bon cœur le peu qu’il possède, tu octroies trente pour un, soixante ou cent pour un (Matthieu 13, 8) ! (lire la suite)
Devant semblable perspective qui, plus qu’une possibilité, une éventualité, est une réalité quotidienne, « pourquoi es-tu abattue, ô mon âme, et gémis-tu en moi ? Espère en Dieu, car je le louerai encore, lui, le salut de ma face et mon Dieu » (Psaume 43, 5). « Quand irai-je contempler la face de mon Dieu ? » (Psaume 42, 3). Je languis après lui comme une biche. « Mon âme a soif de Dieu, du Dieu vivant » (Psaume 42, 3). Je m’adresse à toi, Dieu de clémence et de miséricorde. Afin que mes vœux ne soient pas vains, que mes demandes ne soient pas vides, suggère-moi les prières que tu te plais à entendre et à exaucer avec empressement. Qu’au jour et à l’heure fixés, je puisse me compter au nombre de ceux qui ont traversé la grande tribulation. Ils ont lavé leurs robes et ils les ont blanchies dans le sang de l’Agneau. Aussi sont-ils devant le trône de Dieu et Le servent-ils jour et nuit dans son temple » (Apocalypse 7, 14-15). « Et j’entendis une voix qui venait du ciel et disait : « Ecris : Heureux les morts qui meurent dans le Seigneur ! – Oui, dit l’Esprit, que dès à présent ils se reposent de leurs peines, car leurs œuvres les suivent » (Apocalypse 14, 13).

(fin)

vendredi 9 juillet 2010

Complainte de l’exilé (7)

Complainte de l’exilé (7)

« Je ne suis pas assis avec les hommes de mensonge, et avec les hypocrites je ne vais pas ; je hais l’assemblée de ceux qui font le mal, et avec les méchants je ne siège pas » (Psaume 26, 4-5). Je ne pense pas que ce soit témérité de ma part que de l’affirmer. J’ai honte de ce que font tant de mes frères, et je ne veux point leur ressembler. Mon modèle, c’est toi, Jésus-Christ. C’est le conseil de l’Apôtre que je veux suivre : « Vous avez revêtu le Christ » (Galates 3, 27), revêtez « l’homme nouveau, créé d’après Dieu dans la vraie justice et la sainteté (Ephésiens 4, 24). Je veux avoir « les uns pour les autres les mêmes sentiments, d’après le Christ Jésus » (Romains 15, 5). (lire la suite)
« Car tu es mon Dieu, mon rempart » (Psaume 43, 2). « Le salut des justes vient de Yahvé. Il est leur place forte au temps de la détresse ; Yahvé leur vient en aide et les délivre ; il les délivre des méchants et les sauve, parce qu’ils ont cherché refuge en lui » (Psaume 37, 39-40). Si tu délivres même les méchants, « pourquoi dois-je cheminer tristement sous l’oppression de l’ennemi ? » (Psaume 43, 2). Ils disent, « venez, opprimons le juste », nous verrons bien si Dieu existe, s’il vient le secourir. « Si je me couche dans le shéol, le voilà » (Psaume 139, 8). Parce que tu es le Créateur du ciel et de la terre, et que c’est toi qui conserves le tout dans l’existence. « Je raconterai toutes tes merveilles » (Psaume 9, 2). « Hâte-toi de me secourir, Seigneur, toi qui es mon salut ! » (Psaume 38, 23). « Selon ta bienveillance, souviens-toi de moi » (Psaume 24, 7). « Envoie ta lumière et ta fidélité » (Psaume 43, 3) : ta lumière, c’est-à-dire ton Fils, le Rédempteur de l’homme, « la Lumière vraie, qui éclaire tout homme, venait dans le monde. Il était dans le monde, et le monde a été fait par lui » (Jean 1, 9-10), mais hélas ! « le monde ne l’a pas reconnu. (…) Mais à ceux qui l’ont reçu, il a donné le pouvoir de devenir enfants de Dieu : à ceux qui croient en son nom » (Jean 1, 10.12). Ne suis-je pas de ceux-là ? Envoie ta fidélité (Psaume 43, 3), toi qui es le Dieu fidèle par antonomase. Tu tiens « fidèlement toutes tes paroles » (Psaume 145, 13). Que moi-même je sois fidèle à la parole que je t’ai donnée, au contrat que nous avons passé, aux termes duquel je me suis entièrement mis à ton service et toi, en contrepartie, tu te donnes à moi. Que ta lumière et ta fidélité « me guident, qu’elles me conduisent à ta montagne sainte et à tes demeures » (Psaume 43, 3), qui sont si aimables (Psaume 84, 2).
Le psalmiste s’enquiert : « Qui habitera sous ta tente ? Qui demeurera sur ta montagne sainte ? » (Psaume 15, 1). Je réponds sans hésiter : « Moi ! » Et je répète ce que je t’ai déjà dit, en t’ouvrant mon cœur : « Il est une chose que je demande à Yahvé, je la désire ardemment : c’est d’habiter dans la maison de Yahvé, tout le temps de ma vie, pour jouir de la douceur de Yahvé et pour contempler son sanctuaire » (Psaume 27, 4).

(à suivre…)

jeudi 8 juillet 2010

Complainte de l’exilé (6)

Complainte de l’exilé (6

« On me brise les os, quand mes persécuteurs m’insultent en me disant sans cesse : « Où est ton Dieu ? » (Psaume 42, 11). Nous sommes devenus le rebut du monde (1 Corinthiens 4, 13), le bien est ridiculisé. Il apparaît toujours absurde. C’est étrange. Dès que quelqu’un agit droitement, ils parlent de « bondieuserie ». Mais il ne leur vient pas à l’esprit qu’eux, ils ne commettent que des « diableries » ! Ils ont passé un pacte avec satan. Il n’est pas étonnant alors qu’ils demandent : « Où est ton Dieu ? » Puisqu’ils nient ton existence. Satan s’acharne d’autant plus à leur faire croire que tu n’existes pas qu’il sait pertinemment que tu es celui qui est « Je suis » (Exode 3, 14) et qu’il a fait la cruelle expérience de ce qu’il en coûte de s’opposer à toi, de te désobéir, de te rejeter. (lire la suite)
Mais pourquoi m’inquiéter ? N’as-tu pas vaincu sur la Croix, et à jamais ? Si tu veux réduire tes adversaires, tu le peux. Il suffit d’un mot de ta part. Mais ce mot, je te demande que ce soit : « Je pardonne. » Dis seulement un mot et mon âme sera guérie (cf. Matthieu 8, 8). Dis un seul mot, et ils reviendront à toi. « Pourquoi es-tu abattue, ô mon âme, et gémis-tu en moi ? Espère en Dieu, car je le louerai encore, lui, le salut de ma face et mon Dieu ! » (Psaume 442, 12). « Vers toi, j’élève mon âme » (Psaume 25, 1), « que je n’aie pas de confusion ! » (Psaume 25, 2).
« Rends-moi justice, ô Dieu » (Psaume 43, 1). « Je ne puis rien faire de moi-même » (Jean 5, 30). « Rends-moi justice, Yahvé, car j’ai marché dans l’intégrité, et mettant ma confiance en Yahvé, je n’ai pas chancelé (Psaume 26, 1), mais je suis resté ferme dans la foi. Du moins je l’espère. Du moins est-ce ma ferme résolution de marcher dans tes voies, dans la justice et la sainteté (Luc 1, 75), sans chanceler, sans me laisser déstabiliser par les loups qui hurlent autour de moi : « Où est ton Dieu ? » Ils ne te voient pas, ils restent insensibles à ta présence et à ton action parce qu’ils t’ont délibérément extirpé de leur vie et de leur environnement. C’est ce qu’ils appellent d’un euphémisme : la laïcité (une certaine laïcité du moins). Tu n’as pas droit de cité. Ils ont pensé t’avoir tué. Mais tu es « le même hier, aujourd’hui et pour les siècles » (Hébreux 13, 8). Tu es vivant. Tu es ressuscité.
J’ai pris fait et cause pour toi, mon Dieu. Toi, « défends ma cause contre un peuple infidèle ; de l’homme de fraude et d’iniquité délivre-moi ! » (Psaume 43, 1), « délivre-moi de la main du méchant, des griffes de l’homme inique et cruel » (Psaume 71, 4). « Préserve-moi de l’homme violent. (…) Garde-moi des mains du méchant, préserve-moi de l’homme violent, qui méditent de faire trébucher mes pas » (Psaume 140, 2.5). « Que contre moi s’engage le combat, alors même j’aurai confiance » (Psaume 27, 3).

(à suivre…)

mercredi 7 juillet 2010

Complainte de l’exilé (5)

Complainte de l’exilé (5)

Il peut me sembler parfois que « sur moi s’appesantit ta fureur, et de tous tes flots tu m’accables » (Psaume 88, 8). Et « un abîme appelle un abîme, quand grondent tes cataractes : tous tes flots et tes vagues ont passé sur moi » (Psaume 42, 8). Mais pourquoi craindre ? Ce ne sont pas les flots de la mort, mais ceux de la vie. Il s’agit des eaux purificatrices du baptême et de la grâce. Je m’y suis plongé. Je m’y plongerai encore. J’y bois goulûment. Tu affirmes que « celui qui boira de l’eau que je lui donnerai n’aura plus jamais soif » (Jean 4, 14). Et tu lances cette invitation : « Que celui qui a soif vienne ; que celui qui désire recevoir reçoive gratuitement de l’eau de la vie » (Apocalypse 22, 17). Je me précipite dans cette onde bienfaisante.(lire la suite) Je m’insère dans ce courant vivifiant. « Seigneur, donne-moi de cette eau-là afin que je n’aie plus jamais soif » (Jean 4, 15). Que je n’en manque jamais. Que ta grâce prévenante m’entoure de toute part. « Amen. Viens, Seigneur Jésus » (Apocalypse 22, 20).
Ne tarde pas, car j’ai soif de toi, ô mon Dieu. « Le jour, puisse Yahvé envoyer sa grâce » (Psaume 42, 9), le jour, tant que l’on peut travailler. Car « la nuit va venir : alors personne ne pourra plus travailler » (Jean 9, 4). Et moi, « pendant la nuit, je chanterai un cantique de louange au Dieu de ma vie » (Psaume 42, 9). C’est ce que j’ai de mieux à faire, réciter des communions spirituelles, des oraisons jaculatoires, me préparer à recevoir le Seigneur dans la sainte communion, me centrer sur « le Dieu de ma jeunesse » Psaume 71, 5), qui est le Dieu de ma vie, « ma lumière et mon rocher » (Psaume 27, 1).
« Je dis à Dieu, mon rocher : « Pourquoi m’oublies-tu ? » (Psaume 42, 10). Mon rocher ! « C’est vers toi, Yahvé, que je crie : mon rocher, ne reste pas sourd à mon égard » (Psaume 28, 1). « Auprès de toi se trouve le pardon » (Psaume 130, 4), le rachat. Vraiment, mon Dieu, « tu es mon rocher, ma forteresse, mon libérateur, mon Dieu, mon roc où je trouve un asile, mon bouclier, la corne qui me sauve, ma citadelle ! » (Psaume 18, 3). « Ecoute le cri de ma prière » (Psaume 61, 2), de la supplication que je fais monter vers toi. « Qu’il soit fait bon accueil aux paroles de ma bouche et à la méditation de mon cœur devant toi, Yahvé, mon rocher et mon libérateur » (Psaume 19, 15). « Pourquoi dois-je cheminer tristement, sous l’oppression de l’ennemi ? » (Psaume 42, 10). Impressionnante est la pression de l’adversaire, qui retourne à son profit toutes les inventions de l’homme, que la participation à ton intelligence créatrice leur fait découvrir. Il les dénature, en tire avantage. Et nous sommes comme enserrés dans une presse, éprouvant du mal à continuer de respirer l’air frais de la grâce.

(à suivre…)

mardi 6 juillet 2010

Complainte de l’exilé (4)

Complainte de l’exilé (4)

Mon cœur fond durant la sainte messe. Tu y es présent, bien réellement. Et en même temps je n’en ressens qu’avec plus d’acuité le désir de vivre avec toi, par toi et en toi. De ne faire qu’un, de disparaître à moi-même pour que tu gouvernes ma vie et fasses de moi ce que tu veux, que tu te serves de moi comme d’un instrument docile à tes inspirations. Nous sommes ensemble et je voudrais que nous le soyons pleinement et à tout jamais. C’est déjà du bonheur, mais ce n’est pas le bonheur. « Pourquoi es-tu abattue, ô mon âme, et gémis-tu en moi ? » (Psaume 42, 6), alors que nous nous retrouvons pour l’offrande sublime du Fils à son Père en notre faveur à tous, alors que nous participons à cette oblation en y adjoignant toute notre existence qui, (lire la suite) de ce fait, acquiert une dimension cosmique, prend des proportions divines.
Comment être triste, alors même que c’est le sacrifice de la Croix qui est rendu présent ? Mais il est victoire sur le monde. Il signifie la défaite cuisante du diable, dont nous subissons les derniers soubresauts, comme l’hydre dont on a coupé la tête continue de se tordre dans des convulsions dérisoires. Ô mon âme, « espère en Dieu, car je le louerai encore, lui, le salut de ma face et mon Dieu » (Psaume 42, 6-7). Oh ! vraiment, « Yahvé est ma lumière et mon salut : qui craindrais-je ? Yahvé est le rempart de ma vie : de qui aurais-je peur ? » (Psaume 27, 1). Rien ne peut m’inquiéter. « Même quand je marche dans une vallée pleine d’ombre, je ne crains aucun mal, car tu es avec moi ; ta houlette et ton bâton, c’est mon réconfort » (Psaume 23, 4).
Moi avec toi et toi avec moi. Ma compagnie ne t’effraie pas. Tu sais surmonter la répugnance que j’inspire parce que « tu es mon Berger » (Psaume 23, 1). « Asperge-moi avec l’hysope » (Psaume 51, 9). Mon Dieu, « aie pitié de moi ! Guéris mon âme, car j’ai péché contre toi ! » (Psaume 41, 5). « Agis envers ton serviteur selon ta miséricorde » (Psaume 119, 124). Je ne te demanderai jamais assez d’avoir pitié de moi, de me pardonner mon péché. « C’est contre toi, toi seul, que j’ai péché » (Psaume 51, 6). « En moi mon âme est abattue » (Psaume 42, 7), en considérant cette masse d’iniquité. « En moi mon âme est abattue ; aussi je pense à toi, du pays du Jourdain et de l’Hermon, du Mont Miçar » (Psaume 42, 7), du pays de l’Eucharistie, du Cénacle où nous nous retrouvons et où je viens refaire mes forces. « Seigneur, tu sais tout, tu sais que je t’aime » (Jean 21, 17).
Je ne le prouve peut-être pas beaucoup. Pourtant, tu le sais mieux que moi. Si je t’aime, c’est d’ailleurs parce que tu m’apprends à aimer, et que tu me donnes l’amour avec lequel tu veux que je t’aime ! Autrement, j’en serais bien incapable. Tu sais donc que ce sont des sentiments sincères. Mais que je puisse faire mieux, mille fois mieux, voilà qui est clair ! C’est pourquoi « je pense à toi ».Ta simple évocation réjouit mon cœur, me stimule. Alors ta fréquentation produit de tous autres effets.

(à suivre…)

lundi 5 juillet 2010

Complainte de l’exilé (3)

Complainte de l’exilé (3)

Il est vrai que tu pourrais me répondre que tu le tolères, en effet, mais que tu me tolères aussi, moi qui, tout en étant ton fils, suis un pécheur. « Si un ennemi m’outrageait, je supporterais la chose si celui qui me hait se dressait contre moi, je me cacherais devant lui. Mais c’était toi, mon compagnon, mon ami et mon familier, avec qui j’entretenais une douce intimité » (Psaume 55, 13-15). Je le sais. J’en suis conscient. Je t’en demande pardon. C’est bien pour cela que je veux voir ton visage. Car, alors, c’en sera fini de mes incartades. Alors ma louange se joindra définitivement à celle des neuf chœurs des anges et de tous les élus du paradis. (lire la suite) Quand te verrai-je face à face ? Je comprends qu’il te soit pénible d’avoir affaire à quelqu’un d’aussi peu reconnaissant que moi, d’aussi inconstant, qui est encore si loin d’être ce qu’il devrait être, un saint ! Pardonne-moi. « Si tu gardes le souvenir des iniquités, ô Yahvé, Seigneur, qui pourra subsister ? » (Psaume 130, 3). Il n’y aura plus personne pour te servir. Et là, les méchants pourront dire : « Où est leur Dieu ? »
« Je me rappelle – et mon cœur fond en moi – quand, m’avançant avec la foule, je les conduisais vers la maison de Dieu » (Psaume 42, 5). Mon cœur fond en moi, car le souvenir de tes bienfaits, l’évocation de ta bienveillance font naître en moi des sentiments de reconnaissance et éveillent ma capacité à aimer. « Goûtez et voyez comme Yahvé est bon ! » (Psaume 34, 9). Oh ! Oui, tu es bon ! Et pourquoi ambitionner autre chose ? Car tu donnes « une bonne mesure, pressée, tassée, débordante » (Luc 6, 38). Et cette mesure, c’est toi, qui dépasse toute espérance, qui transcende toute prévision, toute aspiration. « Ce que l’œil n’a pas vu, ce que l’oreille n’a pas entendu, ce qui n’est pas monté au cœur de l’homme, c’est ce que Dieu a préparé pour ceux qui l’aiment » (1 Corinthiens 2, 9). « Quand irai-je contempler la face de Dieu ? (…) Je me rappelle – et mon cœur se fond en moi – quand, m’avançant avec la foule, je les conduisais vers la maison de Dieu, aux accents et aux acclamations et des hymnes d’action de grâces, dans un cortège de fête » (Psaume 42, 3.5). Tel devrait être le cas chaque fois que je reviens dans ton temple pour y célébrer, avec l’Eglise tout entière, l’Auguste Sacrifice de notre Rédemption, l’action de grâces par excellence. Venez, crions de joie, car le Seigneur est ressuscité, il est mort et il est ressuscité, car la Vie l’a emporté sur la mort.

(à suivre…)

dimanche 4 juillet 2010

Complainte de l’exilé (2)

Complainte de l’exilé (2)

C’est tout mon être qui est tendu vers toi, qui te désire, ô mon Dieu. C’est une quête, une attente de tous les instants. « Mon âme t’a désiré pendant la nuit, et en moi mon esprit dès l’aube aspire vers toi » (Isaïe 26, 9). Dès mon réveil, dès que je me lève, je pars à ta poursuite. Je fais de nouveau l’assaut de ta forteresse. Je sais bien que je ne suis pas digne de paraître en ta présence. Mais c’est toi qui mets en moi cette profonde aspiration. Si bien que tu te contrains toi-même à exaucer ma pétition, à te manifester au pauvre pécheur que je suis encore.
« Quand irai-je contempler la face de Dieu ? Mes larmes sont ma nourriture jour et nuit » (Psaume 42, 3-4). Car les mondains ne cessent de me tourner en dérision. (lire la suite)) Nous sommes la cible de leurs dards acérés, qu’ils décochent continuellement contre toi et les tiens. C’est bien toi qu’ils visent à travers nous. Tu nous l’as fait savoir : « Bienheureux serez-vous quand les hommes vous haïront, quand ils vous banniront, quand ils vous insulteront et proscriront votre nom à cause du Fils de l’homme. En ce jour-là, soyez dans la joie et tressaillez d’allégresse, car votre récompense sera grande dans le ciel » (Luc 6, 22-23). Les gens de notre époque, comme des époques antérieures, ne cessent de se moquer de nous, de se gausser en répétant d’un air narquois : « Où est votre Dieu ? » Vas-tu les laisser rire ainsi de toi ? « Pour nous, c’est justice, car nous recevons ce que nous ont valu nos actes » (Luc 23, 41), mais toi, Seigneur, « tu n’as rien fait de répréhensible » (Luc 23, 41). Au contraire, tous reconnaissaient : « Il a tout fait à la perfection » (Marc 7, 37). « Pourquoi dirait-on parmi les peuples : « Où est leur Dieu » ? » (Joël 2, 17).
Pourtant ils le disent. Ils hurlent après ceux qui proclament la vérité, « à temps et à contretemps » (2 Timothée 4, 2). Ils injurient ton vicaire et le traînent dans la boue. Ils salissent ces autres christs que sont tes ministres. Tu as pourtant dit : « Ne touchez pas à mes christs » (1 Chroniques 16, 22). Mais eux n’en ont cure. On dirait que jamais le malin n’a été aussi libre d’agir et de répandre son venin, que le mal n’a jamais été aussi étendu, aussi bien accueilli par autant de cœurs pervertis ! Et tu tolères cela !

(à suivre…)