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samedi 29 octobre 2011

Variations sur la couleur


Variations sur la couleur

Il était vert de rage. Quelqu’un avait profité de la nuit noire pour lui faire un œil au beurre noir. Maintenant, il voyait rouge, et pas du tout la vie en rose. En fait, il avait passé une nuit blanche. Ce qu’on lui avait fait était noir de café. Pour lui, c’était cousu de fil blanc : on voulait lui en faire voir des vertes et des pas mûres. Mais ils feront chou blanc.
Il se vengerait, bien sûr, en tirant à boulets rouges. Comment pouvait-on insinuer qu’il travaillait au noir ? Ne lui avait-on pas donné carte blanche ? (lire la suite)
Il se mit à ricaner. Mais c’était le rire jaune de quelqu’un qui mijote de noirs desseins. On lui avait promis un parachute doré, compte tenu de sa matière grise. Il avait du mal à suivre le fil rouge de leur logique. Il n’était quand même pas un casque bleu. On le menaçait d’un carton rouge ? Il se battrait, à l’arme blanche s’il le fallait. Il deviendrait leur bête noire, lui la blanche colombe. Son casier judiciaire était blanc comme neige.
Je ne suis quand même pas la Croix rouge ! Ni une éminence grise. Ils aiment l’humour noir, mais ils ont franchi la ligne rouge. Je vais écrire un livre noir. On me prend pour un petit bleu ? Eh bien ! je vais jouer au diable rouge. Ce sera le péril jaune et la peste noire réunis. Ils peuvent m’offrir un pont d’or. Je m’en contre-fiche. Je n’ai aucune raison d’être rouge de honte. Je peux les regarder dans le blanc de l’œil et leur asséner une volée de bois vert. Car moi, j’ai la Vierge noire avec moi.


jeudi 27 octobre 2011

Sur le mode « Petit »


Sur le mode « Petit »



J’avais un petit creux à l’estomac. Alors je suis allé boire un petit coup. J’ai demandé aussi un petit noir. Le servant m’a dit :
« Mon petit monsieur, vous prendrez bien un petit dessert. »
J’y ai répondu :
« J’suis pas vot' p’tit monsieur. »
Je vais faire un petit tour, car je n’aime pas rester dans mon petit coin. Me voilà à peine sorti que je rencontre mon petit ami.
« Nous pourrions faire un petit bout de chemin ensemble », lui proposai-je.
Bien sûr, me répond-il, tout en ajoutant : « Attend une petite minute (elle aura quand même soixante secondes…), que je réponde à ce petit message. C’est le petit père Un tel qui me fait une petite commission. Il doit venir me voir dans un petit moment.
Le p’tit Père Un tel ? Mais je le connais : comme le monde est petit !
Vas-y, confiant, au petit bonheur la chance.

mercredi 26 octobre 2011

La prière (7)


La prière (7)

Nous demandons encore : « Ne nous soumets pas à la tentation » (Matthieu 6, 13). Tel est le texte. Nous pouvons demander tout aussi bien que Dieu nous aide à ne pas succomber à la tentation puisque celle-ci, en définitive, n’est pas un mal, mais peut être l’occasion d’un progrès, éventuellement important, dans la vie intérieure si nous y résistons avec l’aide de la sainte grâce de Dieu. La tentation sert donc à notre avancée spirituelle. Et l’exemple de Jésus, acceptant que le Tentateur ose s’approcher de lui (cf. Luc 4, 1-143), nous montre à la fois que ce n’est pas un mal et comment la repousser. Jésus se cite lui-même ; puisqu’il réfute le diable en disant à chaque fois : « Il est écrit ; » Or, c’est lui la Parole de Dieu. Il est le Verbe vivant du Père, qui ne parle pas de lui-même, mais répercute tout ce que le Père lui a prescrit « à dire et à faire entendre » (Jean 12, 49). (lire la suite)
Evidemment, ne pas être soumis à la tentation est une situation apparemment confortable. En apparence seulement, car cela freine le combat décidé contre le mal et pour l’extension du Bien. Et puis, dans l’épreuve, nous pouvons toujours compter avec l’aide de Dieu et la présence discrète mais active et efficace de notre très Sainte Mère, la Vierge Marie, sans parler de celle de notre ange gardien, placé à nos côtés précisément pour détourner les attaques de l’ennemi.
« Ne nous soumets pas à la tentation, mais délivre-nous du Malin ! » (Matthieu 6, 13). Oui, ne permets pas que nous tombions entre ses mains, entre ses griffes. Heureusement, je peux toujours compter sur ta prière, qui est infaillible : « Je ne prie pas pour que tu les retires du monde, mais pour que tu les préserves du Malin » (Jean 17, 15). « Nous savons que quiconque est né de Dieu ne commet pas de péché : l’Engendré de Dieu le garde et le Malin n’a pas de prise sur lui » (1 Jean 5, 18). Ainsi soit-il.

(fin)

mardi 25 octobre 2011

La prière (6)


La prière (6)

La conclusion que Jésus en tirait est éloquente et, encore une fois, redoutable : « C’est ainsi que mon Père céleste vous traitera, si vous ne pardonnez pas du fond du cœur, chacun à son frère » (Matthieu 18, 35). Remarquons bien que le Seigneur ne nous demande pas un pardon quelconque, un semblant de pardon, mais que nous pardonnions de tout notre cœur les offenses dont nous avons pu faire l’objet.
Nous ne pouvons sans doute pas les oublier pleinement et ne pas y penser de temps à autre, si elles ont été importantes, notamment quand nous en voyons l’auteur ou qu’il est question de lui. C’est inévitable et involontaire de notre part. Mais il faut alors pardonner de nouveau. C’est la seule attitude vraiment chrétienne. (lire la suite) Pardonner et prier pour l’intéressé, car nous voulons qu’il se convertisse et se sauve. Car le Seigneur nous en a prévenus : « C’est avec la mesure que vous employez qu’on mesurera pour vous » (Matthieu 7, 2). C’est pourquoi, « ne jugez pas afin de ne pas être mis en jugement, car c’est d’après le jugement que vous portez que vous serez jugés » (Matthieu 7, 1-2).
L’exercice du pardon n’est pas chose aisée. Le Seigneur le sait, lui qui est capable de tout encaisser et qui, au paroxysme de la souffrance, trouve encore la force pour adresser à son Père et à notre Père cette prière poignante : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 24, 34). C’est pourquoi il est revenu sur le sujet de multiples fois : « Ne jugez pas, et vous ne serez pas mis en jugement ; ne condamnez pas, et vous ne serez pas condamnés ; pardonnez et vous obtiendrez le pardon » (Luc 6, 37). Saint Paul relayera cet enseignement en relevant que « en jugeant autrui, c’est toi- même que tu condamnes, puisque tu agis de même toi qui fais le juge » ( Romains 2, 1). Tenons-nous pour avertis. « En effet, si vous remettez aux hommes leurs manquements, votre Père céleste remettra aussi les vôtres ; mais si vous ne remettez pas aux hommes leurs manquements, votre Père non plus ne vous remettra pas les vôtres » (Matthieu 6, 14-15). Ce qui semble au fond tout à fait juste. Et nous serons les grands perdants. Car « celui qui se venge rencontrera la vengeance exercée par le Seigneur, qui retiendra soigneusement ses péchés. Pardonne à ton proche son injustice, et alors à ta prière tes péchés seront remis » (Siracide 28, 1-2).

(à suivre…)

lundi 24 octobre 2011

La prière (5)


La prière (5)

A y regarder de près, bien des gens se contrefichent de la Volonté de Dieu. Ils n’y attachent aucune importance. Pourtant c’est cette Volonté qui s’imposera toujours, en fin de compte. Une volonté extrêmement respectueuse de notre liberté – et il a là de quoi rester pantois -, de la volonté humaine, mesquine et fragile, qui ne saurait se mettre en travers d’elle avec succès. Nous l’avons bien vu ; pour prendre l’exemple le plus hautement significatif, avec la mort du Christ exigée par les grands prêtres et tout le Gotha de Jérusalem et réclamée par le peuple excité par eux. Cette volonté dévoyée a aussi servi au plus haut point la Volonté divine de salut universel. (lire la suite)
« Donne-nous aujourd’hui le pain nécessaire à notre subsistance » (Matthieu 6, 11). « Ne vous inquiétez pas et ne dites pas : Qu’aurons-nous à manger ? ou : Qu’aurons-nous à boire ? ou : « Qu’aurons-nous pour nous vêtir ? De tout cela, en effet, les païens sont en quête, alors que votre Père céleste sait que vous avez besoin de tout cela. Cherchez premièrement le royaume de Dieu et sa justice, et tout cela vous sera donné en plus » (Matthieu 6, 31-33). Comme lorsque le jeune roi Salomon, sollicité par Dieu, ne lui demande pas la richesse ou le pouvoir, mais la sagesse : « Parce que tu as fait cette demande, et que tu n'as pas demandé pour toi de longs jours, et que tu n'as pas demandé pour toi des richesses, et que tu n'as pas demandé pour toi la mort de tes ennemis, mais que tu as demandé pour toi de l'intelligence pour exercer la justice, voici que je fais selon ta parole: voici que je te donne un cœur sage et intelligent, de telle sorte qu'il n'y ait eu personne avant toi qui te soit semblable, et qu'il ne s'élèvera personne après toi qui te soit semblable. Et même ce que tu n'as pas demandé, je te le donne, richesses et gloire, au point que parmi les rois il n'y aura personne comme toi, pendant tous tes jours » (1 Rois 3, 11-13). « Que ton règne arrive ! » est donc un préalable à l’obtention des biens matériels. « Messire Dieu premier servi », disait saint Jeanne d’Arc. C’est logique. « Regardez les oiseaux du ciel, qui ne sèment ni ne moissonnent, et qui n’entassent pas dans des granges, mais que nourrit votre Père céleste : ne valez-vous pas beaucoup plus qu’eux ? » (Matthieu 6, 27). « Et remets-nous nos dettes, comme nous-mêmes les remettons à ceux qui nous doivent ! » (Matthieu 6, 12). Demande redoutable en engageante ! Le Seigneur l’illustrera un jour avec la parabole du serviteur impitoyable, à qui son maître remet une dette gigantesque et qui n’est pas capable de remettre à son tour la dette ridicule d’un de ses compagnons de travail. Son maître qui lui avait pardonné dans un premier temps, « pris de colère, (…) le livra aux bourreaux jusqu’à ce qu’il eût remboursé tout ce qu’il lui devait » (Matthieu 18, 15-34).

(à suivre…)

dimanche 23 octobre 2011

La prière (4)


La prière (4)

Des bonnes œuvres, il en faut, et beaucoup, non seulement pour nous sanctifier réellement, mais aussi pour contrecarrer l’action de ceux qui se laissent guider par le diable et non par Dieu. « En ces temps de violence, de sexualité brutale, sauvage, notre devoir est d'être des rebelles. Toi et moi, nous sommes des rebelles: nous ne voulons pas nous laisser entraîner par le courant et devenir des bêtes. Nous voulons nous comporter en enfants de Dieu, en hommes ou en femmes qui recherchent l'intimité de leur Père qui est dans les cieux et qui veut être très proche de nous — au-dedans de nous ! » (saint Josémaria, Forge, n° 15). (lire la suite)
Dieu fait remonter en nous cette aspiration : « Que ton règne arrive ! » (Matthieu 6, 10). Le règne de Dieu est parmi vous (Luc 17, 21), a affirmé Jésus. Cette royauté, c’est précisément celle que nous laissons notre Dieu exercer sur tout notre être, sur nos pensées et nos activités. Dieu est « au-dedans de nous ! » Il veut régner en nous pour régner aussi dans le monde, à partir de l’ilot de sainteté que chacun de nous doit être.
Le Christ est venu instaurer un royaume universel et éternel de justice et de paix (cf. Ezéchiel 26, 38). Il a établi sa royauté à tout jamais. Tant que le monde existe ; cependant, elle est en butte aux attaques de l’indifférentisme, de l’agnosticisme, de l’athéisme, de l’anticatholicisme et de tous les matérialismes aveugles à la dimension surnaturelle. A nous de faire régner le Christ sur la terre ! « Regnare Christum volumus ! — nous voulons que le Christ règne. Deo omnis gloria ! — A Dieu toute la gloire. Batailler et vaincre avec les armes du Christ : cet idéal ne se traduira dans les faits que par la prière et par le sacrifice, par la foi et par l'Amour. — Eh bien ! décide-toi à prier, et à croire, et à souffrir, et à Aimer ! » (saint Josémaria, Forge, n° 639).
« Que ta volonté soit faite sur la terre comme elle l’est au ciel » (Matthieu 6, 10). C’est là quelque chose de bien difficile à réaliser, un objectif qui semble hors de notre portée ! Et pourtant telle est la demande que Dieu attend de nous. Cela deviendra une réalité si nous prions sérieusement, avec foi, avec piété si nous insistons auprès du Seigneur pour que sa volonté soit le moteur des actions des hommes, des décisions des gouvernants ; des détenteurs des moyens de communication sociale, des créateurs de la mode et des différentes expressions artistiques, des éducateurs et des enseignants à tous les niveaux, etc.

(à suivre…)

samedi 22 octobre 2011

La prière (3)


La prière (3)

« Vous autres, priez donc ainsi : « Notre Père… » (Matthieu 6, 8-9). Mais Jésus précise qu’en priant il ne faut pas « multiplier les paroles comme font les païens, qui s’imaginent qu’ils seront exaucés à force de paroles » (Matthieu 6, 7). Ce n’est pas qu’il ne faille pas parler à Dieu, puisque la prière, toute prière, est une conversation, en même temps que l’adoration du Dieu Tout-Puissant. Mais la prière n’est pas que parole : elle est aussi écoute. Le verbiage, « le moulin à paroles », l’égrenage d’une sorte de chapelet, empêche d’entendre. Car celui qui est verbeux s’écoute au fond lui-même. (lire la suite)
Déverser un flot de paroles ou parler de façon mécanique, machinale, ne sert à rien. « Quand vous multipliez les prières, je n’écoute pas », dit Dieu (Isaïe 1, 15). Il faut aller droit à l’essentiel. Et l’essentiel, c’est d’abord adopter une attitude filiale, reconnaître que nous sommes des enfants de Dieu, et accepter avec reconnaissance notre dépendance de ce Père que nous avons dans les cieux. Quand vous priez, dites donc : « Notre Père qui es dans les cieux, que ton nom soit sanctifié » (Matthieu 6, 9). Et comment pouvons-nous sanctifier le nom de Dieu, le seul qui nous ait été révélé pour notre salut (cf. Actes 4, 12) ? En suivant l’exemple du Fils de Dieu : « Je t’ai glorifié sur la terre, en menant à bonne fin l’œuvre que tu m’a donnée à faire » (Jean 17, 4). Nous glorifions donc Dieu en accomplissant sa très sainte Volonté, qui se résume à ceci : « Ce que Dieu veut, c’est votre sanctification » (1 Thessaloniciens 4, 3). Comment ne pas faire notre ce désir foncier de Dieu ? Comment ne pas dire, nous aussi : « Ma nourriture, c’est de faire la volonté de celui qui m’a envoyé » (Jean 4, 34) ?
Nous sanctifions le nom de Dieu en lui rendant le culte qui lui est dû, un culte aussi bien extérieur qu’intérieur, personnel et communautaire : « L’heure vient, et nous y voilà, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ; et ce sont bien là les adorateurs que réclame le Père » (Jean 4, 23).
Notre Père est aux cieux. Mais il n’est pas enfermé en un lieu. Il emplit tout l’univers, toute sa création, qui est un reflet de sa perfection (cf. Romains 1, 19-21) et la preuve de sa Toute-Puissance. Il a établi sa demeure plus encore dans l’âme de ses enfants, chez ceux qu’il a marqués libéralement du sceau du baptême. Rendons-nous compte de cette présence intime de Dieu, de ce Dieu qui nous accompagne donc partout où nous allons, qui assiste à tous nos ébats et se réjouit de toutes nos bonnes œuvres.

(à suivre…)

vendredi 21 octobre 2011

La prière (2)


La prière (2)

La question des apôtres, « Seigneur, apprends-nous à prier », se comprend donc très bien. Ils sont témoins jour après jour de la prière du Seigneur. Jésus est un homme de prière. Comment pourrait-il en aller autrement ? Tout baptisé est appelé à devenir un homme ou une femme de prière. Notre Seigneur l’est tout naturellement, pourrions-nous dire. D’un certain point de vue, il est même prière. Toute sa vie est une prière ardente adressée à son Père, pour qu’il accorde bénévolement le salut à l’humanité, une prière qui culmine avec le Sacrifice de la Croix. Jésus ne peut rien faire qui ne soit en même temps prière. (lire la suite)
Cela aussi m’apparaît évident, ayant appris de saint Josémaria ce qu’il appelait l’« unité de vie », c’est-à-dire le fait de tout orienter vers Dieu, de tout vivre conformément à la Volonté de Dieu, qui est notre sanctification et celle d’autrui (cf. 1 Thessaloniciens 4, 16) : sainteté et apostolat, comme le concile Vatican II l’a bien signalé.
Il n’y a pas, il ne doit pas y avoir, de « compartiments étanches » dans notre vie, disait-il. Tout est pour la gloire de Dieu. Tout est adhésion à Dieu, désir de faire ce qui lui plaît (cf. Tobie 14, 10). Tout est lieu de contemplation et d’adoration du Dieu Un et Trine. Tout est preuve de l’amour que nous portons à notre Dieu, dans une réponse modeste, mais aussi complète que possible à son Amour infini. De sorte qu’il devient impossible d’isoler la prière du travail et de l’apostolat. Tout se ramène en définitive à une activité unique : aimer Dieu.
La vie du Christ est donc toute d’Amour, une prière débordante. Elle donne irrésistiblement envie de prier à notre tour. D’où cette question pressante d’un ou de plusieurs apôtres, se fondant sur la tradition du Précurseur : « Apprends-nous à prier, tout comme Jean l’a appris à ses disciples » (Luc 11, 1).
L’on dirait que Jésus attendait que ses apôtres lui adressent cette demande ; car il répond sur le champ et leur indique, leur lègue une prière, la prière essentielle à ses yeux, que nous connaissons sous le nom de « Notre Père », des deux premiers mots qui la composent et qui en déterminent l’orientation générale.
Le Seigneur oriente en effet d’emblée vers l’essentiel. Il n’existe pas de vérité plus importante, ni plus consolante d’ailleurs, que celle-là : Dieu est notre Père. Il est fondamentalement Père. Il se caractérise par le fait d’être Père d’une multitude de croyants (cf. Genèse 17, 5), de tous les êtres humains, en qui il a voulu graver, en les créant un, par un, son image et sa ressemblance (cf. Genèse 1, 26). Nous ne sommes donc pas des inconnus pour Dieu, ni des êtres dont il pourrait se désintéresser. Mais nous sommes vraiment ses enfants (cf. 1 Jean 3, 1). C’est pourquoi la prière de base, la prière élémentaire, la prière alimentaire, la prière vitale pour nous est celle qui débute par ces mots : « Notre Père. »

(à suivre…)

jeudi 20 octobre 2011

La prière (1)


La prière (1)

« Un jour, alors qu’il était en prière quelque part, un de ses disciples lui dit, quand il eut fini : « Seigneur, apprends-nous à prier, tout comme Jean l’a appris à ses disciples » (Luc 11, 1). L’exemple de Jésus abîmé en prière est en soi déjà une incitation à s’adresser à Dieu. Mieux encore, elle met spontanément en présence de Dieu, elle branche directement sur Dieu. Je puis en témoigner, car j’ai vécu avec des saints, reconnus comme tels par l’Eglise ou en voie de l’être : saint Josémaria, fondateur de l’Opus Dei, et le Serviteur de Dieu Alvaro del Portillo, son plus proche collaborateur pendant quarante ans et son premier successeur à la tête de la prélature de l’Opus Dei. Un moment de réunion avec saint Josémaria (lire la suite) – je ne parle pas d’une participation à une prière spécifique ou à un acte de culte -, un simple moment de réunion, de vie de famille, se transformait dans notre cœur en quelque chose qui faisait naître en nous, ses enfants, des élans d’amour, d’union à Dieu. Il est symptomatique à cet égard qu’à la fin de ces réunions, nombre d’entre nous se rendaient spontanément à la chapelle pour poursuivre le dialogue amorcé avec notre Dieu.
Remarquons que Jésus est en prière « quelque part » au moment où cette demande est formulée. Le lieu n’est pas précisé. Mais le cadre de cette prière du Seigneur est probablement la nature, à l’issue d’un repas et d’un moment de conversation avec ses disciples, avant de reprendre l’activité d’évangélisation de le journée. Jésus prie là où il est, nous signifiant par là que nous pouvons aussi prier partout, « quelque part », quel que soit cet endroit. Même si l’église est un lieu privilégié pour la rencontre avec le Seigneur, car il est réellement présent dans le tabernacle, néanmoins nous pouvons – et nous devons parfois – prier ailleurs, là où la vie nous amène. Tout endroit est bon pour s’adresser à Dieu en faisant taire les sollicitations du monde, en nous abstrayant de la rumeur mondaine. La rue, l’atelier, le bureau, la chambre, la montagne, etc., sont autant de scènes sur lesquelles nous pouvons engager notre dialogue amoureux et contemplatif avec Dieu. Ce sont des occasions à ne pas manquer, des rendez-vous que nous prenons avec notre Dieu qui est présent partout et qui attend de nous que nous surnaturalisions toutes les réalités humaines, qu’elles soient toutes un lieu de prière, comme un sanctuaire de son amour.

(à suivre…)

mercredi 19 octobre 2011

Apparition à Thomas (6)


Apparition à Thomas (6)

« Thomas lui répondit : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » (Jean 20, 28). Que pouvait-il dire d’autre ? Il est convaincu. Il est vaincu. Et il formule enfin un bel acte de foi, si beau que l’Eglise l’a retenu pour le répéter inlassablement dans sa liturgie : « Mon Seigneur et mon Dieu ! » Répétons-le souvent, devant le Saint-Sacrement, en présence de ce Dieu crucifié et ressuscité qui continue de venir à notre rencontre, comme il est venu chez les apôtres, comme il est allé à la recherche des disciples d’Emmaüs, pour briser nos résistances à nous donner à fond à lui. « Mon seigneur et mon Dieu !... »
« Jésus lui dit : « Parce que tu m’as vu, tu as cru ; bienheureux ceux (lire la suite) qui croient sans voir ! » (Jean 20, 29). Cela s’adresse à nous. Jésus ne veut pas dire pour autant que nous soyons plus saints que Thomas. Mais il loue notre foi par avance, parce que pour nous « son humanité aussi est cachée » (Adoro te). Par cette réflexion, Jésus nous ramène une fois de plus à la foi, à l’adhésion sincère et totale à sa personne et à son enseignement.
« Celui qui demeure en moi, et moi en lui, celui-là porte beaucoup de fruit. (…) Si vous demeurez en moi et que mes paroles demeurent en vous, demandez ce que vous voudrez, et vous l’obtiendrez » (Jean 15, 5-7).
Nul doute que la Sainte Vierge a suivi de près le déroulement des événements. Comme toujours, elle n’interfère pas avec la Volonté de Dieu. Elle s’en remet à son Fils pour agir comme il l’entend. Elle connaissait l’entêtement de Thomas. Elle a donc prié pour lui, pour qu’il se laisse fléchir. Elle a dû se montrer tout particulièrement maternelle envers lui tout au long de cette semaine de repliement sur lui-même, de bouderie. Et, puisque toutes les grâces passent par elle, sa prière a obtenu de on Fils qu’il convertisse l’apôtre.
Plaçons-nous toujours entre les mains de notre Mère du ciel, avec l’assurance qu’elle intercèdera pour nous chaque fois que ce sera nécessaire, et qu’elle nous obtiendra la grâce de la rectification, du repentir, de la redécouverte du Christ, auprès de qui il fait si bon vivre et qui nous apporte la joie et la paix.

(fin)

mardi 18 octobre 2011

Apparition à Thomas (5)


Apparition à Thomas (5)

Alors Jésus, qui connaît bien son Thomas et qui l’aime évidemment beaucoup, Jésus qui le veut comme évangélisateur précisément « jusqu’aux extrémités de la terre » (Actes 1, 8), Jésus fait quelque chose d’inouï, d’absolument unique. « Huit jours plus tard, ses disciples étaient de nouveau dans la maison et avec eux Thomas » (Jean 20, 26). Manifestement, dans l’intervalle ils sont sortis. Ils n’ont plus peur. Saint Jean précise bien que l’apôtre incrédule et récalcitrant est présent. Une semaine s’est écoulée, au cours de laquelle Jésus ne s’est pas manifesté. Ce qui a dû renforcer Thomas dans sa conviction que les autres affabulaient et avaient voulu se moquer de lui de méchante manière. (lire la suite)
« Jésus arrive, toutes portes closes, se place au milieu d’eux et dit : « Paix à vous ! » (Jean 20, 26). La même salutation que la semaine précédente. Le même souhait. Jésus veut avant tout pacifier les cœurs. Sa présence apaise. C’est le sentiment que Pierre, Jacques et Jean ont éprouvé sur le mont Thabor et que Simon a exprimé en disant : « Comme il est bon pour nous d’être ici ! » (Luc 9, 33), comme nous sommes heureux avec toi, Seigneur. C’est un sentiment semblable qui s’est emparé du cœur des disciples d’Emmaüs : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, tandis qu’il nous parlait en chemin, et nous expliquait les Ecritures ? » (Luc 24, 32). C’est l’expérience universelle de la proximité de Dieu. Car Dieu seul peur assouvir notre soif de bonheur.
« Paix à vous ! Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici et regarde mes mains, avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne te montre plus incrédule, mais croyant » (Jean 20, 26-27). Thomas est tout penaud et rougit d’une oreille à l’autre. A-t-il mis effectivement sa main dans la plaie du Seigneur ? Les artistes ont souvent représenté la scène, qui est évidemment suggestive. On les comprend. Mais certains estiment que cela n’a pas été nécessaire. Thomas s’est rendu à l’évidence. La voix était bien celle de Jésus. Cette voix qui avait bouleversé Marie-Madeleine, au matin de Pâques, alors qu’elle croyait avoir affaire au jardinier : « Jésus lui doit : « Myriam ! » Se retournant, elle lui dit en hébreu : Rabbouni ! » (Jean 20, 16).
Et puis les traces de la Passion sont évidentes. Elles sont éloquentes par elles-mêmes. Point n’est besoin de vérification. Toute résistance de la part de Thomas est vaincue d’un seul coup, à la grande joie des dix autres qui assistent à la scène avec admiration mais aussi une certaine curiosité.

(à suivre…)

lundi 17 octobre 2011

Apparition à Thomas (4)


Apparition à Thomas (4)

« Je ne croirai pas ! » Thomas veut toucher. Il veut voir. Il veut du concret : « Sans doute, des femmes qui sont des nôtres nous ont jeté dans la stupeur : étant allées de grand matin au tombeau, et n’ayant pas trouvé son corps, elles sont revenues, en disant avoir même vu une apparition d’anges, au dire desquels il est vivant. Sur quoi, quelques-uns de nos compagnons sont allés au tombeau. Ils ont bien trouvé tout comme l’avaient dit les femmes ; mais lui, ils ne l’ont pas vu » (Luc 24, 22-24), sous-entendu, ce que les femmes ont dit n’a donc aucune valeur. Et il serait même apparu à Marie-Madeleine (Jean 20, 11-18). Pierre et Jean ne l’ont pas vu. Si Jésus était réellement apparu à ces femmes, je ne sais pas comment, se dit Thomas dans sa bonne logique paysanne, je ne vois pas comment il ne serait pas apparu aussi à Pierre et à Jean. C’est quand même à Simon qu’il a déclaré : (lire la suite) « Tu es Pierre, et c’est sur cette pierre que je bâtirai mon Eglise » (Matthieu 16, 18). Jean, lui, il est de notoriété publique que c’est le disciple que Jésus aimait tout particulièrement (cf. Jean 20, 26), en raison sans doute de sa jeunesse et du sacrifice plus absolu que pour les autres auquel il a dû consentir pour suivre le Maître.
Si Jésus n’est pas apparu à Pierre et à Jean, comment se serait-il manifesté à des femmes ? Maintenant, ils peuvent dire ce qu’ils veulent, moi, « si je ne mets pas mes mains dans la place des clous (…), je ne croirai pas » (Jean 20, 25). Il l’a dit fermement. Et il se le répète, pour s’en convaincre lui-même. C’est sans appel.
Nous sommes à nouveau confrontés à la logique de la foi. La foi, en tant que réponse à la Parole de Dieu, doit devenir le critère de jugement et d’évaluation des hommes et des choses, des événements et des problèmes, des soucis, comme l’on dirait de nos jours (cf. Jean-Paul II, exhortation apostolique Pastores dabo vobis, 25 mars 1992, n° 47). Ce qui vient de Dieu n’est pas irrationnel, en ce sens que cela ne s’oppose pas à la droite raison et peut être compris par elle, au moins de façon fragmentaire. C’est méta-rationnel, au-delà de la simple capacité intellective de l’homme. A la raison doit s’ajouter la soumission de la foi, l’humilité de l’intelligence, qui ne peut tout comprendre ni tout emmagasiner. C’est cela que Thomas refuse d’admettre. Il n’a pas cette foi épaisse, si épaisse que l’on pourrait la couper avec un couteau, que Dieu avait donné à saint Josémaria. Du moins, il ne l’avait pas encore, car, plus tard, elle le conduira jusqu’aux Indes, où il laissera un souvenir qui perdure.

(à suivre…)

dimanche 16 octobre 2011

Apparition à Thomas (3)


Apparition à Thomas (3)

Et Jésus leur communique l’Esprit Saint. Jusque-là, cet Esprit « n’avait pas encore été donné, parce que Jésus n’avait pas été glorifié »(Jean 7, 39). La situation a évolué. Jésus commence à communiquer l’Esprit à ses apôtres, avant qu’il ne descende sur eux d’auprès du Père le jour de la Pentecôte. A ce moment-là, Jésus « a reçu du Père l’Esprit Saint, et il a répandu ce que vous voyez et entendez » (Actes 2, 33), dira saint Pierre dans son premier discours.
« Or Thomas, appelé Didyme, l’un des Douze, n’étais pas avec eux(lire la suite) quand Jésus était venu » (Jean 20, 24). Avait-il moins peur que les autres pour sortir ainsi ? Il fallait bien de toute façon assurer l’approvisionnement journalier d’un nombre non négligeable de personnes. Il avait peut-être remplacé Judas comme trésorier du groupe.
Les dix autres attendent son retour avec impatience et, à peine a-t-il franchi le seuil du lieu, qu’ils lui disent tous à la fois avec une grande euphorie : « Nous avons vu le Seigneur ! » (Jean 20, 25). Leur enthousiasme et leur unanimité, le fait qu’ils soient des hommes et non des femmes, n’entrave nullement la conviction de Thomas que le Christ est définitivement mort en enterré et qu’il faudra vivre avec, tourner la page. Thomas est un bon gros rationaliste, qui a besoin de preuves concrètes, tangibles. Les paroles ne lui suffisent pas. Il s’en méfie, maintenant plus que jamais, car il est plus qu’échaudé avec tout ce qui vient de se passer. Aussi dit-il à ses compagnons : « Si je ne vois pas dans ses mains l’empreinte des clous, et si je ne mets pas mon doigt dans son côté, je ne croirai pas » (Jean 20, 25). Et si Jésus était ressuscité sans conserver dans son corps les marques de la Passion ? Mais sans doute les autres lui ont-ils dit qu’ils ont constaté ces traces afin de le convaincre. En vain. En tout cas, les paroles de Thomas ont le mérite de la clarté. Jésus pourrait lui reprocher évidemment son entêtement. Mais il faut dépasser les ratiocinations humaines. « Ô gens sans intelligence, esprits lents à croire tout ce qu’ont annoncé les prophètes ! » Luc 24, 29).

(à suivre…)

samedi 15 octobre 2011

Apparition à Thomas (2)


Apparition à Thomas (2)

Il est quelque peu surprenant que la première parole du Seigneur ressuscité à ses apôtres soit une parole de paix. Car leur cœur est troublé. Ils sont tristes. J’allais dire volontairement tristes, puisqu’ils refusent d’écouter les saintes femmes et d’accueillir la bonne nouvelle extraordinaire qu’elles leur ont annoncée, de la part du Maître pourtant (cf. Matthieu 28, 7). Mais Jésus leur avait dit par avance : « Vous autres, vous serez dans la tristesse, mais votre tristesse tournera en joie » (Jean 16, 20). C’est ce qui va se produire. « Paix à vous. » Le Seigneur avait été annoncé par le prophète comme étant le « Prince de la Paix » (Isaïe 9, 5). « Je vous laisse ma paix, je vous donne ma paix ; je ne la donne pas comme le monde la donne » (Jean 14, 27), qui lui vous donne une paix artificielle et instable. « Paix à vous. (lire la suite) Comme le Père m’a envoyé, à mon tour je vous envoie. Ceci dit, il souffla sur eux et leur dit : « Recevez l’Esprit Saint : les péchés de ceux à qui vous les remettrez leur seront remis ; ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez » (Jean 19, 21-23). La paix que le Seigneur apporte découle du pardon reçu dans le sacrement de la réconciliation. C’est la paix qui provient d’un cœur libéré du poids de ses péchés. « Ses nombreux péchés lui sont pardonnés » (Luc 7, 47). « Ta foi t’a sauvée, va en paix » (Luc 7, 50).
La paix et la joie – elles vont de pair – d’avoir bénéficié de la miséricorde divine. La paix et la joie qui comptent, parce que d’origine surnaturelle, fondées sur un sacrement, enracinées dans la Croix. C’est une fois accompli le mystère de la Croix que le Seigneur transmet sa paix.
Jésus ne reproche à ses apôtres que leur incrédulité, non leur trahison. Il leur a déjà pardonné. Il a pardonné sur la Croix : « Père, pardonne-leur, car ils ne savent pas ce qu’ils font » (Luc 23, 34). Cela s’appliquait aussi à eux. En tout premier lieu. Il sait de plus combien ils se sont tous repentis de leurs méfaits. Il se montre miséricordieux envers eux. En même temps, il leur communique le pouvoir d’appliquer cette même miséricorde à tous les hommes, par un canal sacramentel, par le biais du sacrement de la réconciliation, preuve ô combien émouvante de l’Amour de Dieu pour chaque homme. « Les péchés de ceux à qui vous les remettrez leur seront remis ; ils seront retenus à ceux à qui vous les retiendrez » (Jean 19, 21-23). Le deuxième dimanche de Pâques, qui nous propose la lecture de ce passage de l’Evangile selon saint Jean, a été pour cela institué par le bienheureux Jean-Paul II en « dimanche de la miséricorde », pour bien mettre sous nos yeux la bonté infinie de notre Dieu et stimuler notre confiance aimante en lui.

(à suivre…)

vendredi 14 octobre 2011

Apparition à Thomas (5)


Apparition à Thomas (5)

Alors Jésus, qui connaît bien son Thomas et qui l’aime évidemment beaucoup, Jésus qui le veut comme évangélisateur précisément « jusqu’aux extrémités de la terre » (Actes 1, 8), Jésus fait quelque chose d’inouï, d’absolument unique. « Huit jours plus tard, ses disciples étaient de nouveau dans la maison et avec eux Thomas » (Jean 20, 26). Manifestement, dans l’intervalle ils sont sortis. Ils n’ont plus peur. Saint Jean précise bien que l’apôtre incrédule et récalcitrant est présent. Une semaine s’est écoulée, au cours de laquelle Jésus ne s’est pas manifesté. Ce qui a dû renforcer Thomas dans sa conviction que les autres affabulaient et avaient voulu se moquer de lui de méchante manière. (lire la suite)
« Jésus arrive, toutes portes closes, se place au milieu d’eux et dit : « Paix à vous ! » (Jean 20, 26). La même salutation que la semaine précédente. Le même souhait. Jésus veut avant tout pacifier les cœurs. Sa présence apaise. C’est le sentiment que Pierre, Jacques et Jean ont éprouvé sur le mont Thabor et que Simon a exprimé en disant : « Comme il est bon pour nous d’être ici ! » (Luc 9, 33), comme nous sommes heureux avec toi, Seigneur. C’est un sentiment semblable qui s’est emparé du cœur des disciples d’Emmaüs : « Notre cœur n’était-il pas tout brûlant au-dedans de nous, tandis qu’il nous parlait en chemin, et nous expliquait les Ecritures ? » (Luc 24, 32). C’est l’expérience universelle de la proximité de Dieu. Car Dieu seul peur assouvir notre soif de bonheur.
« Paix à vous ! Puis il dit à Thomas : « Avance ton doigt ici et regarde mes mains, avance ta main et mets-la dans mon côté, et ne te montre plus incrédule, mais croyant » (Jean 20, 26-27). Thomas est tout penaud et rougit d’une oreille à l’autre. A-t-il mis effectivement sa main dans la plaie du Seigneur ? Les artistes ont souvent représenté la scène, qui est évidemment suggestive. On les comprend. Mais certains estiment que cela n’a pas été nécessaire. Thomas s’est rendu à l’évidence. La voix était bien celle de Jésus. Cette voix qui avait bouleversé Marie-Madeleine, au matin de Pâques, alors qu’elle croyait avoir affaire au jardinier : « Jésus lui doit : « Myriam ! » Se retournant, elle lui dit en hébreu : Rabbouni ! » (Jean 20, 16).
Et puis les traces de la Passion sont évidentes. Elles sont éloquentes par elles-mêmes. Point n’est besoin de vérification. Toute résistance de la part de Thomas est vaincue d’un seul coup, à la grande joie des dix autres qui assistent à la scène avec admiration mais aussi une certaine curiosité.

(à suivre…)

Apparition à Thomas (1)


Apparition à Thomas (1)

Le Seigneur est mort et mis dans le sépulcre. Les apôtres sont atterrés, tétanisés. Jean a pu leur faire un récit circonstancié des conditions dans lesquelles Jésus a été crucifié au Golgotha et de ses derniers moments, auxquels il a assisté en compagnie de Marie et de quelques saintes femmes (cf. Jn 19, 25-27). Les apôtres se sont réunis au Cénacle et y restent « enfermés par peur des Juifs » (Matthieu 26, 69). Ils craignent de se montrer en public (cf. Jean 20, 19). On ne sait jamais, ils pourraient être reconnus. Une servante n’a-t-elle pas dit de Pierre, dans la cour du grand prêtre : « Celui-là aussi était avec lui » (Luc 22, 56) ? Et un autre, « parent de celui à qui Pierre avait coupé l’oreille », ne lui a-t-il pas demandé : « Ne t’ai-je pas vu avec lui dans le jardin ? » (Jean18, 26). Et d’autres encore, n’ont-ils pas relevé son accent galiléen : (lire la suite) « Pour sûr que tu es, toi aussi ! Et d’ailleurs ton parler te fait reconnaître » (Matthieu 26, 73) ? Il ne fait pas bon sortir. Mieux vaut se faire oublier pendant quelques jours au moins.
Certes, « des femmes qui sont des nôtres nous ont jeté dans la stupeur : étant allées de grand matin au tombeau, elles sont revenues, disant avoir même vu une apparition d’anges, au dire desquels il est vivant » (Luc 24, 22-23). Mais lui, Pierre et Jean qui se sont rendus sur place « ne l’ont pas vu » (Luc 24, 24). Et cela n’a pas entamé leur résolution. Leur foi est encore faible. Ils en sont conscients d’ailleurs, puisqu’ils ont demandé un jour au Seigneur : « Seigneur, augmente notre foi ! » (Luc 17, 15). Ils en auraient bien besoin maintenant. Toute épreuve risque de nous faire douter de Dieu. C’est l’heure de nous appuyer davantage sur la foi. Car le Seigneur ne nous abandonne pas. Les événements du jour de la Résurrection le montrent bien.
En effet, « Jésus est apparu à Simon » (Luc 24, 34). A quel moment de la journée ? Nous ne le savons pas. Mais il s’est manifesté en premier à lui : « Moi, j'ai prié pour toi, afin que ta foi ne défaille point; et toi, quand tu seras revenu, affermis tes frères » (Luc 22, 32). Puis il est allé récupérer les deux disciples d’Emmaüs et leur proposer un nouveau départ dans la foi et la mission évangélisatrice (cf. Luc 24, 13-32). Tard dans la soirée, alors que ceux-ci ont eu le temps de regagner Jérusalem et sont en train de raconter comment ils l’ont reconnu à la fraction du pain (cf. Luc 24, 35), voici que Jésus-Christ en personne se tient soudain au milieu d’eux et leur dit : « Paix à vous » (Jean 20, 19).

(à suivre…)

jeudi 13 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (6)


La guérison du fils de l’officier royal (6)

Paul et Silas agiront de même quand, délivrés miraculeusement des liens qui les tenaient enchaînés en prison à Philippe, ils « annoncèrent la Parole de Dieu » à leur gardien, « ainsi qu’à toux ceux qui étaient dans sa maison » (Actes 16, 33). Lequel geôlier « les fit ensuite monter chez lui, leur servir à manger et se réjouit avec sa famille d’avoir cru en Dieu » (Actes 16, 34).
Ce fut encore le cas à Corinthe. Mais il n’y a pas lieu de penser que les cas qui nous sont rapportés sont isolés. Il dut y en avoir beaucoup d’autres. Donc, à Corinthe aussi le même phénomène se reproduit : « Crispus, chef de synagogue, crut au Seigneur avec tous les siens » (Actes 18, 8). Et à Philippe, « une femme du nom de Lydie, marchande de pourpre de la ville de Thyatire, prosélyte (…), quand elle eût été baptisée, ainsi que ses gens » (Actes 16, 14-15), oblige Paul et Barnabé à demeurer chez elle.
Certes, de nos jours la conversion est un processus individuel et non collectif. Mais dans ces premiers temps où l’Église commençait à exister et devait remplir le monde jusqu’aux extrémités de la terre (cf. Actes 1, 8), l’Esprit Saint intervenait très directement pour que cette expansion se ne se fit pas au compte-goutte, mais fût rapide. C’est pourquoi l’auteur sacré souligne fréquemment que des groupes d’hommes et de femmes sont remplis de l’Esprit qui les prépare à accueillir ensuite la Vérité qu’est le Christ Seigneur (cf. Jean 14, 6). Ce sont à chaque fois de nouvelles Pentecôtes à taille réduite.
Oui, la conversion est personnelle. Mais la foi du centurion, tout comme la prédication et l’exemple des apôtres et des autres chrétiens, sont les vecteurs dont l’Esprit se sert pour retourner les âmes, c’est-à-dire pour les réorienter vers leur Créateur et leur faire retrouver, récupérer, le sens profond de leur existence.

(fin)

mercredi 12 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (5)


La guérison du fils de l’officier royal (5)

Toute la maison de l’officier embrasse la foi : sa femme, ses enfants, au premier chef celui qui a bénéficié de la faveur divine, ses serviteurs… C’est ce qui se produit souvent dans les temps du christianisme naissant. La découverte de la foi, qui est une rencontre avec le Dieu Sauveur, bouleverse, a l’effet d’un torrent qui balaye tout raisonnement rationaliste, et qui renvoie en même temps les idoles à leur insignifiance. Elles apparaissent soudain dérisoires, inutiles, impuissantes à venir en aide à l’homme. Alors que le Dieu d’Amour (cf. 1 Jean 4, 16), c’est toute autre chose. C’est un Dieu personnel, qui aime chaque homme tel qu’il est.
Ce Jésus, lui, « il parle avec autorité » (cf. Luc 4, 36). Avec lui, « les aveugles voient, les boiteux marchent, les lépreux sont guéris, les sourds entendent, les morts ressuscitent, les pauvres sont évangélisés » (Luc 7, 22). Il fait ce qu’aucun dieu grec ou romain n’a jamais fait. Et il paraît même qu’il pardonne les péchés ! « Pour que vous sachiez que le Fils de l’homme a, sur terre, le pouvoir de remettre les péchés : lève-toi, dit-il alors au paralytique, prends ton lit et va-t’en chez toi. Il se dressa et s’en alla chez lui » (Matthieu 9, 6-7). C’est fort. C’est fort et très réconfortant. Parce qu’un Dieu – il ne fait pas de doute qu’il est l’envoyé de Dieu (cf. Jean 3, 2) – qui pardonne, c’est ce dont nous avons besoin, nous les pécheurs que nous sommes. Un Dieu qui pardonne , c’est un Dieu qui mérite d’être aimé par-dessus tout (cf. Matthieu 22, 37). C’est un Dieu en qui nous pouvons mettre toute notre confiance, sans courir le risque d’être déçus, et de nous retrouver face à ces statues de bois ou de pierre qui « ont une bouche, et ne parlent point; elles ont des yeux, et ne voient point. Elles ont des oreilles, et n'entendent point ; elles ont des narines, et ne sentent point. Elles ont des mains, et ne touchent point ; elles ont des pieds, et ne marchent point ; de leur gosier elles ne font entendre aucun son » (Psaume 115, 5-7). Un Dieu qui pousse son amour jusqu’à nous pardonner nos péchés, c’est un Dieu à qui nous pouvons nous attacher à jamais, et que nous pouvons suivre partout où il ira (cf. Matthieu 8, 19).
Devant l’évidence du miracle, qui échappe totalement au mince pouvoir de la médecine, l’officier croit et avec lui tous les siens. C’est ce qui se passera aussi chez le centurion Corneille, lorsque Pierre lui aura apporté la Bonne nouvelle et que, tandis qu’il parlait, « l’Esprit Saint descendit sur tous les auditeurs » (Actes 10, 44) et, au terme de cette instruction, ils se firent tous « baptiser au nom de Jésus-Christ » (Actes 10, 48).

(à suivre…)

mardi 11 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (4)


La guérison du fils de l’officier royal (4)

L’officier, qui est un homme profond et d’une bonne trempe, n’hésite pas, ne doute pas une seconde que ce que Jésus lui dit peut s’accomplir, que ce n’est pas une parole en l’air. « L’homme eut foi en parole que Jésus lui avait dite, et il se mit en route » (Jean 4, 50). Il retourne chez lui, convaincu que son fils est guéri, le cœur en fête. Il se hâte d’aller le retrouver et l’embrasser et fêter sa guérison. Il a un bon chemin à parcourir.
Avant de partir de chez lui pour Cana, il avait laissé des instructions à ses serviteurs pour qu’on le tienne informé de l’évolution de la situation sanitaire de son rejeton. « Alors qu’il était déjà sur la descente, ses serviteurs vinrent à sa rencontre et ils lui dirent que son fils était vivant » (Jean 4, 51). Ils ont dû se rencontrer à peu près à mi-chemin, car l’un et les autres se sont mis en route au même moment, celui où Jésus a affirmé sur un ton convaincant : « Ton fils vit. »
Les serviteurs n’ont pas pris la route simplement pour dire à leur maître que son fils était vivant. Cela ne suffirait pas, puisqu’il était censé venir accompagné du prophète de Nazareth. S’ils sont sortis à sa rencontre, c’est parce que le jeune homme s’est trouvé soudainement guéri, totalement rétabli. « Il s’enquit alors auprès d’eux de l’heure à laquelle le mieux était survenu » (Jean 4, 52). Il a foi, certes, mais il ne semble pas encore envisager une guérison complète…
Il faut alors que ses hommes lui disent : « C’est hier, à la septième heure, que la fièvre l’a quitté » (Jean 4, 52). Donc, ce n’est pas qu’il se sente mieux et soit tiré d’affaire, c’est-à-dire hors du danger qui le menaçait. Non, il est carrément guéri. La fièvre l’a quitté, à la septième heure, enfin de journée.
« Sur quoi, le père reconnut que c’était à cette heure-là que Jésus lui avait dit : « Ton fils vit », et il crut » (Jean 4 ; 53). Il a cru, comme la Cananéenne pour laquelle le Seigneur n’a pas daigné non plus se rendre chez elle pour chasser le démon qui possédait sa fille. Elle aussi a cru à la Parole de Dieu. La foi suffit pour que cette Parole devienne efficace (cf. Mc 7, 29-30) et, au besoin, déplace les montagnes (cf. Matthieu 21, 21).
Il est conforté dans la foi. Il n’a pas douté. C’est pourquoi le Seigneur l’a exaucé, apparemment au-delà de ce qu’il escomptait : non seulement l’amélioration de l’état de santé de son fils, pour qu’il ne meure pas, mais sa complète guérison. « Il crut, lui et sa maison tout entière » (Jean 4, 53), après qu’il leur a expliqué son entretien avec Jésus et qu’ils ont tous pu faire le lien entre l’annonce du rabbi de Nazareth et ce qui s’est passé exactement. « Le salut est arrivé aujourd’hui pour cette maison » (Luc 18, 19).

(à suivre…)

lundi 10 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (3)


La guérison du fils de l’officier royal (3)

Ayant donc appris la venue de Jésus, le militaire « se rendit vers lui et le pria de descendre pour guérir son fils, car il était à la mort » (Jean 4, 47). Tout à coup, la situation présentée n’est plus banale. Elle revêt un caractère d’urgence. Le fils de l’officier est à l’article de la mort. Aussi son père s’est-il hâté de se rendre à Capharnaüm auprès du Rabbi, avec une grande foi en son pouvoir thaumaturgique.
A cette requête, Jésus apporte une réponse quelque peu dilatoire et agacée, comme s’il ne mesurait pas la gravité de l’instant : « Jésus leur dit : « Si vous ne voyez pas des miracles et des prodiges, vous ne croirez donc pas ! » (Jean 4, 48). C’est qu’on lui en demande, des miracles ! « Quel miracle vas-tu nous montrer pour agir de la sorte ? » (Jean 2, 18). « Quel miracle feras-tu pour que nous le voyions et que nous croyions en toi ? » (Jean 6, 30). « Les Juifs réclamaient des miracles » (1 Corinthiens 1, 22)… Et Jésus est lassé de ce manège sans fin. C’est pourquoi il pourra dire à l’apôtre Thomas : « Tu crois parce que tu m’as vu ! Heureux ceux qui croiront sans avoir vu ! » (Jean 20, 29).
L’officier ne se laisse pas freiner par ce genre de remarque, précisément parce qu’il a foi en Jésus, en son pouvoir de guérir ce fils auquel il tient logiquement tant. Il lui répond donc : « Seigneur, descend avant que ne meure mon enfant » (Jean 4, 49). Le temps presse. Il est sur le point de rendre l’âme. C’est un sentiment paternel bien compréhensible qui le pousse à insister auprès du Seigneur pour qu’il intervienne sans délai. Il a foi dans le pouvoir de Jésus-Christ de guérir les malades. Mais celle foi ne semble cependant pas aller suffisamment loin, c’est-à-dire jusqu’à croire que si, d’aventure, son fils mourait avant l’arrivée du Maître, celui-ci pourrait le faire revenir à la vie. Croire à cette possibilité requiert évidemment une foi consistante.
Mais enfin, cet homme va démontrer qu’il croit en Jésus et en sa parole. En effet, « va, lui dit Jésus, ton fils vit » (Jean 4, 50). En un certain sens, le Seigneur n’accède pas à sa demande, puisqu’il ne prend pas la peine de se mettre en route et de se déplacer chez lui, ce qu’il fait pourtant dans d’autres circonstances, par exemple quand Jaïre, chez de la synagogue, l’a supplié pour une fillette de douze ans, son unique enfant, elle aussi à l’agonie (cf. Luc 8, 40-42.54-56). Mais en même temps, en disant à l’officier royal « ton fils vit ! », il met davantage sa foi à l’épreuve que s’il se rendait chez lui et priait au chevet de son enfant. Par sa réponse, Jésus veut s’assurer de cette foi et la renforcer.

(à suivre…)

dimanche 9 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (2)


La guérison du fils de l’officier royal (2)

Cette incrédulité, comme tout péché, peut dégénérer, si la rectification n’intervient pas vite. De fait, lorsqu’il prêcha dans la synagogue de Nazareth, les auditeurs, d’abord flattés d’entendre un des leurs « qui a réussi », ne se limitent pas cependant à mettre en doute sa capacité et son droit à prendre la parole et à expliquer la Torah, sous prétexte qu’ils connaissent son origine modeste : « N’est-ce pas là, disaient-ils, le fils de Joseph ? » (Luc 4, 22). Mais, entraînés par leurs mauvaises dispositions, ils finissent par s’irriter et se remplir de fureur dans la synagogue même. Ce qui est un comble : la maison du Seigneur ! La maison de Jésus de Nazareth ! « Ils se levèrent, le poussèrent hors de la ville et le menèrent jusqu’au bord de la colline sur laquelle était bâtie leur ville, afin de l’y précipiter » (Luc 4, 29). Nous ne pouvons pas dire, en effet, qu’il était bien reçu dans sa patrie !
Malgré tout, cette fois-là, « quand il arrive en Galilée, les Galiléens lui firent bon accueil ». Saint Jean en donne la raison : « Ils avaient vu tout ce qu’il avait fait à Jérusalem pendant la fête ; car eux aussi y étaient allés pour la fête » (Jean 4, 45), ce qui montre qu’ils étaient des Juifs observants, prenant leur foi au sérieux.
De fait, « tandis qu’il était à Jérusalem pendant la Pâque, durant la fête, beaucoup crurent en lui en voyant les miracles qu’il accomplissait » « (Jean 2, 23). L’un de ceux qui furent convaincus est Nicodème, qui « vint trouver Jésus de nuit et lui dit : Rabbi, c’est de la part de Dieu, nous le savons, que tu es venu en docteur. Personne, en effet, ne peut faire les miracles que tu fais, si Dieu n’est pas avec lui » (Jean 3, 2). Nicodème a beau être « un notable d’entre les Juifs » (Jean 3, 1), sa haute condition ne l’aveugle pas et, touché par la grâce, il a foi en la divinité de Jésus.
« Or, il y avait à Capharnaüm un officier royal, dont le fils était malade » (Jean 4, 46). La situation décrite est plutôt banale. Elle se reproduit partout, à de nombreux exemples. Mais le cas d’espèce présente une particularité qui nous intéresse beaucoup et nous touche de près. « Ayant appris que Jésus était arrivé de Judée en Galilée… » (Jean 4, 47). La nouvelle se répand rapidement dès que Jésus arrive quelque part. Des messages partent l’annoncer dans toutes les directions, sur tous les chemins, et les gens rappliquent de partout. C’était arrivé à un point que « Jésus ne pouvait plus entrer ostensiblement dans une ville », tellement celle-ci entrait en effervescence, et souvent « il se tenait dehors, en des endroits solitaires. Et on venait vers lui de toutes parts » (Marc 1, 45). Mais, en plein air les risques d’écrasement étaient moindres qu’en ville, dans des ruelles étroites.

(à suivre…)

vendredi 7 octobre 2011

La guérison du fils de l’officier royal (1)


La guérison du fils de l’officier royal (1)

« Après ces deux jours, il partit de là pour la Galilée » (Jean 4, 43). Il s’agit ici des deux journées passées chez les Samaritains du puits de Jacob, dans le village appelé Sychar. Un grand nombre de gens « crurent à cause de ce qu’il leur dit » (Jean 4, 41). Une femme de chez eux les avait invités à rencontrer le Seigneur : « Venez voir un homme qui m’a dit tout ce que j’ai fait. Ne serait-ce pas le Messie ? » (Jean 4, 29). Ses concitoyens ne savent que trop le genre de femme que c’est. Qu’un inconnu connaisse toute son histoire, voilà quelque chose de surprenant, en effet. Ils attendent, eux aussi, tout hérétiques qu’ils soient, la venue du Messie. Et ils sont prêts à interpréter le moindre signe éclatant comme une annonce éventuelle de sa venue. Ces gens qui sont conquis par l’enseignement de Jésus disent alors à la femme : « Ce n’est plus à cause de tes dires que nous croyons, car nous l’avons entendu nous-mêmes, et nous savons qu’il est vraiment le Sauveur du monde » (Jean 4, 42). Eux au moins, ils se laissent facilement convaincre. Ah ! si tout le monde pouvait réagir comme eux, avec une telle simplicité, avec autant de foi !
C’est sidérant tout de même ! Voilà des gens qui ont écouté le Seigneur pendant deux jours seulement, qui n’ont assisté à aucun de ses miracles, et pourtant ils sont convaincus d’avoir affaire au Messie, d’être en présence du Sauveur annoncé et promis ! Grande est leur droiture de cœur. Grande est leur foi. A plus d’une reprise, le Seigneur proclamera : « Je n’ai pas trouvé une telle foi en Israël » (cf. Luc 7, 9). Il pourrait formuler cette constatation à leur propos. Car leur foi est vraiment admirable. Leur réaction positive et surnaturelle ne fait que souligner davantage l’incrédulité de tous ceux qui, au long des mois, vont entendre le Seigneur et être témoins de ses nombreux miracles, certains particulièrement spectaculaires, comme celui de la multiplication des pains et des poissons qui ne va pas tarder à se produire –cf. Jean 6, 1-15), et qui refuseront cependant de reconnaître le Christ et voudront même le lapider quand il fera comprendre qu’il est vraiment l’envoyé de Dieu (cf. Jean 10, 31).
Jésus arrive du Jourdain, où il baptisait ainsi que Jean (cf. Jean 3, 22-23). Il se rend en Galilée. Pour cela, « il lui fallait traverser la Samarie » (Jean 4, 4). C’est chose faite maintenant. « Or, Jésus lui-même avait attesté qu’un prophète est mésestimé en son propre pays » (Jean 4, 44), et même « dans sa maison » (Matthieu 13, 57), raison pour laquelle, se trouvant à Nazareth, où il avait grandi et travaillé, « il ne put faire là aucun miracle, sauf qu’il guérit quelques malades en leur imposant les mains » (Marc 6, 5). « Il ne put. » Il pouvait en faire, bien sûr, puisqu’il est Tout-Puissant. Mais il pose habituellement comme préalable à tout miracle, un acte explicite de foi. Et là, il n’en trouve pas, c’est le moins que l’on puisse dire. C’est tellement flagrant et fort, inattendu, que lui-même « fut surpris de leur manque de foi » (Marc 6, 6).

(à suivre…)

lundi 3 octobre 2011

Arrêts sur christianisme (72)


Arrêts sur christianisme (72)

« L’économie chrétienne, du fait qu’elle est l’Alliance nouvelle et définitive, ne passera jamais et aucune nouvelle révélation publique ne doit plus être attendue avant la glorieuse manifestation de notre Seigneur Jésus-Christ (cf. 1 Timothée 6, 14 et Tite 2, 13) » (concile Vatican II, Const. dogm. Sur la Révélation divine Dei Verbum, n. 4). En effet, comme l’ont rappelé les Pères durant le Synode, « la spécificité du Christianisme se manifeste dans l’événement Jésus-Christ, sommet de la Révélation, accomplissement des promesses de Dieu et médiateur de la rencontre entre l’homme et Dieu. Lui « qui nous a révélé Dieu » (cf. Jean 1, 18) est la Parole unique et définitive donnée à l’humanité ». Saint Jean de la Croix a exprimé cette vérité de façon admirable : « Dès lors qu’il nous a donné son Fils, qui est sa Parole – unique et définitive –, il nous a tout dit à la fois et d’un seul coup en cette seule Parole et il n’a rien de plus à dire. […] Car ce qu’il disait par parties aux prophètes, il l’a dit tout entier dans son Fils, en nous donnant ce tout qu’est son Fils. Voilà pourquoi celui qui voudrait maintenant interroger le Seigneur et lui demander des visions ou révélations, non seulement ferait une folie, mais il ferait injure à Dieu, en ne jetant pas les yeux uniquement sur le Christ et en cherchant autre chose ou quelque nouveauté » (Montée du Carmel 2, 22).

Benoît XVI, exhortation apostolique Verbum Domini, n° 14.

samedi 1 octobre 2011

Arrêts sur christianisme (71)


Arrêts sur christianisme (70)

Dans l’histoire, les règlements juridiques ont presque toujours été motivés de façon religieuse: sur la base d’une référence à la divinité on décide ce qui parmi les hommes est juste. Contrairement aux autres grandes religions, le christianisme n’a jamais imposé à l’État et à la société un droit révélé, ni un règlement juridique découlant d’une révélation. Il a au contraire renvoyé à la nature et à la raison comme vraies sources du droit – il a renvoyé à l’harmonie entre raison objective et subjective, une harmonie qui toutefois suppose le fait d’être toutes deux les sphères fondées dans la Raison créatrice de Dieu. Avec cela les théologiens chrétiens se sont associés à un mouvement philosophique et juridique qui s’était formé depuis le IIème siècle av. JC. Dans la première moitié du deuxième siècle préchrétien, il y eut une rencontre entre le droit naturel social développé par les philosophes stoïciens et des maîtres influents du droit romain [3]. Dans ce contact est née la culture juridique occidentale, qui a été et est encore d’une importance déterminante pour la culture juridique de l’humanité. De ce lien préchrétien entre droit et philosophie part le chemin qui conduit, à travers le Moyen-âge chrétien, au développement juridique des Lumières jusqu’à la Déclaration des Droits de l’homme.

Benoît XVI, Discours au Bundestag, 22 septembre 2011.