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mardi 9 novembre 2021

Discours de réception à l'Académie Delphinale le 8 novembre 2021 - Dominique Le Tourneau

Monsieur le Président

Monsieur le vice-président

Madame la Secrétaire perpétuelle

Mesdames et Messieurs les Académiciens

Chers amis,

Mesdames et Messieurs,

 

« L’on s’accorde à considérer les Académies comme les Sénats de la république des lettres. Ce n’est peut-être pas assez dire ; car les hommes qui font ou qui méritent de faire partie des Sociétés savantes sont en définitive les inventeurs ou les propagateurs des idées qui dirigent tous les actes considérables de l’humanité[1]. » Ainsi s’exprimait notre Confrère de Boissieu en exorde à son discours de réception dans notre Académie, lors de la séance du 10 janvier 1868. Un autre de nos Confrères, Paul Golétty, livrait ses sentiments, dans une circonstance identique, le 19 mai 1876 : « On raconte qu’un jour l’empereur Claude, en errant dans son palais, entendit un grand bruit. Il en demanda la cause ; on lui répondit que Noniatus faisait une lecture publique : Claude vint aussitôt surprendre l’assemblée. Je ne suis pas Claude, et je m’en console ; mais j’ai été attiré, moi aussi, par le bruit si flatteur qui se faisait autour de votre Académie : je me suis approché, d’aimables patrons m’ont ouvert la porte, et c’est ainsi que, lettré sans le savoir, j’ai conquis mon droit de cité parmi vous[2]. »

 Je n’oserais enfiler leurs chausses, trop grandes pour moi. Mais je fais mien leur état d’esprit. Reçu dans cette fière Assemblée, je mesure l’honneur que vous me faites, Mesdames et Messieurs les Académiciens. Je me réjouis de poursuivre, modestement, une sorte d’habitude familiale, puisque figurent parmi mes ancêtres un membre de l’Académie Française, 5 membres de l’Académie des sciences, 2 membres de l’Académie de médecine, un membre de l’Académie des sciences morales et politiques, et deux membres de l’Académie des Beaux-Arts.


[1] Boissieu (M. de), « Éloge de M. J. Mallein. Discours de réception à l’Académie Delphinale », Bulletin de l’Académie Delphinale, 3e série, tome 4e, Grenoble, 1869,

[2] Golléty, P., « Les lectures publiques à Rome. Discours de réception à l’Académie Delphinale », Bulletin de l’Académie Delphinale, 3e série, tome 12e, Grenoble, 1877.. (lire la suite)

Ceci dit, en écoutant des mois derniers l’éloge des Académiciens récemment remplacés et le curriculum vitae de leurs successeurs, je me sens petit, et j’ai presque envie de vous demander de bien vouloir m’excuser d’entre dans une si illustre compagnie, vieille déjà de presque 250 ans.

Ce sentiment, l’évocation de mon prédécesseur, Aimé Bocquet, ne peut que l’aviver. Le monde auquel il nous fait accéder m’était, jusqu’ici, plutôt étranger. Je me suis demandé si, malgré tout, nous pouvions nous retrouver ne serait-ce que sur un point.

Vous savez que Georges Cuvier est considéré comme le fondateur du premier paradigme dans la discipline de la paléontologie. Or, il se trouve que Cuvier a lu à la séance publique de l’Institut, le 15 nivôse an X, soit le 5 janvier 1802, de mon ancêtre Jean d’Arcet, dont je descends en ligne directe à la 6e génération, créateur de l’art de la porcelaine dure, inventeur de la soude artificielle et de « l’alliage d’Arcet » qui contribua au développement de la typographie et révolutionna donc l’imprimerie.

Le lien est ténu, certes, et lointain. Mais le temps ne compte pas pour notre sujet. D’ailleurs la perception du temps n’est pas la même pour chacun de nous. Nous ne ressentons pas le passage du temps de la même manière selon les circonstances. Le romancer Marc Lévy nous le fait comprendre de façon saisissante :

« Tu veux comprendre ce qu'est une année de vie : pose la question à un étudiant qui vient de rater son examen de fin d'année. Un mois de vie : parles-en à une mère qui vient de mettre au monde un enfant prématuré et qui attend qu'il sorte de sa couveuse pour serrer son bébé dans ses bras, sain et sauf. Une semaine : interroge un homme qui travaille dans une usine ou dans une mine pour nourrir sa famille. Un jour : demande à deux amoureux transis qui attendent de se retrouver. Une heure : questionne un claustrophobe, coincé dans un ascenseur en panne. Une seconde : regarde l'expression d'un homme qui vient d'échapper à un accident de voiture, et un millième de seconde : demande à l'athlète qui vient de gagner la médaille d'argent aux jeux Olympiques, et non la médaille d'or pour laquelle il s'était entraîné toute la vie.[1] »

Vous m’avez élu, chers Consœurs et Confrères, au fauteuil numéro 50. Un fauteuil de création récente, puisqu’il fut occupé pour la première fois par Camille Teisseire Hyacinthe, ancien député, qui mourut en 1842. Conseiller référendaire au Parlement de Dauphiné, liquoriste, il fut agent national de la Convention, sous-préfet, puis député et Président du tribunal de commerce et directeur de l'hôpital de Grenoble.

Le fauteuil revint ensuite, de 1842 à 1878, à un avocat, Piat-Longchamp-Dupré, dont je n’ai pu trouver de références précises.

Lui succéda Joseph Accarias, conseiller à la Cour d’appel, dont le discours de réception présentait « Une famille parlementaire du Dauphiné : les Chalvet »[2]. Il y resta de 1878 à 1898.

Maître Edouard Silvy, avocat et greffier en chef du Tribunal de commerce prononce son discours de réception le 9 mars 1900 sur « Grenoble et la Saint-Barthélemy »[3], et reste membre de notre Académie 45 ans durant.

Lui succède le comte Yves du Parc-Locmaria, président des bibliophiles dauphinois, son discours de réception tourne « Autour de Françoise Mionot »[4].

Il siègera jusqu’en 1968, avant d’être remplacé par mon prédécesseur, Aimé Bocquet, qui l’occupera de 1970 à 2017, soit 47 ans !

Votre mari, Madame, aimait à dire : « Quand on a la bonté, on a toutes les qualités. » Nous avons son portrait sous les yeux. Comment ne pas reconnaître au premier coup d’œil qu’il respire précisément de bonté ? « Loin de nous les héros sans humanité, disait Bossuet. Ils pourront bien forcer le respect et ravir l’admiration ; mais ils n’auront pas les cœurs. Lorsque Dieu forma le cœur et les entrailles des hommes, il y mit premièrement la bonté[5]. » Nous l’avons donc devant nous, la vraie bonté, « … non point de cette odieuse bonté qui n’est que faiblesse, selon Péguy, (…) ramollissement (…) retombée de déliquescence. De cette bonté juste, fille de justice, fille de justesse, de cette bonté ferme, fille de juste fermeté. La seule réellement bonne (…). Rien que du robuste (…). Ni cette odieuse faiblesse, qui ferait haïr la bonté même. Ni cette odieuse dureté, qui ferait haïr la fermeté même »[6].


Cette bonté, Aimé Bocquet l’exerçait d’abord avec ses patients. Car, s’il est connu pour ses découvertes et ses travaux de paléontologue, Aimé Bocquet était avant tout un chirurgien-dentiste, profession qu’il n’a cessé d’exercer. Et qui correspond à une tradition familiale, si je puis m’exprimer ainsi. Il a succédé, en effet, à son père ; un de ses frères et un de ses neveux sont eux aussi chirurgiens-dentistes.

La paléontologie n’était toutefois pas l’essentiel pour Aimé Bocquet. Sa passion première, sa vocation originaire restait l’odontologie, métier qu’il a pratiqué quarante ans avec passion, toujours soucieux des intérêts médicaux et pécuniaires de ses patients. Cédant en 1994 son cabinet à un jeune confrère, l’expression « vendre sa clientèle » lui faisait horreur, il aurait exprimé sa crainte qu’il n’aime pas ses patients autant que lui. Relevons aussi que notre regretté Confrère est venu à la paléontologie par le biais de la spéléologie. Cette pratique l’a amené à vouloir aller plus loin, à en savoir plus sur nos origines. S’il est resté un amateur, la simple énumération de ses titres et des fonctions occupées n’en est pas moins impressionnante. Je me limiterai aux principaux d’entre eux :

De 1979 à 1985, Aimé Bocquet est membre du Conseil supérieur de la recherche archéologique, et directeur des antiquités au ministère de la Culture de 1980 à 1992 ; de 1972 à 2005, il dirige les fouilles néolithiques et les études sur le lac de Charavines ; en 1980, il crée, et dirige de 1980 à 1993, le centre national de recherches archéologiques subaquatiques dont la vocation est la recherche dans les eaux intérieures en France, jumeau du Département des recherches archéologies sous-marines pour la mer ; responsable de la section Préhistoire de l’Institut de Géologie de Grenoble de 1968 à 1990 ; membre de la commission de Préhistoire du Comité des travaux historiques et scientifiques du ministère de l’Éducation nationale de 1985 à 2001 ; fondateur et président du Centre de documentation de la préhistoire alpine de 1958 à 2005 ; chargé de mission au Muse savoisien de Chambéry de 1971 à 1989 ; chargé de cours à l’U.E.R. d’Art et d’Histoire de l’Université de Grenoble entre 1972 et 1982 ; chargé de cours d’Histoire de l’Université de Savoie de 1990 à 1995.

De 1958 à 1986, il procède à des fouilles sur plusieurs sites préhistoriques alpins ; et de 1958 à 1999 il est réalisateur et commissaire de nombreuses expositions de préhistoire en France et à l’étranger.

Ajoutons que sa thèse sur L’Isère pré et protohistorique a permis de rassembler des fonds archéologiques dispersés qui ont été regroupés au Musée dauphinois.

L’on apprécie chez Aimé Bocquet ce que j’appellerai « l’esprit pionnier ». Il est manifeste quand il explique la méthode suivie dans ses divers travaux. Cette qualité est sans conteste le signe d’un véritable savant.

Nous devons à mon illustre prédécesseur une archéologie moderne, conduite en comptant sur le bénévolat, mais innovant dans bien des domaines, comme celui de la dendrochronologie qui permet de dater la première implantation humaine à Charavines exactement en l’an 2268 avant Jésus-Christ.


Aimé Bocquet a publié trois ouvrages : Hannibal chez les Allobroges ; Les Oubliés du lac de Paladru, préfacé par le professeur Yves Coppens du Collège de France ; L’histoire de Balazuc, un village de l’Ardèche.

Faute de temps, nous irons à l’essentiel, c'est-à-dire à ce qui a mobilisé Aimé Bocquet l’été pas moins de trente années durant : Les Oubliés du lac de Paladru.


Je en vous apprendrai rien en disant que le lac de Paladru occupe une dépression d’origine glacière dans les collines du Bas-Dauphiné. Au Moyen Âge, peu avant l’an mil, plusieurs collectivités se sont installées sur ses rives.

Sur les plages de Charavines se trouve le village néolithique des Baigneurs, noyé sous quelques mètres d’eau à une centaine de mètres du rivage actuel.

La grande sécheresse de l’hiver 1971-1972 a eu du bon pour notre propos. En effet, elle fit émerger de la vase six cents pieux. Il fut alors possible d’entreprendre leur topographie précise. Les premiers sondages permirent d’acquérir une conviction fondamentale : le village était pratiquement enfoui depuis son immersion. L’on était donc en présence d’un habitat néolithique parfaitement conservé.


C’est alors qu’André Bocquet entreprit des fouilles subaquatiques. Elles nécessitèrent la mise au point de techniques nouvelles. Aimé Bocquet sut les développer avec succès.

L’humidité permanente indique que les hommes habitaient très près de l’eau et qu’elle était entretenue par la capillarité du sol de craie lacustre toujours gorgée d’eau. À la fouille, cette couche de fumier, très légère, peu compacte, pouvait aisément être « enlevée à la main et sans instrument, ce qui permit de récupérer les vestiges très fragiles comme les textiles ou le bois […]. C’est ce qui fait l’énorme intérêt de la fouille subaquatique. » Et la richesse exceptionnelle du site de Charavines.


Certes l’on ne procède plus de nos jours comme du temps où Aimé Bocquet s’est lancé dans l’aventure de Charavines. Tout est désormais soumis à des normes, des autorisations. L’époque d’Aimé Bocquet a été comme une époque d’or, à laquelle il a imprimée une marque personnelle. Et celle-ci influence durablement sa spécialité.

Mon prédécesseur à notre Académie, aimait partager ses convictions. Témoin le geste munificent consistant à joindre à son ouvrage sur Charavines un DVD contenant 19 volumes, 2800 planches de dessins, des centaines de photos, histogrammes, plans, coupes, et l’inventaire de 10 000 pièces.

 

Nous présentons maintenant « Une relique insigne de la Passion présente à Vienne : la Sainte Nappe sur laquelle le Christ aurait célébré l’Eucharistie ».

 

Il n’existe pas à notre connaissance d’étude systématique de cette relique. La présentation la plus développée se trouve dans l’ouvrage de Le Lièvre, Histoire de l’Antiquité et de la Saincteté de la Cité de Vienne[7]. Les auteurs suivants se contenteront la plupart du temps de le reproduire plus ou moins en détail, sans guère apporter de précision, moins encore d’éléments nouveaux. Malgré le recours au conditionnel, l’intitulé de cette communication peut faire sourire, et pas seulement les voltairiens. Les historiens hausseraient sans doute les épaules, car, en matière de reliques, la plus grande circonspection s’impose, faute de preuves suffisamment solides. Et depuis les heures sombres de la Révolution, notre relique, gardée dans la sacristie de la cathédrale Saint-Maurice, n’en sort pratiquement plus.

            Nous avons été conduits à effectuer des recherches plus approfondies sur la provenance de la Sainte Nappe et ses emplacements successifs, la nature de son reliquaire et le culte dont elle a fait l’objet. Nous pensons avoir établi l’état de la question, sans pouvoir clarifier toutes les zones d’ombre existantes, une certitude sur ce genre d’objet étant exclue par avance. Nous retracerons d’abord un bref historique de l’Église de Vienne (I), avant de présenter l’histoire de la Sainte Nappe du Moyen Âge à nos jours (II) puis, dans une dernière partie, le culte qui lui est rendu (III).

 

I – Bref historique de l’Église de Vienne

 

Pour essayer de cerner autant que faire se peut l’origine de la Sainte Nappe, il convient de commencer par évoquer la fondation de l’Église de Vienne et donc de parler d’abord des premiers évêques de Vienne (A) puis de son église cathédrale (B).

 

A) Les premiers évêques de Vienne

 

            Une difficulté se présente d’emblée à propos des premiers évêques présumés de Vienne.

Le Martyrologe lyonnais rédigé par Adon en 850 fait remonter l’origine de l’Église de Vienne à saint Crescent, disciple de saint Paul, arrivé en 63, auquel ont succédé saint Zacharie, disciple de saint Pierre, arrivé en 68, puis saint Martin[8]. Pour l’historien viennois Nicolas Chorier, « l’Église de Vienne reconnoit pour ses premiers Éuêques Crescent, Zacharie et Martin »[9].

            Cette question reste débattue entre spécialistes. Bornons-nous aux éléments-clés du dossier. Saint Paul envoie Crescent in Galatiam, selon la deuxième épître à Timothée 4, 8. Nombre d’historiens grecs et latins nous apprennent que par Galatiam il faut entendre la Galatie occidentale, autrement dit la Gaule. Certains historiens récents le nient cependant.

            Ils refusent également d’admettre la venue de saint Paul dans la région de Vienne tout comme l’authenticité de l’apostolat de saint Zacharie, qui aurait succédé à saint Crescent, et serait mort martyr en 106. Il aurait reçu du Prince des apôtres le Saint Mantil, l’emportant avec lui à Vienne. Tel est l’enjeu. Ce qui est en cause, n’est autre que la reconnaissance d’une apostolicité exceptionnelle du diocèse de Vienne : il aurait ainsi été fondée par un disciple de saint Paul et un disciple de saint Pierre, les deux colonnes de l’Église universelle.

Je renvoie à mon étude sur l’« origine apostolique du diocèse de Vienne. Une question débattue », paru en septembre dernier dans La Lettre des Académies des Sciences, Lettres et Arts[10].

            Après cette évocation volontairement circonscrite, venons-en au sanctuaire abritant de nos jours la relique insigne, objet de la présente étude.

 

B) La cathédrale de Vienne

 


            L’histoire proprement dite de la Nappe requiert d’indiquer en quelques mots l’évolution subie par la cathédrale de Vienne. Une première cathédrale, « dès qu’elle a eu un nom propre, était sous le vocable des Sept Frères Machabées »[11]. Elle passe au titre de Saint Maurice et de la Légion Thébaine au début du VIIIe siècle. Le culte de saint Maurice et des martyrs thébains avait probablement été introduit à Vienne par saint Avit. Une nouvelle cathédrale voit le jour au XIe siècle, sous le vocable du Sauveur.

            L’église Saint-Maurice, aujourd’hui cathédrale, revendique la gloire de posséder, sous le nom de Saint Mantil ou Sainte Toaille, la nappe vénérable sur laquelle le Seigneur Jésus aurait institué le sacrement de l’Eucharistie lors de la dernière Cène. D’après Le Lièvre, un des plus anciens historiens de Vienne, cette relique, nous l’avons dit, aurait été apportée par saint Zacharie, second évêque de Vienne et premier martyr de la Gaule, sous Trajan, le 26 mai 106[12].

Le Lièvre relate qu’au moment d’envoyer Zacharie à Vienne, saint Pierre lui impose alors les mains et lui remet « la faincte Toaille, ou mantil fur lequel noftre Redempteur auoit confacré la faincte Euchariftie au foupé auec ses Apoftres, pour en honnorer la ville de Vienne ; & luy tint ces parolles : ‘Que N.-S.J.-C. envoie son ange préparer votre chemin et vous accorde ce que vous demanderez. Recevez ce présent sur lequel N.-S.J.-C. avant de souffrir nous donna son corps et son sang en nourriture. Et l’ayant baisé il l’envoya’ »[13].

            Pour Jacques Robin, « l’authenticité de cette Nappe est incontestable »[14]. L’auteur de cette affirmation, un temps curé de Saint-Maurice, s’appuie sur le témoignage de Jean Le Lièvre. Paul Parfait rapporte les termes d’une lettre de l’évêque de Besançon à l’abbé Robin : « Les documents recueillis par vous et puisés aux sources les plus pures défient la critique la plus sévère[15]. »

            Quelle est l’histoire de cette relique, pour autant que nous puissions l’appréhender ?

 

            II – L’histoire du Saint Mantil du Moyen Âge à nos jours

 

L’histoire de Saint Mantil se focalise en premier lieu sur son authenticité soutenue ou niée à partir d’autres arguments (A), et doit être confrontée ensuite à la présence d’une Sainte Nappe en différents lieux (B).

 


A) Des arguments pour et contre l’authenticité de la Sainte Nappe

 

            Nous venons de rapporter les éléments historiques en notre connaissance relatifs à la venue de cette relique dans notre pays à l’aube de son évangélisation. Un doute sur son authenticité est certes permis. Mély la relègue d’ailleurs au genre des reliques « invraisemblables »[16].

            Cependant, le définiteur provincial des Carmes Déchaussez de la Province d’Aquitaine se fait l’écho, au XVIIe siècle, de cette donation par saint Zacharie qui « laisse à Vienne le précieux dépost de la nappe qui avoit servi à la derniere Cene de N. Seigneur, où il institua le S. Sacrement de l’Autel »[17].

            Voulant défendre l’authenticité de la dite relique, « rien, affirme Rohault de Fleury[18], ne s’oppose dans les habitudes antiques à ce que nous la croyions véritable. En effet, les Romains se servaient dans leurs repas d’une mappa pour s’essuyer la bouche, ou du mantile, mantelium, à peu près synonyme, et qui, plus tard, servit à désigner la nappe même que l’usage fit étendre sur la table. On conservait à Constantinople, dans la chapelle impériale, le linteum[19] dont le Sauveur se ceignit au lavement des pieds, le mantile de la Véronique ; il ne serait pas plus étonnant qu’on ait gardé le linge qui couvrait, la table de la Cène. » Non seulement rien ne s’oppose à cette croyance, écrit à son tour Hoppenot, mais une tradition antique et persévérante l’appuie et la corrobore[20].

            En réalité, d’autres témoignages peuvent être avancés en faveur de la relique de la Sainte Nappe. Le Martyrologe gallican indique en effet, à l’article « Zacharie », le 27 mai : « C’est par la munificence de ce pontife que la cité viennoise possède la sainte Nappe sur laquelle Notre-Seigneur Jésus-Christ, à la dernière cène avec ses apôtres, célébra les divins mystères, c’est-à-dire la sainte Eucharistie ; nappe qui est un gage très précieux et un illustre monument de piété chrétienne[21]. »

            Les Bollandistes notent au 26 mai, que « ce saint évêque, dit-on, laissa à son Église la nappe qui servit au souper que Notre-Seigneur Jésus fit avec ses disciples le soir de sa Passion, lorsqu’il institua le Saint-Sacrement de l’autel » [22]. « Ce don précieux a été conservé jusqu’à ce jour dans l’église de Vienne, orné d’or et d’argent », précise une édition antérieure[23].

            Un éloge de la Sainte Nappe a été rédigé en latin et en français par Chorier, en 1668[24]. L’auteur y rapporte que, « à ce que l’on croit », la Vierge Marie a tissé et peint elle-même cette Nappe, sans étayer une telle assertion.

« Selon la coutume des Juifs, la table de la Cène a dû être recouverte d’une nappe. Saint Augustin rappelle cet usage. La tradition ajoute que c’était un travail à l’aiguille fait des propres mains de la Sainte Vierge. Marie, au dire de la tradition, avait déjà tissé la robe sans couture de son Fils ; ne convenait-il pas qu’elle eût encore l’honneur et la joie de façonner de ses doigts le tissu précieux où Jésus devait être étendu, victime d'amour, dans son état sacramentel ?[25] »

            Le tissu de cette Nappe « est fait avec les filaments d’une sorte d’ortie » [26]. Elle se compose « d’un carré d’étoffe grossière de 20 centimètres de côté, renfermée dans un reliquaire argenté, portant en estampage sur le cadre les douze apôtres, avec cette particularité, que Judas est représenté la tête en bas[27]

            Quel crédit accorder à cette relique, alors que d’autres nappes existent ailleurs ?

 

B) La présence d’une Sainte Nappe dans d’autres villes

 

            L’existence de fragments de la Sainte Nappe ou carrément d’une nappe est revendiquée en certains lieux.

            D’après Mgr Duchesne, la nappe de la Cène était conservée dans l’église Saint-Pierre d’Uzerche, en Corrèze[28], sans autre précision.

            Au XIIIe siècle, la cathédrale Notre-Dame du Puy conservait une relique de la Nappe de la Cène, provenant de l’abbaye Saint-Pierre de Vienne[29]. La filiation serait ainsi établie. Cette relique ne semble plus exister.

            Le musée de Vienne, en Autriche, possède un fragment à peu près semblable au dauphinois, « ce qui ferait supposer qu’ils pourraient bien avoir appartenu l’un et l’autre à la même nappe ayant servi à la Cène »[30]. Il reste mentionné au catalogue du Trésor Impérial.

            Hoppenot affirme que l’église Saint-Roch de Lisbonne « prétend posséder » aussi cette relique, la Nappe du Cénacle étant « assez grande pour que, divisée, elle pût enrichir plusieurs églises »[31]. L’abbé Corblet et dit autant. Il émet l’hypothèse que Lisbonne et Vienne n’en ont peut-être « chacune qu’un fragment »[32]. Cependant les actuels desservants de Saint-Roch ignorent tout de cette relique.

            Nous trouvons encore une mention de la présence de la Sainte Touaille à la Sainte-Chapelle de Paris[33]. Tout donne à penser qu’elle a disparu lors de la tourmente révolutionnaire.

            Corrozet mentionne la présence d’une Sainte Touaille dans une église de Nuremberg. Il s’agit en réalité du fragment aujourd’hui présent dans la capitale autrichienne.

            Il est fait enfin état de la présence pour la cathédrale de Moscou d’une même relique, « mais d’étoffe différente » [34], sans preuves à l’appui.

              Le concurrent le plus sérieux est la Sainte Nappe de la cathédrale Santa María de la Asunción, à Coria, province de Cáceres, en Espagne. Des études menées en 2014 ont établi un lien entre la nappe et le Saint-Suaire. Selon les chercheurs, ils pourraient avoir été tissés en même temps et avoir servi tous deux au Cénacle. Pour John Jackson, directeur du centre consacré au Suaire de Turin dans le Colorado, il a pu s’agir, à l’origine, non d’un suaire mais d’une nappe. Les dimensions de la nappe de Coria sont sensiblement égales à celles du Saint Suaire. Pour Rebecca Jackson, intervenue dans l’étude, « le Suaire et la nappe de Coria ont tous deux utilisés lors de la Cène » [35]. Mais cette nappe n’est connue qu’à partir du XVe siècle, donc bien après celle de Vienne. L’afflux de pèlerins conduit à construire une nouvelle cathédrale. Au XVIIIe siècle, la nappe est placée dans un reliquaire conservé dans le musée de la cathédrale.

            Venons-en au culte qui a entouré la relique de la Sainte Nappe à Vienne.

 

            III – Le culte rendu à la Sainte Nappe de Vienne

 

Contrairement à ce que d’aucuns ont prétendu, les sources relatives au culte rendu à la Sainte Toaille ne sont pas du tout inconnues. Nous nous intéresserons dans un premier temps au culte tel qu’il est pratiqué non seulement jusqu’à la Révolution française mais encore de nos jours (A), puis nous présenterons le reliquaire de la Sainte Nappe (B).

 

A) La vénération de la Sainte Nappe jusqu’à la révolution

 

            Ce culte est abondamment illustré par Pierre Cavard dans son ouvrage sur Vienne la Sainte.

La Sainte Nappe était exposée le lundi de Pâques[36]. Chaque année, au dimanche in albis[37], l’église des SS. Apôtres[38] recevait la visite d’un grand nombre de fidèles, à cause des nombreuses indulgences accordées à tous ceux qui vénèrent cette relique, par les Souverains Pontifes et surtout par Innocent IV [1243-1254] »[39] le jour de l’octave de Pâques[40], « à tous ceux qui visiteront en estat convenable[41] cette saincte relique dans la dicte église ».

La veille, aux premières vêpres, « la relique était solennellement exposée sur le maître-autel. Le lendemain, après l’alléluia de la messe, on la portait en procession à travers le cimetière. À une heure de l’après-midi les fidèles se rassemblaient de nouveau dans l’église abbatiale pour entendre un sermon de circonstance et assister aux secondes vêpres. Comme aux plus grandes fêtes de l’année, les chantres étaient en chape et les cloches carillonnaient à quatre ‘bandes’ »[42].

            Comme Madame Paravy le relève, « le compte des offrandes déposées sur le tombeau de Philippe de Chantemilan a permis de constater le primat du pèlerinage de la Sainte Toaille parmi les manifestations viennoises »[43], du XIIIe au milieu du XVe siècle.

            Le témoignage de l’abbé Pla, curé de Saint-Maurice à la fin du XIXe siècle, nous apprend qu’aux fêtes de Pâques et de la Pentecôte les pèlerins accourent si nombreux, non seulement du Viennois, mais encore du Vivarais, du Forez, du Lyonnais que les hôtelleries et les maisons particulières ne pouvaient les contenir. La foule devait passer la nuit dans les églises ou sur les places publiques[44]. L’affluence était donc considérable. Il s’y mêlait inévitablement des escrocs et autres voleurs à la tire et l’ordre public pouvait en être perturbé.

Une délibération consulaire du mois d’avril 1560 porte sur les mesures de police à prendre pour surveiller les étrangers afin d’éviter ou de limiter les troubles se produisant dans la ville de Vienne à l’occasion de ces manifestations de piété populaire :

« Parce que, d’ancienneté, ceux de Lyon et de l’environ viennent aud. Vienne le jour de Quasimodo a grandes flottes, pour la sainte toaille qui est led. Jour vénérée », les consuls envoient le sire François de la Tour à M. de la Motte-Gondrin et à l’abbé de Savigny, respectivement gouverneurs du Dauphiné et du Lyonnais, « les suppliant leur plaisir être ne permettre descendre dud. Lyon, par eau ni par terre, aucuns suspects »[45].

            D’après Pierre Cavard, Alexandre IV octroie une indulgence de cent jours aux fidèles qui visiteraient l’église Saint-Pierre dans l’octave de Pâques[46].

            En 1562, Vienne tombe aux mains des huguenots. Le reliquaire de la Sainte Nappe leur échappe toutefois, car les religieux de l’église Saint-Pierre l’enterrent, au témoignage de Jean du Bois[47]. Le reliquaire ainsi préservé est exhumé une fois le calme revenu.

            Le culte public reprend en 1568, comme en témoignent les registres de l’Hôtel-Dieu : « Quasimodo, 25 avril, jour que l’on va en procession à Saint-Pierre et au sermon. » Mais la solennité qui, nous l’avons relevé, clôturait les fêtes pascales, « ne devait retrouver son ancien état qu’après la paix définitive, sous Henri IV »[48].

            Au XVIIIe siècle, l’ostension de la relique est déplacée au jour de la solennité de la Pentecôte.

            Quelles que soient les allégations légendaires et les mentions inexactes d’un document du XIVe siècle, la Fundatio Ecclesiæ Viennensis[49], « cette pièce sert du moins à constater cette “possession à une date ancienne, mais que nous ne pouvons fixer avec précision ».

            Le 18 juin 1739, à la clôture de la mission prêchée par le missionnaire royal Jean-Jacques Brydaine (1701-1767)[50], pendant la procession de clôture des exercices le clergé de Saint-Pierre portait la sainte Nappe[51] ainsi que l’épine de la Sainte Couronne conservée dans la cathédrale[52]. La dernière vénération publique eut lieu les 12 et 13 juin 1791[53].

            Cela étant, la dévotion n’a pas disparu pleinement. La Saint Nappe était encore proposée à la vénération des fidèles dans les années 1960 et, à la fin du XXe siècle, elle était placée dans son reliquaire sur le maître-autel le Jeudi Saint.

 

B) Les reliquaires de la Sainte Nappe

 

             Venons-en donc au reliquaire proprement dit. Un inventaire dressé, en 1563, par Gabriel Polin, notaire à Grenoble, le décrit comme « une châsse d’argent doré, où sont autour les douze Apostres rellevés en bosse aveq un saint Zacharie au-dessus, ouvrant et fermant avec deux esquilles d’argent et y ayant au-dessus quatre tornelles d’argent doré et la forme d’un couvert d’église aussy d’argent et en partie doré »[54]. Un inventaire complémentaire mentionne « un vase de cristal enchassé en argent aveq les armes de Saint-Pierre, fermant aveq deux cadenaz d’argent, ayant leurs clefz aussy d’argent, dans lequel est la sainte nappe enveloppée dans un taffetaz rouge » [55].

            À la Révolution, considèrent que la relique est perdue. Cependant, le Directoire ayant ordonné de transporter les vases précieux et les reliques de l’église Saint-Pierre et de l’église Saint-Maurice à la mairie, le sieur Pierre-Amédée Bonjean, orfèvre de son état, s’y rend le 26 avril 1792 à l’effet d’estimer l’or et l’argent des reliquaires. Il est procédé à l’ouverture du reliquaire de la sainte Nappe en présence de « MM. Pioct Abel-Joseph, maire ; Soubeyrand-Raynaud, Triboulet et Serverin, officiers municipaux ; Guy, procureur syndic ; Darces, prêtre-chanoine de l’église collégiale ».

Selon l’inventaire alors dressé, il appert que le dit reliquaire « était monté sur un pied blanc et avait une forme ovale. Une lame d’argent en recouvrait toute la surface[56]. On le pesa après l’avoir séparé de la relique ; et cette relique fut habilement soustraite et sauvée par M. Benatru, secrétaire communal »[57].

Monseigneur de Bonald, archevêque de Lyon en 1839, futur cardinal, n’hésite pas à faire renfermer la dite Nappe dans un nouveau reliquaire[58] et à en renouveler les authentiques[59], reconnaissant ainsi officiellement de nouveau son authenticité. L’église Saint-Pierre ayant été transformée en musée en 1809, c’est dans la cathédrale Saint-Maurice que le nouveau reliquaire est déposé.

            À ces faits s’ajoute le témoignage du curé de la cathédrale Saint-Maurice, publié en 1876. À son arrivée à la cathédrale, il trouve la relique fermée dans une armoire de la sacristie, mais, « le reliquaire présentant une face vitrée très-étroite, on n’apercevait qu’un léger fragment de la relique » [60]. Selon le clergé de la cathédrale, c’était tout ce qui en restait, la partie la plus importante ayant été dérobée lors de l’examen effectué à l’archevêché de Lyon !

Or, désireux de placer l’objet dans un présentoir plus riche, Jacques Robin, avec la permission et en présence de l’autorité religieuse, brise le sceau et découvre alors « la sainte Nappe roulée et soustraite aux regards depuis longtemps, la sainte Nappe envoyée à nous par S. Pierre et confiée à S. Zacharie, notre second évêque. Aussitôt elle a été respectueusement étalée dans un cadre en bois doré. Monseigneur Paulinier y a apposé sept sceaux, et nous la gardons ainsi provisoirement dans ce modeste meuble, jusqu’à ce qu’il nous soit possible de lui donner un écrin moins indigne d’elle » [61].

Ces précisions n’empêchent pas de rencontrer encore de nos jours des affirmations surprenantes, comme celle-ci, figurant sur l’internet : « Il n’est pas possible de décrire cette relique en raison du manque d’informations à ce sujet[62]. » Or, nous venons de voir ce qu’il en est exactement. Il existe d’ailleurs une fiche de la base gouvernementale Palissy concernant les objets mobiliers de l’Isère, facile à consulter sur l’internet. Elle reprend pour l’essentiel des éléments de l’étude de Pierre Cavard. Le reliquaire de la Sainte Nappe, encore appelée Sainte Toaille, sur laquelle le Christ aurait célébré l’Eucharistie le soir de la Cène, y lisons-nous, est en métal fondu, repoussé, en forme de cadre, monté sur un pied circulaire. La bordure du cadre porte des motifs quadrilobés représentant le Christ et ses apôtres, avec une particularité rare, le personnage de Judas étant inversé. Une inscription figure sur la bordure : MUNDI ESTIS SED NON OMNES HOC EST CORPUS MEUM. Ce reliquaire date de la deuxième moitié du XIXe siècle[63].

 

*

*   *

 

              Au terme de cette étude sur la Sainte Nappe, deux points restent à clarifier ou à préciser. D’une part la date exacte à partir de laquelle, au XIIe siècle, l’on commence à parler de l’existence de cette relique ou le document qui en fait état et, d’autre part, la date et le contenu des bulles pontificales accordant des indulgences aux pèlerins présents dans cette métropole pour y vénérer le Saint Mantil. Si nous en croyons les sources, nombre de Souverains Pontifes en auraient octroyé, mais nos recherches dans les Registres pontificaux des papes du XIIIe siècle, Innocent IV (1243-1254), Alexandre IV (1254-1261), Urbain IV (1261-1264), Clément IV (1265-1268), Martin IV (1281-1285), Honorius IV (1285-1287), Nicolas IV (1288-1292), ont été infructueuses[64]. Résumons les principaux arguments qui permettent dans l’état de la question de faire jouer le bénéfice du doute :

 

              a) Le fait que Zacharie soit contemporain de notre Seigneur et disciple de Simon-Pierre.

b) Le poids de la tradition.

c) Les indulgences accordées par les Pontifes romains.

d) Le culte régulier rendu officiellement à la Sainte Nappe jusqu’à une époque récente.

e) Les miracles qui lui sont attribués.

f) La mention de la Sainte Nappe dans l’un ou l’autre martyrologe.

g) La piété du peuple chrétien.

h) Le témoignage du curé de Saint-Maurice.

 

              Quand bien même la présence de la Nappe à Vienne ne serait pas attestée avant le XIIe siècle, cette relique ne saurait être négligée. Les sarcasmes des anticléricaux reflètent une réalité, celle de la reconnaissance de l’existence de reliques par eux remises en cause[65]. Ils se font les témoins involontaires de la piété populaire et de la dévotion solidement enracinée dans la liturgie.

              En tout cas, pour lever le doute évoqué, ne conviendrait-il pas de procéder à une analyse scientifique de la Sainte Nappe, notamment sa datation par le carbone 14 ou de la soumettre à la spectroscopie ?

              Le procédé n’est pas parfait, mais il suffirait à dirimer la question d’une origine du Ier siècle ou simplement médiévale. Cet examen serait probablement la seule façon d’obtenir une assurance, quelle qu’elle soit, et de dissiper, sinon toutes les zones d’ombre subsistant, ce qui relève probablement de l’impossible, du moins certaines d’entre elles.



[1] Lévy, M., Et si c'était vrai..., Paris, Robert Laffont, 2000, p. 228.

[2] Accarias, J., Bulletin de l’Académie Delphinale, 3e série, XV, p. 282.

[3] Silvy, É., Bulletin de l’Académie Delphinale, 4e série, XIV, p. 32.

[4] Du Parc-Locmaria, comte Y., Bulletin de l’Académie Delphinale, 5e série, 18-20, p. 161.

[5] Bossuet, Oraison funèbre du très haut et très puissant prince Louis de Bourbon, 1649.

[6] Péguy, Ch., Deuxième Élégie XXX, Paris, Gallimard, 1955, p. 134.

[7] LE LIEVRE (J.) (orthographié aussi Lelièvre), Histoire de l’Antiquité et Saincteté de la Cité de Vienne en la Gaule celtique, Vienne, 1623.

[8] Une tradition datant au moins de 1239 rapporte que saint Zacharie est enterré dans l’église Saint-Pierre de Vienne (cf. CHEVALIER [U.,], Choix de documents historiques inédits sur le Dauphiné publiés d’après les registres conservés à la bibliothèque de Grenoble et aux archives de l’Isère, Grenoble, 1874, t. II, 5e livre, p. 20). Son corps est « relevé de terre sous le pontificat d’Innocent IV, qui aurait fait à l’occasion une concession d’indulgences » (GROSPELLIER, « Mélanges d’hagiographie dauphinoise. Les listes épiscopales de Vienne »,  Bulletin d’histoire ecclésiastique et d’archéologie religieuse des diocèses de Valence, Gap, Grenoble et Viviers 20 [1900], p. 22). Le volume de la 7e année du pontificat manque (cf. BERGER [Élie], Les Registres d’Innocent IV publiés et analysés d’après les manuscrits originaux du Vatican et de la Bibliothèque Nationale, t. I, p. IX).

[9] CHORIER (Nicolas), Histoire générale du Dauphiné, Grenoble, 1661, vol. 1, p. 369.

[10] LE TOURNEAU (Dominique), « Origine apostolique du diocèse de Vienne. Une question débattue », La Lettre des Académies des Sciences, Lettres et Arts, n° 37, septembre 2021.

[11] CAVARD (Pierre), Vienne la Sainte, op. cit., p. 91.

[12] Le 25 mai 103, selon MERMET, Chronique religieuse de Vienne (Dauphiné), op. cit., p. 12.

[13] LE LIEVRE (J.), Histoire de l’Antiquité et Saincteté de la Cité de Vienne, op. cit., p. 58 : « Mittat Dominus nofter Iefus Chriftus angelum fuum qui præparet iter tuum, & quæ poftulaveris adiiciat. Accipe hoc munufculum per quo Dominus nofter IIefus Chriftus, antequam pateretur nobis corpus & fanguinem fuum dedit in cibum. Et ofculum eum, emifit a fe. »

[14] Recherches sur les précieuses reliques vénérées dans la Sainte Église de Vienne par le curé de Saint-Maurice (en réalité Jacques ROBIN), Vienne, 1876, p. 1.

[15] PARFAIT (Paul), La Foire aux reliques, Paris, s.d. (XIXe s.)., p. 346.

[16] MÉLY (Fernand de), Exuviæ sacræ constantinopolitanæ. La croix des premiers croisés. La Sainte Lance. La Sainte Couronne, Paris, 1904, p. 184.

[17] SAINT AMABLE (Bonaventure de), Histoire de S. Martial apôtre des Gavles et principalement de l’Aqvitaine et dv Limosin ; ou la défense de son apostolat contre les critiques du temps, Clermont, 1676.

[18] ROHAULT de FLEURY (Ch.), La Messe, études archéologiques sur ses monuments, Paris, 1883, t. VI, « vêtements d’autel », p. 171.

[19] RIANT, Exuviæ sacræ Constantinopolitanæ, Genève 1878, t. II, p. 211 et 213, « Catalogus reliquiarum C. P. » par Nicolaus Thingeyrensis.

[20] Selon HOPPENOT (J.), La Messe dans l’histoire et dans l’art, dans l’âme des saints et dans notre vie, Lille-Paris-Bruges-Bruxelles-Rome, 1906, p. 3-4.

[21] Martyrologe gallican, André du Saussay éd., 1637, Paris, p. 308 : « Munificentiæ verò eiusdem in Viennenses, extat sacra mappa super quam Christus Dominus in vltima coena diuina mysteria celebrauit, pretiosissimum pignus, atque præclarum & efficax Christianæ pietatis & devotionis monimentum. »

[22] GUÉRIN (Mgr Paul), Les Petits Bollandistes, op. cit., tome 6, p. 178.

[23] Bollandistes, 27 mai, édition de 1867, Victor Palmé.

[24] Sous le titre « Nobilissimis et venerandis dominis, domino decano et canonicis Sancti Petri Viennensis Elogium Sacræ Mappæ » : « Venerare hanc Mappam quisquis es / Consecrauit illam Deus dum ei accubuit. / Hac in Mappa conuiua Christus, & conuiuium fuit, / Hac in Mappa panem et vinum mutauit in Deum, / Hac in Mappa cibus Apostolis fuit, & cibus cibi, / Quale conuiuium in quo edit, & editur Deus ! / Creditur Deipara hanc telam texuisse, / Præuiderat futurum conuiuisi, & Mappam posuit. / Interseuit telæ lilia acu picta, / Pinxit seipsam, & filium dum lillia pinxit, / Sedit inter lillia Christus, & lilium fuit. / Seruire aliis cœnis post hanc cœnam Mappa non debuit, / Collegit illam Petrus, & fleuit quoties tetigit, / Memor conuiuij in quo Deus ipse conuiua fuit. / Debebatur Galliæ hæc Mappa interresta lillis, / Debebatur Vienna quæ primaria vrbs galliarum tunc fuit ; / Donauit illam Petrus Viénæ vbi olim honorandam præuidit, / Tulit donum Zacharias Discipulus Christi, & Petri, / Ne dubites de testimonio, protomartur Galliarum fuit. / Nec antiquæ rei quærendus est testis nouus ; / Probat seipsam antiquitas testis sui ; / Fidem faciunt sexdecim sæcula dum aliquid tradunt, / Temerarius est qui id negat quod tempus affirmat. / Ex eo collige antiquitatem Ecclesiæ Viennensis, / Fundauit illam Paulus, Crescens auxit, Zacharias rexit, / Adhuc Martyris sanguis ad Carmelitas rubet in lapide, / Certior esse non potest fidei testis quam sanguis. / Abi Viator, & reuerere hanc Mappam, si pius es, / Materies vrtica est, pungit impium qui non credit. » Y font suite une anagramme : « Eucharistiæ Sacramentum  / Chara Ceres mutata in Iesum », et une épigramme : « Charam hac in Mappa ererem mitauit Iesu, / Non est hæc Cereris, sed Sacra Mappa Dei, / Panis erat diuina Ceres, post enthea verba, / Incipit esse Deus, definit esse Dea » (Les Éloges en français et en latin de Vienne souterraine et de la Sainte Nappe, avec deux lettres du sieur de Mantes sur l’ancienneté et la saincteté de Vienne, Vienne, 1668,  p. 11-12. D’après Charvet, l’auteur de cet opuscule serait Chorier).

[25] DEVAUX (Prosper), L’Eucharistie à travers les siècles. Aperçu historique, Paris, 1919, p. 153.

[26] L’Éducation catholique, 11e année, n° 42, 17 juillet 1891, p. 657.

[27] BAFFERT (Pierre), Monographie historique, archéologique et artistique de l’Église Saint-Maurice de Vienne, 1901, p. 57.

[28] C’est ce qu’affirmaient CORNEILLE (Thomas), Dictionnaire universel géographie et historique contenant la description des Royaumes…, Paris, 1708, vol. III, p. 762 ; DULAURE (Jacques-Antoine), Description des principaux lieux de la France, Paris, 1789, p. 307 ; COLLIN de PLANCY (J. A. S.), Dictionnaire critique des reliques et des images miraculeuses, Paris, 1822, t. III, p. 229.

[29] DOR (Pierre), « Les reliquaires de la Passion en France du Ve au XVe siècle », Histoire médiévale et archéologique 10 (1999), p. 185.

[30] HOPPENOT (J.), La Messe dans l’histoire et dans l’art, dans l’âme des saints et dans notre vie, op. cit., p. 3 ; BAFFERT (Pierre), « L’Église primatiale Saint-Maurice (cathédrale de Vienne) », dans Annales Dauphinoises 1 (1900), p. 244. Il s’agit du Trésor Impérial, dans la Schweizerhof. Cf. Autriche, Lonely Planet, 2017, p. 66. Le reliquaire, daté de 1518, à Nuremberg, est d’Hans Krug.

[31] HOPPENOT (J.), La Messe dans l’histoire et dans l’art, dans l’âme des saints et dans notre vie, op. cit., p. 4.

[32] CORBLET (Jules), Histoire dogmatique, littéraire et archéologique du sacrement de l’Eucharistie, Paris-Bruxelles-Genève, 1885, p. 66.

[33] CORROZET (Gilles), La Fleur des antiquités et singularités de Paris, Paris, 1533, chap. 12 ; MÜNSTER (Sebastian), La Cosmographie universelle de tout le monde : en laquelle, suiuant les auteurs plus digne sde foy, sont au vray descriptes toutes les parties habitables, & non habitables de la Terre, & de la Mer […], auec trois Tables, 1575. L’affirmation est reprise par BÉRAUD (Antoine Nicolas) et DUFEY (Pierre-Joseph-Spiridion), Dictionnaire historique de Paris, vol. 1, 1828, p. 155 (qui mentionnent dans l’inventaire des reliques, « la sainte nappe, en un tableau ») ; OLLIVIER (Jules), La France littéraire : politique, sciences, beaux-arts 8 (1833), p. 21. La Nappe est mentionnée sans source dans http://chrisagde.free.fr/capetiens/saintechapelleb.htm

[34] COLLIN de PLANCY (J. A. S.), Dictionnaire critique des reliques et des images miraculeuses, op. cit., t. II, p. 60.

[35] SANABRÍA SIERRA (María del Carmen), thèse de doctorat mentionnée dans https://fr.aleteia.org/2017/07/30/ce-morceau-de-tissu-est-il-la-nappe-utilisee-lors-de-la-cene/

[36] Recherches sur les précieuses reliques vénérées dans la Sainte Église de Vienne, op. cit., p. 175.

[37] Le nom est tiré de l’introït du dimanche de Quasimodo, dans l’octave de Pâques. Il fait « allusion aux néophytes, baptisés pendant la vigile pascale : ils y ont reçu un vêtement blanc, rappelant la robe blanche des élus de l’Apocalypse (7, 9), qu’ils déposaient la veille de ce dimanche, appelé aussi, pour cette raison, dimanche in albis » (LE TOURNEAU [Dominique], Les mots du christianisme. Catholicisme – Orthodoxie – Protestantisme, Paris, 2005, p. 216).

[38] Autre nom de l’église Saint-Pierre.

[39] Chorier parle, lui aussi, d’indulgences accordées par le pape Innocent IV (cf. CHORIER [Nicolas], Recherches sur les antiquités de la ville de Vienne, métropole des Allobroges, capitale de l’empire romain dans les Gaules et des deux royaumes de Bourgogne, Lyon, 1828, p. 273). À vrai dire, cette affirmation aurait besoin d’être étayée par des références précises.

[40] LE LIÈVRE (J.), Histoire de l’Antiquité et Saincteté de la Cité de Vienne, op. cit., p. 59.

[41] C’est-à-dire en remplissant les conditions fixées par l’Église pour obtenir les indulgences.

[42] CAVARD (Pierre), Vienne la Sainte, op. cit., p. 81.

[43] PARAVY (Pierrette), De la chrétienté romaine à la Réforme en Dauphiné. Évêques, fidèles et déviants (vers 1340-vers 1530), Collection de l’École française de Rome 183, 1993, vol. I, p. 728.

[44] MERME(T.), Chronique religieuse de la ville de Vienne (Dauphiné), op. cit., p. 286. Fait repris brièvement par TAYLOR (I.), Voyages pittoresques et romantiques dans l’ancienne France, Paris, 1854, Dauphiné, p. 77.

[45] Archives municipales de Vienne, GG 31, n° 30, cité par CAVARD (Pierre), Vienne la Sainte, op. cit., p. 81.

[46] Cf. CAVARD (Pierre), Ibid., p. 81.

[47] JOANNES A BOSCO, Floriacensis vetus bibliotheca Benedictina, sancta, apostolica, pontificia, cæsarea, regia, franco-gallica, Lyon, 1605, texte XXVIII, « Antiquæ, sanctæ ac senatoriæ Viennæ Allobrogum Gallicorum et prophanæ antiquitates », p. 22.

[48] CAVARD (Pierre), Vienne la Sainte, op. cit., p. 82.

[49] Fundatio Sanctæ Viennensis Ecclesiæ, quando et a quibus dotes et bona tam spiritualia quam temporalia obtinuit, ms 10680.

[50] Cf. LE QUERE (François), Un missionnaire au XVIIIe (Jean-Jacques Bridaine), Paris, 1959.

[51] Cf. MERMET, Chronique religieuse de la ville de Vienne (Dauphiné), op. cit.

[52] Elle a été donnée le jour de Pâques 1620 par Jérôme de Villard, évêque de Vienne. Cf. DOR (Pierre), Les épines de la Sainte Couronne du Christ en France, Paris, 2009, p. 588.

[53] CAVARD Pierre, Vienne la Sainte, op. cit., p. 82.

[54] Archives départementales de l’Isère, Fonds de Saint-Pierre de Vienne, cité par PRUDHOMME (A.), « Le Trésor de Saint-Pierre de Vienne », dans Bulletin de l’Académie Delphinale, 3e série, 19 (1884), p. 132 ; CAVARD (Pierre), Vienne la Sainte, op. cit., p. 81.

[55] Archives départementales de l’Isère, Fonds de Saint-Pierre de Vienne, cité par PRUDHOMME (A.), « Le Trésor de Saint-Pierre de Vienne », loc. cit., p. 134.

[56] Inventaire annexé au registre des délibérations de la municipalité, de 1791 à 1792.

[57] Recherches sur les précieuses reliques vénérées dans la Sainte Église de Vienne, op. cit., p. 6, qui se rapporte au témoignage de M. Leymin et de l’auteur de l’inventaire. Cf. également HOPPENOT J., La Messe dans l’histoire et dans l’art, dans l’âme des saints et dans notre vie, op. cit., p. 3.

[58] Une photo est donnée par BAFFERT (Pierre), « L’Église primatiale Saint-Maurice (cathédrale de Vienne) », loc. cit., p. 245.

[59] « Cet acte fut dressé par M. Pagnon, vicaire-général, et très-régulièrement contre-signé et scellé par le secrétaire de l’archevêché » (Recherches sur les précieuses reliques vénérées dans la Sainte Église de Vienne, op. cit., p. 7).

[60] Ibid.

[61] Ibid., p. 7-8.

[62] http://prosamor.wixsite.com/reliquesdelapassion/la-nappe-de-la-cne

[63]Cf. http://www.inventaire.culture.gouv.fr/public/mistral/palissy_fr?ACTION=RETROUVER&FIELD_98=LOCA&VALUE_98=Rh%f4ne%2dAlpes%20&NUMBER=165&GRP=2&REQ=%28%28Rh%f4ne%2dAlpes%29%20%3aLOCA%20%29&USRNAME=nobody&USRPWD=4%24%2534P&SPEC=3&SYN=1&IMLY=&MAX1=1&MAX2=200&MAX3=200&DOM=Tous La Sainte Nappe ne figure pas dans les objets et mobiliers classés, au 1er juin 1960 : cf. « Monuments, immeubles, sites et objets mobiliers protégés ou classés au titre de la législation sur les monuments historiques », Bulletin de la Société des amis de Vienne, n° 57-58 (1961-1962), p. 95-100.

[64] Il est vrai que les pièces contenues dans les registres, sont « loin de représenter toute l’activité de la chancellerie pontificale entre 1243 et 1254 » (BERGER [Élie], Les Registres d’Innocent IV, op. cit., Paris, t. Ier, 1884, p. xxvi), remarque valable pour les autres registres pontificaux.

[65] Même s’il écrit pour railler, Jules Ollivier doit bien reconnaître que « la sainte nappe opérait beaucoup de miracles » (OLLIVIER [Jules], La France littéraire, loc. cit.).

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