Joseph Kessel, Les Mains du miracle
Joseph Kessel, Les Mains du miracle
préface de H. R. Trevor-Roper, Paris, Gallimard, 1960, 311p.Cet ouvrage fort connu de Kessel n'est pas un roman d'aventures africaines. C'est un livre qui nous donne rendez-vous avec l'histoire et encore avec l'Histoire, avec un H majuscule. C'est un des livres qui comptent dans la vie, un de ceux à côté desquels il ne faut pas passer. Un livre qui ne laisse pas indifférent et qui nous fait croire en la bonté (lire la suite) de l'être humain, en sa capacité à rebondir face à la barbarie. La barbarie, en l'occurrence, est le national-socialisme allemand incarné par le numéro deux du régime nazi, le Reichführer Heinrich Himmler, bras droit d'Hitler, véritable État dans l'État, maître absolu des S.S. et de tout l'appareil répressif et terrifiant du régime.
Mais voilà, Himmler est malade et aucun médecin n'a pu le guérir, jusqu'à ce qu'on lui amène Felix Kersten, médecin lituanien, qui a fait de la Hollande sa patrie d'adoption. Kersten a un un extraordinaire don de masseur. Désormais Himmler figurera parmi ses clients. Certes, Kersten ne partage pas l'idéologie nazie et voit grandir les dangers qui s'amoncèlent sur l'Europe. Mais les soulagements réels qu'il apporte au dirigeant nazi font naître une confiance qu'Himmler ne peut partager avec personne d'autre. Kersten bénéficie ainsi d'un régime d'exception qui lui donne accès direct au Reichführer. Les autorités finlandaises insistent pour qu'il reste auprès d'Himmler afin de leur fournir des renseignements. Mais plus que cela, Kersten va réussir à exercer une véritable influence sur Himmler, qui lui gardera toute sa confiance malgré les dénonciations dont il fera l'objet de ses ennemis nombreux, sans jamais se douter du jeu dangereux joué par Kersten.
Celui-ci obtient peu à peu la grâce de prisonniers. Puis il réussit, au terme d'un long bras de fer, à amener Himmler à ne pas appliquer une directive d'Hitler ordonnant la déportation en Pologne de tous les Hollandais. Nous assistons ensuite à bien d'autres succès « diplomatiques », obtenus parfois à force de contre-ordres et en s'opposant à la Gestapo qui ne peut rien contre le protégé d'Himmler. Il est avec lui et Hitler, le seul à pouvoir se faire adresser du courrier à un secteur postal non soumis à la censure, le seul avec eux à bénéficier d'une ligne de téléphone directe !
À la fin de la guerre, Kertsen fera ramener la décision d'Hitler de faire sauter tous les camps de concentration : il sauve ainsi 800 000 prisonniers de la mort. Un de ses coups de maître est qu'Himmler accepte de rencontrer un représentant du Congrès juif mondial, auquel il accorde la grâce de prisonniers juifs...
On ne sera pas étonné que Kersten ait été fait plus tard Juste des Nations. C'est une grande figure qui mériterait d'être connue de tous. Avec un Kersten, on ne peut douter de l'homme.
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